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SC en poche: le sacré combat de deux frères handicapés

Ils ont choisi de vaincre l’adversité en se donnant les mêmes chances que les autres jeunes de leur âge de réussir dans la vie. Alvyn et Vick Coopamah-Annavee ont réussi avec brio le School Certificate, tout en restant à la maison. Un véritable tour de force pour ces deux frères qui sont nés avec un handicap. Où le combat est grand, la gloire l’est aussi, dixit le poète Honorat de Bueil de Racan. La famille Coopamah-Annavee l’a bien compris et ne s’est épargnée aucune peine pour que deux des leurs, handicapés de naissance, aient les mêmes chances de briller que les autres enfants dits « normaux ». Et ce, malgré les coups durs infligés par la vie ! Vega et Ganessen Coopamah-Annavee deviennent, il y a 17 ans de cela, les heureux parents de quadruplés. Premier coup du sort, un des bébés ne survivra pas. Quand, à l’âge d’un an, la seule fille des triplés, Ayushee, commence à faire ses premiers pas, la maman, réalise que ses deux garçons ont un problème. « C’est là que nous avons réalisé qu’Alvyn et Vick étaient handicapés. Le premier choc passé, je me suis reprise et j’ai accepté cette réalité », nous confie Vega, visiblement très émue. Elle se fait alors la promesse que ses deux fils seront traités normalement et qu’il n’est pas question de s’apitoyer sur leur sort. « Mais j’ai bien vite déchanté car c’était plus facilement dit que fait. Les gens n’ont pas de considération pour les enfants autrement capables. Même l’État ne considère pas ces êtres comme égaux », déplore-t-elle, ajoutant qu’il n’a pas été facile pour elle de trouver une école pour Alvyn, qui est en fauteuil roulant, et Vick qui a un handicap moteur. Ce dernier et sa sœur fréquenteront l’école primaire de Raoul Rivet, à Port-Louis, alors qu’Alvyn est admis à celle de Gros Cailloux. « C’était un vrai parcours du combattant. Le ministère ne m’a été d’aucun soutien. On m’a dit que je devrais employer quelqu’un à plein-temps, qui restera à l’école toute la journée au cas où Alvyn aurait besoin de se déplacer pour aller aux toilettes, etc », nous confie Vega.

Un bon samaritain

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/div> Heureusement, un enseignant, Salim Beebeejaun, se proposera de l’aider et prend la responsabilité d’Alvyn au sein de l’établissement scolaire. Dans le cas de Vick, le problème ne s’est pas réellement posé car il pouvait se déplacer, même avec difficulté, et ne dépendait de personne. Après les examens du Certificate of Primary Education (CPE), une autre bataille attendait Vega et les siens. Vick est admis au Saint Mary’s West, alors qu’Alvyn a pu l’être, après maintes démarches, au collège d’Ébene Boys. Après la Form III, Vega décide de faire une requête au ministère que ses fils puissent opter pour uniquement cinq matières « pour des raisons évidentes », lance-t-elle. « C’était évident qu’ils n’allaient pas pouvoir étudier le nombre de matières que requiert le School Certificate (SC). Mais là encore, on n’a pas tenu compte de mes sollicitations. J’ai beau expliquer mon cas, mais peine perdue. J’étais révoltée et effondrée en même temps », raconte la mère courage. Toutefois, il est hors de question de baisser les bras ! Elle décide, avec le soutien de Ganessen et de ses parents – Dassen et Mani –, de trouver des enseignants privés pour que les garçons puissent poursuivre leur scolarité… à la maison ! « Comme tout parent, j’ai aussi des rêves pour mes enfants. Il n’était même pas envisageable de les faire arrêter l’école », martèle Vega. Trois ans durant, Alvyn et Vick sont suivis rigoureusement par deux enseignants et, aujourd’hui, le résultat est à la hauteur des espérances de Vega et Ganessen. « Je suis très fière de mes fils. Je n’ai aucun regret d’avoir fait des sacrifices qui, au départ, me paraissaient énormes. S’il fallait refaire le même parcours, je le ferais sans hésitation », affirme la maman des triplés.

Le regard qui blesse

Alvyn a décroché un A en comptabilité ; B en Business Studies ; C en français et maths et un D en anglais. Vick a, lui, obtenu un A en français ; B en comptabilité ; D en anglais et E en Business et Maths. Le premier nommé aspire à devenir le « meilleur comptable du pays ». Il compte, pour cela, poursuivre ses études et prendre part aux examens du Higher School Cerficicate (HSC). Vick veut suivre les pas de son frère. Alvyn confie que le regard des gens le blesse et le fait réaliser qu’il n’est pas comme les autres. « On nous dévisage comme si nous étions des bêtes de foire. Je suis triste de n’avoir pas eu le même parcours que les autres enfants. Par exemple, je n’ai jamais pu participer à une sortie scolaire, aller à un pique-nique ou à la plage avec des amis », nous dit-il. D’ailleurs, les deux frères n’ont pas vraiment d’amis. « Nous sommes confinés à la maison pour des raisons évidentes. On ne peut faire des sorties en famille comme les autres », ajoute l’adolescent tristement. Mais qu’à cela ne tienne, Alvyn passe son temps à « voyager » à travers son ordinateur. Il prend des cours de gestion et de design en ligne. Cela lui permet d’avoir une ouverture sur le monde extérieur et il passe son temps à discuter avec d’autres internautes.

Les trois mousquetaires

Les deux frères sont soutenus dans leur quête du savoir par leur sœur, Ayushee, leur benjamine d’une minute. Elle est, selon Vega et Mani « la sœur, la mère, la camarade et la confidente, bref leur bras droit ». « Elle s’occupe beaucoup de ses frères. Ils sont toujours en train de la solliciter pour de l’aide. Ils sont comme les trois mousquetaires », souligne Mani, la grand-mère maternelle. Pour Ayushee, ses deux frères sont des êtres « normaux, intelligents, vifs et qui méritent d’avoir leur chance ». Aujourd’hui, en voyant le succès de ses deux enfants, Vega ne peut s’empêcher d’avoir une pensée pour les parents qui, comme elle, ont des enfants qui nécessitent des soins spéciaux. « Je ne comprends pas pourquoi l’État ne peut prendre en charge ces enfants. Dans mon cas, j’ai galéré et je n’ai pas baissé les bras. Je n’avais pas de gros moyens, mais avec le peu que j’avais, je l’ai investi à améliorer le quotidien de mes enfants. Il y a des familles qui n’ont pas cette chance », soutient Vega. Elle lance un pressant appel au gouvernement pour qu’il mette en place des structures appropriées pouvant accueillir des enfants avec de tels handicap. « Ce n’est pas parce qu’un enfant est handicapé qu’il doit être privé de ses droits. C’est un citoyen mauricien à part entière et l’État doit le reconnaître en tant que tel », conclut Vega.
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