Le duo Bruneau Laurette – Sherry Singh semble, ces dernières semaines, retenir l’attention du gouvernement. Et plus précisément celle du Premier ministre Pravind Jugnauth. Tant et si bien que certains observateurs s’attendent à une guerre sans merci.
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Bruneau Laurette et Sherry Singh seraient-ils devenus les ennemis no 1 du gouvernement ? Entre les déclarations choc du Premier ministre Pravind Jugnauth, qui ne manque pas une occasion d’exprimer son mécontentement à la suite de la décision de la magistrate Jade Ngan Chai King d’accorder la liberté sous caution à l’activiste social Bruneau Laurette, et les efforts entrepris par les autorités pour enquêter sur les biens de l’ex-Chief Executive Officer (CEO) de Mauritius Telecom (MT), tout semble indiquer que le gouvernement a officiellement déclaré la guerre à ces deux hommes.
De différentes sources à la Financial Intelligence Unit (FIU), on apprend que, si cette autorité a essuyé un revers en cour pour procéder au gel des avoirs de l’ex-CEO de la compagnie de télécommunication nationale, ce ne serait toutefois que partie remise. La FIU semble déterminée à revenir à la charge.
Selon nos recoupements d’informations, l’acquisition d’un terrain au coût de Rs 17 750 000 par un ressortissant indien, le 19 juin 2018, intéresse cette autorité. on chercherait à mieux comprendre l’implication de l’ex-CEO de MT dans cette transaction.
Sous stricte surveillance
Dans le cas de Bruneau Laurette, il continue, apprenons-nous, d’être sous stricte surveillance. Outre les recours légaux initiés par le bureau du commissaire de police pour contester sa libération sous caution, d’anciens dossiers liés à Bruneau Laurette pourraient refaire surface. Tout cela démontre, en tout cas, que l’attention de l’Hôtel du gouvernement est bel et bien braquée sur les représentants de la plateforme politique One Moris.
Selon le syndicaliste et ex-député Jack Bizlall, l’offensive du gouvernement contre Bruneau Laurette et Sherry Singh indique clairement que Pravind Jugnauth n’a pas d’amis une fois qu’il est au pouvoir. « Et une fois qu’il apprend que certains de ses proches ont envie de prendre leurs distances avec lui, il ne se contente pas de les mettre à la porte, mais il va aussi les attaquer avec les dossiers qu’il a gardés sur eux », explique-t-il.
Selon lui, c’est le leader du Reform Party, Roshi Bhadain, qui a le plus souffert de cette méthode. « Bhadain était son partenaire, son mam kole. Et dès qu’il s’est rendu compte que Bhadain commençait à déployer ses ailes et qu’Anerood Jugnauth envisageait de faire de lui le prochain ministre des Finances, Pravind Jugnauth s’est arrangé pour que Roshi Bhadain soit poussé vers la porte de sortie. Et on a vu qu’il ne lui a pas laissé la vie tranquille par la suite. Il y a eu une descente policière chez Roshi Bhadain », rappelle Jack Bizlall. Pravind Jugnauth agit « dans son intérêt absolu », dit-il.
« Nuisance value »
Bruneau Laurette et Sherry Singh sont d’une « nuisance value » non négligeable pour Pravind Jugnauth et le gouvernement. C’est en tout cas ce que croit savoir l’historien et observateur politique Jocelyn Chan Low. « Sherry Singh et Bruneau Laurette ont tous deux clairement fait comprendre qu’ils avaient des munitions contre Pravind Jugnauth et tout semble indiquer qu’il s’agit de munitions qui pourraient faire très mal. Face à la détermination des deux hommes, la stratégie du gouvernement et du Premier ministre consiste à tout mettre en œuvre pour les décrédibiliser », analyse l’historien.
Il ne manque pas de mettre en avant le fait que Sherry Singh et Bruneau Laurette ont attaqué directement le Premier ministre. Il dit d’ailleurs observer une grande fébrilité au sein de la majorité gouvernementale.
L’acharnement du gouverne-ment et du Premier ministre contre Sherry Singh et Bruneau Laurette a surtout pris de l’ampleur depuis la création de la plateforme One Moris. C’est sous cet angle que l’observateur politique et chargé de cours Abdallah Goolamallee analyse l’affrontement entre Bruneau Laurette – Sherry Singh et Pravind Jugnauth. « Bruneau Laurette et Sherry Singh se sont officiellement lancés dans l’arène politique et c’est comme ça, la politique mauricienne », dit-il.
Le chargé de cours avance aussi que le fait que One Moris soit une force extraparlementaire semble davantage déranger le gouvernement. « Les partis émergeants extraparlementaires veulent faire la balance sur l’échiquier politique. On ne peut donc pas négliger la force que peut représenter One Moris », soutient-il.
Il ajoute, d’autre part, que Bruneau Laurette représenterait déjà une force sérieuse, compte tenu des manifestations qu’il a organisées dans les rues de Port-Louis. « Bruneau Laurette a également la cote au sein de la population générale et il n’a pas caché son intention de vouloir pêcher dans ce bassin électoral qui a été longtemps dominé par le MMM et le PMSD », commente-t-il.
Une menace pour le pouvoir
Quant à Sherry Singh, « n’oublions pas qu’il a eu l’occasion de participer à plusieurs élections et connaît le fonctionnement de lakwizin du MSM sur le bout des doigts. Il a souvent été adulé comme étant un bon stratège politique et représente donc une menace, qu’on le veuille ou non, pour le parti au pouvoir », estime Abdallah Goolamallee.
Pour sa part, Faizal Jeerooburkhan affirme que le gouvernement est actuellement en position de faiblesse, avec la situation de la fraude et de la corruption, le malaise social ainsi que la situation catastrophique de la drogue à Maurice. « C’est pour cela que le Premier ministre n’hésite jamais à tirer à boulets rouges sur ceux qui disent détenir des informations de nature perturbante sur lui et son gouvernement », observe ce membre du groupe de réflexion Think Mauritius.
Un autre élément qu’il met en avant est la force politique qu’incarne Bruneau Laurette. « Il a dans un premier temps démontré ses qualités de rassembleur. Mais il est passé à un niveau supérieur lorsqu’il a été arrêté et puis relâché. Il a dégagé énormément de sympathie au sein de l’opinion publique, sans compter qu’il a publiquement déclaré détenir des informations qui pourraient faire énormément de tort au Premier ministre et à ceux qui composent son entourage », fait-il observer.
Finalement, cette asso-ciation Bruneau Laurette-Sherry Singh peut faire très mal. « S’ils se mettent à synchroniser leurs actions, cela risque de faire très mal », conclut-il.
Reste que le gouvernement ne compte pas se laisser faire et peut compter sur le soutien de certaines institutions. Il est donc probable que dans les prochaines semaines, nous assistions à un combat encore plus intense entre le gouvernement et le duo Laurette-Singh.
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