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Sivaramen Marday: vivre de la terre malgré un MBA en poche

À bientôt 50 ans, Sivaramen Marday, titulaire d’un Master in Business Administration, a choisi de rompre avec le quotidien de salarié pour aller vers le travail de la terre. Un choix qu’il ne regrette pas. C’est un destin atypique, ou plutôt un choix qui, à première vue, relève de l’inconscience. Mais à y regarder de près, Sivaramen Marday ne fait que suivre son cœur, ou simplement une philosophie qui s’inscrit dans une ligne écologique tout à fait normale. [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18569","attributes":{"class":"media-image alignleft size-full wp-image-31699","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"480","alt":"Sivaramen Marday"}}]]À  Curepipe, au pied de Trou-aux-Cerfs, un matin, nous l’avons croisé en train de travailler à la création du jardin culturel que le chanteur carnatique Sharvan Boyjonauth souhaite voir émerger sans sa cour. « C’est un projet qui m’intéresse au premier degré, explique Sivaramen. Il y aura un bassin avec un jet d’eau, des bancs, des plantes et des fleurs, bref, un paysage propice à la musique traditionnelle indienne ». À 5e Mile, Beau-Bassin, chez lui, dans une grande maison labyrinthique, les travaux sont toujours constants. Il ne s’agit pas de chambres traditionnelles, où le confort rime avec ce que nous montre la pub sur papier  glacé. Non, dans la pièce principale, le matelas est à même le sol, à côté des troncs ou des poutres travaillées qui servent de tables. Ailleurs, le bois, omniprésent, et d’autres objets de récupération ont retrouvé d’autres fonctions. « Il suffit d’un peu d’imagination pour reconvertir beaucoup de choses dont personne ne se sert, mais auxquelles on peut donner une seconde vie », explique Sivaramen. Difficile d’imaginer que pendant des années, ce dernier a été un salarié exemplaire, propre sur lui, tiré à quatre épingles, rompu à la discipline et à la rigueur du monde du travail.

En Angleterre, passer un MBA

Après une scolarité sans problème à l’école Pierre Renaud et le collège New Eton, Sivaramen Marday part à Birmingham, en Angleterre, passer un MBA. Après ses études, il choisit de travailler dans des boites anglaises. « Là, j’ai été témoin d’une culture de travail qui allait me marquer à vie. On n’attend pas que vous mettiez une cravate, une belle chemise et des chaussures de classe, mais plutôt que vous donniez des résultats. Plus tard, à Maurice, je verrai la différence », raconte-t-il. [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18566","attributes":{"class":"media-image alignright size-full wp-image-31696","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"480","alt":"Sivaramen Marday"}}]]De retour à Maurice, il prend de l’emploi dans le département administratif d’une entreprise de la zone franche, laquelle, au bout de cinq ans, s’installe à Madagascar.  Par la suite, Sivaramen va enchaîner les emplois, d’abord à Continent (devenu Jumbo par la suite), ensuite à Pharmacie Nouvelle, à Mammouth, puis à ABC Foods. Il est aussi professeur à temps partiel à l’institution éducative OCEP. Pendant quelques années, il participe au Joint Child Health Project, une initiative californienne qui étudie les facteurs de risque pouvant développer des pathologies psychiatriques chez les enfants. « Cette expérience venait à point nommé pour moi, car j’avais moi-même un enfant de 3 ans. Du coup, je me suis mis à réfléchir sur la vie. J’observais ses gestes, ses premiers balbutiements.  C’est aussi ce travail axé sur la psychologie qui m’a aussi aidé à mieux supporter mon divorce. J’ai aussi commencé à réfléchir aux choses pour moi, au lieu d’être un salarié derrière un bureau, toujours au service des autres et sans jamais obtenir l’infime reconnaissance de l’employeur. J’avais noté que chaque fois qu’un salarié commettait une erreur, cela était consigné dans un dossier, qui pouvait être utilisé pour le virer, mais il ne récoltait jamais une bonne note lorsqu’il avait accompli un acte positif pour son entreprise. Les employeurs n’étaient pas les seuls à me dégouter des entreprises mauriciennes. Il y avait aussi la mentalité de certains salariés, des collègues », fait ressortir Sivaramen.

« (…) j’aime les directives pas les ordres »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18570","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-31700","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Sivaramen Marday"}}]] Était-il mal dans sa peau, à Maurice, après avoir vécu 14 années en Angleterre ? Était-il réfractaire à la culture mauricienne ? Était-il devenu passées en Grande-Bretagne ? « Ces années britanniques avaient certainement façonné ma façon de penser. La chose la plus importante que j’ai acquise là-bas, c’était le respect, partout, mais surtout dans les entreprises. Les Anglais et Américains mettent l’accent sur les résultats, pas sur la manière dont on est vêtu. Il n’y a qu’à voir comment les jeunes développeurs en informatique sont habillés en Californie. Moi, j’aime les directives pas les ordres. J’agis en fonction des objectifs et lorsqu’on ne donne des responsabilités, je sais que j’ai des comptes à rendre. J’applique ces règles dans ma propre vie. » Depuis qu’il a tourné le dos au monde salarial, Sivaramen, qui a découvert sa vocation un jour où il décorait le bungalow familial à Albion à l’aide des coraux, est convaincu que la terre peut suffire à nourrir son homme. « Au départ, ma famille n’avait pas accepté mon choix. Mes parents, qui sont très modestes, étaient fiers de mon diplôme, de mes études dans un pays européen. Mais, il me fallait trouver ma voie, être en phase avec mes convictions écologiques.» Mais c’est aussi en Angleterre que sa vocation a pointé le bout de son nez. « Un jour, au Chelsea Flower Show, j’ai eu l’éblouissement de ma vie lorsque j’ai vu une telle quantité de fleurs, mais aussi leurs variétés. Cette foire est restée nichée quelque part dans ma tête », fait-il valoir. [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18571","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-31701","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Sivaramen Marday"}}]]

Travaux de décorations dans des cours

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18567","attributes":{"class":"media-image alignleft size-full wp-image-31697","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"480","alt":"Sivaramen Marday"}}]]Son diplôme de MBA est-il aujourd’hui au placard, juste une feuille validant des années d’étude ? « Certainement pas. Mes études me servent à gérer mes activités professionnelles. J’entreprends des travaux de décoration dans des cours, je crée des jardins, des jets d’eau ornés de statuettes. Il faut préparer des devis et respecter des délais. Lorsqu’il s’agit d’argent, il faut faire preuve de sérieux », fait observer Sivaramen. Mais aujourd’hui, le travail ne lui prend pas la tête, car il peut gérer son temps à sa guise, se mettre au lit aux petites heures du matin après avoir pris un verre avec ses amis et se réveiller tard dans la matinée. « Lorsqu’on est dans un tel état d’esprit, le travail devient un pur plaisir. Dans mon cas, ce sont les conditions idéales pour devenir plus créatif », lâche-t-il. Depuis quelque temps, le projet qui occupe sa pensée est la création d’une ‘Violin House’, en hommage au violoniste Lakshminarayana Subramanian. « Ce sera un espace rustique, totalement en bois, où on pourra écouter de la musique classique indienne, parler sans excitation et même méditer. Ce sera à la fois quelque chose de personnel, mais aussi un lieu de partage. Avec Avish, un jeune diplômé de l’Université de Maurice que j’emploie, le projet ne tardera pas à voir le jour. »
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