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L'ancien président français Nicolas Sarkozy doit être incarcéré mardi à Paris, une première pour un ex-chef d'Etat français et européen, après sa condamnation à cinq ans de prison pour "association de malfaiteurs" dans l'affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle.
Les avocats de Nicolas Sarkozy, 70 ans, devraient déposer une demande de mise en liberté de leur client - qui a fait appel du jugement - dès qu'il sera derrière les barreaux de la prison de la Santé.
Il sera vraisemblablement installé dans une des 15 cellules de 9 m2 du quartier d'isolement, selon des agents pénitentiaires connaissant bien la seule prison située à Paris. Ce choix éviterait à Nicolas Sarkozy les interactions avec les autres détenus pour assurer sa sécurité et éviter toute photographie avec un des portables qui circulent sans autorisation.
L'ex-chef de l'Etat a été reconnu coupable le 25 septembre d'avoir laissé ses deux plus proches collaborateurs au ministère de l'Intérieur entamer des pourparlers à Tripoli, en vue d'un financement occulte de sa campagne présidentielle de 2007 par la Libye de Mouammar Kadhafi, qui ne s'est toutefois pas matérialisé, selon la justice.
En cause, des réunions fin 2005 de Claude Guéant et Brice Hortefeux avec Abdallah Senoussi, beau-frère du dictateur libyen, sous le coup d'une condamnation à perpétuité en France pour l'attentat contre un DC-10 d'UTA en 1989, dans lequel 170 personnes, dont 54 Français, ont trouvé la mort au-dessus du désert du Ténéré (Niger).
Des proches des victimes s'étaient constitués partie civile, car la visite controversée de Mouammar Kadhafi (renversé et tué en 2011) à Paris en décembre 2007, comme la promesse d'une levée du mandat d'arrêt visant Abdallah Senoussi, étaient selon l'accusation des contreparties au financement libyen de la campagne présidentielle.
"Normal"
L'ancien président (2007-2012) a été reçu vendredi à l'Elysée par Emmanuel Macron, qui a jugé cette entrevue "normale", "sur le plan humain".
"J'ai eu des propos publics toujours très clairs sur l'indépendance de l'autorité judiciaire dans le rôle qui est le mien", a affirmé le président français. "Mais il était normal que sur le plan humain, je reçoive un de mes prédécesseurs, dans ce contexte".
Nicolas Sarkozy avait déclaré fin septembre qu'il n'espérait "en aucun cas" être gracié. La grâce présidentielle ne s'applique qu'à une condamnation définitive et exécutoire.
Le ministre français de la Justice Gérald Darmanin, un proche de l'ancien dirigeant, a assuré qu'il irait le "voir en prison", s'inquiétant des "conditions de sécurité" lors de sa détention. Un choix dénoncé par les syndicats de magistrats, qui pointent une "confusion des rôles".
L'ancien chef de l'Etat nie tout projet de financement libyen de sa campagne et s'est comparé aux condamnés innocents les plus célèbres de l'histoire et de la littérature française, Alfred Dreyfus et Edmond Dantès, comte de Monte-Cristo.
Son fils, Louis, a appelé chacun à "venir exprimer son soutien à Nicolas Sarkozy" mardi près du domicile de l'ancien chef de l'Etat.
Régime d'isolement
Les juges avaient invoqué l'"exceptionnelle gravité des faits" pour assortir sa condamnation d'un mandat de dépôt, sans attendre le procès en appel qui devrait se tenir avant l'été.
Si le tribunal a reconnu qu'il n'avait pas été établi que des fonds étaient "in fine" arrivés dans les caisses de campagne, l'enquête a mis au jour des mouvements financiers depuis la Libye "dans le but de (la) financer".
"La haine n'a donc décidément aucune limite (...) J'assumerai mes responsabilités (...) et s'ils veulent absolument que je dorme en prison, je dormirai en prison, mais la tête haute", avait cinglé Nicolas Sarkozy après le verdict.
De leur côté, les associations de lutte contre la corruption Sherpa, Transparency International et Anticor, parties civiles au procès, avaient salué un "jugement historique" qui "envoie un signal fort contre l'impunité".
La cour d'appel aura deux mois pour examiner la demande de mise en liberté de Nicolas Sarkozy, mais l'audience devrait intervenir plus rapidement.
Le trouble à l'ordre public causé par l'"exceptionnelle gravité des faits", est un critère prévu pour un mandat de dépôt accompagnant une condamnation. Mais ce n'est plus le cas pour une demande de mise en liberté après un appel, qui remet le prévenu dans la situation d'un innocent présumé.
En attendant une éventuelle libération, Nicolas Sarkozy va être confronté à la solitude. Le régime d'isolement prévoit une promenade par jour, seul, dans une courette de quelques mètres carrés. Il aura accès selon un planning établi à une des trois petites salles de sport du quartier pénitentiaire ou à la pièce qui fait office de bibliothèque.
AFP

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