Un avocat de Singapour, spécialiste des droits de l'homme et l'un des rares à défendre des condamnés à morts dans la cité-Etat, a été suspendu mardi pour cinq ans par un tribunal pour des allégations "sans fondement" visant le système judiciaire.
L'avocat, Ravi Madasamy connu sous le nom de M Ravi, avait déclaré en 2020 devant la Cour suprême à une publication en ligne que le ministère public s'était montré "trop zélé dans ses poursuites", après avoir obtenu en appel qu'un homme condamné pour trafic de drogue, Gobi Avedian, échappe à la peine capitale.
"Aucun avocat ne peut être autorisé à saper de manière irresponsable et sans fondement les piliers même du système judiciaire au sein duquel (...) il travaille", a estimé le tribunal dans sa décision. "Une telle action porterait gravement atteinte à la confiance du public dans la fonction judiciaire".
"L'inconduite de M Ravi démontre un manque fondamental de respect et un mépris flagrant de l'intégrité des principales institutions judiciaires de Singapour", a ajouté le tribunal.
Après sa victoire en appel pour Gobi Avedian en 2020, l'avocat, connu pour son franc-parler, avait également réclamé aux procureurs et au ministre de la Justice de s'excuser envers son client.
L'avocat avait également mis en cause la conduite des procureurs et menacé de poursuites le barreau de Singapour s'il ne s'engageait pas à protéger l'indépendance des avocats ou s'il participait à un quelconque "harcèlement" du procureur général à son encontre.
M Ravi avait déjà été suspendu pour une année en 2007 pour manque de respect envers un juge.
Mardi, l'avocat a déclaré sur Facebook qu'il était simplement heureux d'avoir pu sauver Gobi de la potence et qu'à propos de la décision le concernant, il s'en remettait "au tribunal et à l'opinion publique".
Phil Robertson, directeur adjoint de Human Rights Watch Asie, a condamné cette suspension: "Dans les démocraties du monde entier, les avocats doivent pouvoir s'exprimer sur l'issue d'un procès dans lequel ils ont été impliqués mais Singapour réprime une telle expression et sa société s'en trouve appauvrie".
Parmi ses clients, M Ravi avait défendu un Malaisien handicapé mental, Nagaenthran K. Dharmalingam, dont l'exécution en avril 2022 pour trafic de drogue a suscité une tempête de critiques internationales.
© Agence France-Presse
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