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SOS Villages : de nombreuses doléances reçues et des failles notées

Amedée Dabeecharun Amedée Dabeecharun, de SOS Village.

Après l’abri La Colombe, SOS Village (Mauritius) est dans le collimateur de l’Ombudperson for children. Le bureau enquête sur plusieurs plaintes reçues et attend que le travail soit bouclé avant de les commenter plus en détails.

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SOS Village (Mauritius) fête ses 30 ans cette année. Les festivités, qui ont commencé le samedi 25 mai, pourraient être entachées par les nombreuses plaintes concernant les villages SOS de Beau-Bassin et de Bambous. Selon nos recoupements, des cas d’abus sexuels entre garçons et ceux des filles enceintes ont été rapportés. La Brigade pour la protection des mineurs a aussi été informée de plusieurs escapades, qui ont terminé en beuveries selon diverses sources. Pour le Managing Director de SOS Village (Mauritius), tout est mis en œuvre pour donner le meilleur encadrement possible aux bénéficiaires des divers programmes de l’organisation. L’image qu’il dépeint est, cependant, tout à fait différente des informations que nous avons pu recueillir.

Amedée Dabeecharun explique en effet que SOS Village a à cœur l’intérêt de chaque enfant confié à l’organisme à travers l’Alternative Care Unit (ACU) du ministère de l’Égalité des genres. Arrivé à 17 ou 18 ans, un service d’After Care lui est proposé, afin de faciliter sa réintégration au sein de sa famille ou de la société. Afin de le libérer d’un milieu institutionnalisé, il existe aussi des maisons familiales intégrées au sein même de la communauté, où il apprend à être autonome.

Certains bénéficient d’un forfait d’installation d’une durée limitée pour la location d’une maison, par exemple, cela afin de ne pas plonger dans l’assistanat ou de créer une dépendance. Des sessions d’orientation professionnelle lui sont aussi proposées afin qu’il puisse trouver du travail selon ses compétences et aptitudes.

Difficultés et failles

Mais les choses ne se déroulent pas comme sur des roulettes. Des couacs ont été notés, d’où les nombreuses doléances que le bureau de l’Ombudperson for children et la Brigade pour la protection des mineurs ont reçus. Parmi les cas, citons celui de Vijay (prénom modifié), qui est aujourd’hui à la rue. Ce qui démontre, selon une source, les difficultés que SOS Village rencontre pour gérer certains cas et souligne certaines failles du programme mis en place pour l’encadrement des bénéficiaires.

Depuis quelque temps, ce jeune homme à l’allure fragile traîne aux abords d’un supermarché des basses Plaines Wilhems. Il fait parfois des menus travaux, mais il n’a que le trottoir pour passer la nuit. « Mo pena plas pou reste. Mo sagrin mo lor simin », nous a-t-il expliqué. (Voir encadré). Au SOS Village, cependant, le Managing Director décrit ce cas comme étant difficile.

Selon Amedée Dabeecharun, Vijay a refusé toute forme d’aide. Même celui de loger avec ses frères, qui habitent un village sur la côte ouest. « Il souffre d’un trouble mental. On veut l’aider, mais il ne semble pas être prêt pour cela », selon le Managing Director. Sur notre insistance, il avoue qu’il y a une allégation d’abus sexuel dont il aurait été victime et sur lequel l’organisation enquête en ce moment. Il s’est retrouvé au Rehabilitation Youth Centre pendant un certain temps et refuse toute assistance, selon le Managing Director. « Nous lui avons proposé un encadrement, mais s’il refuse, nous ne pouvons insister », dit-il. Vijay affirme, pour sa part, qu’une fois qu’il a atteint ses 18 ans, on lui a fait comprendre qu’il ne pouvait plus rester.

Agir avec prudence

L’équipe de SOS Village ajoute également que les enfants qui ont été victimes d’abus sexuels et ceux qui ont « des troubles mentaux ou de comportements » ont besoin d’un « encadrement spécialisé » et ne devraient pas être placés avec les autres enfants. Les mélanger les mettrait à risque. SOS Village agit avec prudence et prend des précautions afin d’éviter toute stigmatisation et assurer un traitement équitable des cas. Mais selon une autre source à SOS Village, l’encadrement des bénéficiaires n’est plus ce qu’il était. « Auparavant, il y avait une bonne structure, mais ces derniers temps, il y a un laisser-aller. L’attention dont les enfants ont besoin n’est plus dispensée comme avant », affirme notre interlocuteur.

Nous avons aussi sollicité le ministère de l’Égalité des genres concernant ces allégations. Un préposé nous a fait comprendre que le ministère nous ferait parvenir une réponse ultérieurement.


Sessions de formation plus poussées recommandées

Outre le cas d’abus sexuel au SOS Village de Beau-Bassin, l’organisation enquête aussi sur le cas d’un enfant déshabillé par un caregiver. Le cas a été référé au psychologue de l’organisation et une enquête interne est en cours. Le Child Protection Committee a aussi été convoqué pour un complément d’enquête. À ce stade, il ressort que ce cas a été rapporté par un des pensionnaires qui avait menacé de faire de fausses allégations. Le comité a décidé que des sanctions seront prises si d’autres cas ne sont pas rapportés immédiatement. Il a aussi recommandé des sessions de formation plus poussées.


Une enquête en cours

Sollicitée par rapport à la situation prévalant aux SOS Villages de Beau-Bassin et de Bambous, l’Ombudperson for children Rita Venkatasawmy nous a confirmé que l’organisation a sollicité l’assistance de son bureau. Cela afin de sensibiliser les bénéficiaires quant à leurs droits et responsabilités. Mais, submergée par les nombreuses plaintes reçues, elle explique qu’il est difficile de tout régler d’un seul coup et d’assurer en même temps une campagne de sensibilisation. Elle nous a, cependant, assuré qu’une enquête était en cours par rapport aux différents cas signalés. 

Du côté de la Brigade pour la protection des mineurs, une source nous apprend qu’elle est  régulièrement sollicitée pour des cas d’escapades. Après enquête, les fuyards sont souvent retrouvés chez leurs proches. Notre interlocuteur ajoute que, pour des allégations d’attouchement sexuel, les cas sont référés à la Child Protection Unit du ministère de l’Égalité des genres et une enquête est menée à chaque fois. Il n’a pas souhaité donné plus d’informations pour le moment.

Une autre source soutient, pour sa part, que régulièrement les bénéficiaires quittent leur maison pour aller consommer des boissons alcoolisées. Une situation que les voisins déplorent régulièrement, selon notre source.


En quête d’un toit

Cela fait plusieurs mois déjà que Vijay dort dans la rue. Bien qu’il souffre du froid le soir, il affirme s’être adapté et prend tout ce qu’il peut trouver pour se protéger la nuit, avant de les jeter ensuite à la poubelle. Il soutient qu’il souhaite trouver un endroit où habiter, mais que ses démarches n’ont pas abouti jusqu’à présent. Une âme charitable, sensible à sa détresse, a décidé de l’aider en lui permettant de se laver et en lui donnant à manger. Mais il n’a que le ciel comme toit la nuit.

Ancien pensionnaire du SOS Village de Beau-Bassin, il affirme qu’une fois qu’il a atteint ses 18 ans, on lui a fait comprendre qu’il ne pouvait plus rester. Il ajoute qu’il n’a reçu aucune assistance pour trouver un travail après ses études de Form 3 Prevok dans un collège d’État.

Le responsable d’une structure qui a encadré ses deux frères âgés d’une vingtaine d’années explique qu’il a habité quelque temps avec eux avant de s’enfuir. Comme le Managing director de SOS Village Mauritius, il est d’avis que Vijay souffre d’un trouble mental.

 

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