Interview

Shakeel Mohamed : «Le renouvellement ne concerne pas les hommes mais les idées»

Son « projet de société » pour réinventer le Parti travailliste (Ptr), Shakeel Mohamed ne le lâche pas. Malgré les remontrances de certains lors de la réunion du bureau politique de vendredi dernier. Il met les points sur les « i ».

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Vos coups de gueule ne passent pas inaperçus. Mais qu’est-ce qui vous a autant horripilé au point de vouloir démissionner du bureau politique?
J’ai l’impression qu’avoir des idées différentes et en débattre cela dérange certains politiciens, ou observateurs politiques. Cela choque que quelqu’un vienne proposer ses idées et veuille en débattre. C’est triste! Tout parti qui se respecte a besoin de prendre du recul, de se remettre en question et se revigorer. Venir avec des solutions vraies et pratiques. Vraies dans le sens où le peuple a tellement été berné qu’il en a marre! Il y a un problème de confiance dans l’ensemble de la classe politique. Mais il y a ceux qui se braquent contre les changements qui pour eux ne se résument qu’à « tu veux changer de leader ? ». Ils ne comprennent pas que ce n’est même pas une question de leadership, ni même de membre de l’exécutif. Le renouvellement ne concerne pas les hommes ou les femmes politiques, le plus important, ce sont les idées.

Si on en revenait au point de la discorde?
La discorde n’a jamais été le leadership et j’ai dû clarifier ce point pour ceux qui ne comprennent pas. Car si cela avait été le cas, je l’aurais dit sans hésitation. Ma démarche c’est de provoquer un débat, non pas seulement au sein du parti, mais sur le plan national. Parmi les idées que je défends, la moralisation de la vie publique. Je ne veux plus que, parce que je suis un élu, mes proches soient placés dans des organismes parapublics. Je veux que de telles pratiques soient déclarées illégales.

Ce qui nous ramène à la question de leadership. La vieille garde ne voit pas la nécessité de changer...
Ce n’est pas vrai! Pourquoi je me suis permis de faire une sortie récemment contre la Voice of Hindu? Tout simplement parce que Navin Ramgoolam et moi, nous sommes sur la même longueur d’onde sur la question des organisations socioculturelles. La raison pour laquelle il y a de tels mouvements, c’est parce que les politiciens les tolèrent. Mais le problème est même beaucoup plus profond à Maurice: les politiciens corrompent la population et la population corrompt les politiciens. Il faut une loi pour promouvoir la moralisation de la vie publique et la méritocratie. C’est ça le débat au sein du Ptr aujourd’hui. C’est faux de dire qu’il y dissension sur la question de leadership. Dieu merci qu’il y a divergence d’opinions en ce qui concerne le projet de société!  Des étincelles, il y en aura encore. Mais l’objectif principal est de présenter un projet révolutionnaire qui viendra remettre en question les 50 dernières années.

Justement avec ce qui se passe sur le plan international, le talk of the town c’est le renouveau, le renouvellement de la classe politique. Qu’en pensez-vous?
Premièrement, il faut avoir une adhésion populaire. On constate une fracture dans le pays aujourd’hui entre ceux qui connaissent l’île Maurice pré-indépendante et les plus jeunes qui composent les 40 % d’indécis. Il faut donc réconcilier ces deux groupes pour pouvoir apporter des changements en profondeur. Pour la classe politique, ce n’est pas une question d’âge, mais de pouvoir s’adapter aux nouvelles données.

Vous lancez bruyamment vos idées. Et si au final, rien n’est retenu?
Ce n’est pas possible. Il y a, en fait, un consensus élargi au sein du parti sur la nécessité de se redynamiser et d’être un parti politique différent à la veille du 50e anniversaire de l’indépendance du pays.

Est-ce que ce ne sera pas difficile de se réinventer avec Navin Ramgoolam à la tête du Ptr?
Au contraire. Il facilite les choses. Car c’est quelqu’un qui est à l’écoute. Il observe, il s’interroge sur la tendance, il rencontre beaucoup de personnalités, il s’intéresse à tout ce qui se dit et se passe ailleurs... Bref, c’est beaucoup plus facile de changer les choses avec lui parce qu’il a un vécu et surtout qu’il est condamné à bien faire.

Ce n’est tout de même pas une invention que son leadership reste controversé au sein même du parti?
Certes, mais il ne s’agit pas de notre opinion. Ce qui compte c’est: qui est la personne qui peut ramener ensemble tous les courants? Et c’est pour cela que je dis qu’avec Navin c’est plus facile car il est à l’aise avec les jeunes autant qu’avec les moins jeunes.

 

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