Actualités

Santé : un électrochoc nécessaire

Le service est en bonne santé malgré ses imperfections, laisse entendre un médecin.

Le secteur de la santé a besoin d’un électrochoc et d’un sérieux coup de fouet pour espérer répondre aux attentes de la population. La construction de nouvelles infrastructures est considérée comme des mesures palliatives, voire esthétiques, mais il y a beaucoup de problèmes en profondeur auxquels il faut s’attaquer.

Publicité

Le système de santé publique doit se réinventer pour mieux répondre aux attentes de la population. Tel est l’avis que partagent divers professionnels de la santé. Ils vont encore plus loin en préconisant un électrochoc. Selon eux, des changements en profondeur sont requis pour que les divers services subissent une nette amélioration. 

« Un électrochoc est nécessaire », déclare sans ambages Bhooshun Ramtohul, président de la Government Medical Consultant in Charge Association (GMCCA). Pour lui, il faut commencer par l’accueil des patients et également à l’amélioration des infrastructures. « Le personnel en a marre de travailler dans des vieux bâtiments et dans des infrastructures inadaptées », explique-t-il. 

Bhooshun Ramtohul cite en exemple l’hôpital SSRN de Pamplemousses qui date de 1968. « Le nombre de salles et de lits est resté le même, alors que la population a augmenté ainsi que les accidents de la route ! » déplore-t-il. Il faut un nouvel hôpital moderne comme celui de Jeetoo dans le Nord.

Amarjeet Seetohul, président de la Ministry of Health Employees Union (MHEU), et le Dr Vinesh Sewsurn, président de la Medical and Health Officers Association (MHOA) plaident aussi pour un meilleur entretien des infrastructures et des équipements. 

Selon Amarjeet Seetohul, il y a un gros manquement en ce qu’il s’agit du Health and Safety dans les différents centres de santé du service public et c’est pourquoi les membres du personnel soignant et les patients évoluent dans un environnement qui n’est pas tout à fait sain. Il affirme qu’il n’y a aucune provision pour assurer une plus grande propreté dans les centres de santé en général. « Il faut des superviseurs pour s’assurer que le travail est fait. Un hôpital ne peut pas être nettoyé de la même façon qu’une maison », fait-il comprendre. 

Protocole spécifique

Le président du MHEU souligne également le fait qu’un hôpital, étant un lieu hautement à risques en matière d’infections, il est nécessaire de mettre en place un protocole spécifique pour assurer une plus grande hygiène. « Le personnel doit être formé et disposer des équipements nécessaires pour s’acquitter plus efficacement de leur travail. Il ne faut pas faire de compromis dans ce domaine », dit-il. Le Dr Sewsurn abonde dans le même sens. « Il est impératif de faire un grand nettoyage régulièrement, car ce sont des lieux qui doivent être aseptisés », ajoute-t-il.

« Le service de la santé est sens dessus dessous. Il faut un grand coup de balai pour remettre les choses en place », affirme Ram Nowzadick, président de la Nursing Association (NA). Selon lui, toutes les mesures qui sont prises ne sont qu’esthétiques comme la construction de nouveaux bâtiments « alors que le système de la santé demande une refonte de fond en comble et il faut aussi recruter plus de personnel », fait-il ressortir. 

Selon le président de la NA, le ministère de la Santé se contente de prendre des mesures palliatives alors qu’il faut mettre de l’ordre dans les hôpitaux régionaux afin qu’ils puissent offrir un service plus efficient. Il préconise la création d’autres centres de santé primaires comme des médicliniques. « Les membres du public doivent comprendre qu’ils doivent d’abord se rendre dans un centre de santé primaire qui va les référer à l’hôpital si nécessaire », ajoute-t-il. Selon lui, « cette mesure va soulager les hôpitaux régionaux où il y aura moins de patients, donc moins d’attente. De son côté, le personnel disposera de plus de temps pour s’occuper des patients », affirme Ram Nowzadick.

Éducation de la population

Le Dr Sewsurn abonde dans le même sens. Il plaide également pour l’éducation de la population afin qu’elle puisse faire la distinction entre un problème de santé majeur et celui qui peut être traité dans un dispensaire. Pour cela, les centres de santé primaire doivent être mieux équipés et avoir les mêmes médicaments que les hôpitaux régionaux. 

Le Dr Sewsurn suggère ainsi une évolution dans le système de santé public. « Le service de santé public n’a pas besoin de changements drastiques, mais d’une évolution, car on n’arrive pas à évoluer avec le temps », dit-il. Selon lui, le diagnostic et le traitement des patients ne suivent pas les nouvelles tendances. Qui plus est, certaines analyses de laboratoire ne sont pas disponibles à Maurice, ce qui fait que les échantillons doivent être envoyés à l’étranger. Nasser Essa, président de la Nurses Union (NU), ainsi que le président de la NA ajoutent qu’il faut aussi une meilleure organisation et coordination pour améliorer le système de santé. À ce titre, un électrochoc est nécessaire pour arriver à ce résultat.


Simplification des procédures

Les procédures administratives pour les appels d’offres pour les différents projets du ministère ainsi que pour l’achat des médicaments sont trop lourdes. Il faut les simplifier. C’est ce que fait comprendre Nasser Essa de la Nurses Union. Comme exemple, il cite le manque fréquent de médicaments ou encore le retard concernant l’aboutissement de l’hôpital pour le traitement des patients atteints de cancer. 

L’E-Health en souffrance

Le projet de E-Health va permettre de résoudre bien des maux. C’est ce qu’estiment nos différents interlocuteurs. À travers ce système, il y aura une meilleure gestion des dossiers médicaux des patients et un meilleur contrôle des médicaments. Selon Nasser Essa et Amarjeet Seetohul, il sera plus facile de retracer les antécédents des patients. Une onde de choc est requise pour certains départements afin que le personnel ne manque pas d’équipements (gants, médicaments et autres) pour la bonne marche de leur travail. Pour Nasser Essa, il y a un manque de prévoyance dans la gestion du stock. Il plaide aussi pour un meilleur entretien des équipements afin de prévenir les pannes. 

La super-spécialisation plébiscitée

Le service de santé publique fait face à un manque de personnel et il est nécessaire de régler ce problème, estiment Ram Nowzadick, le Dr Bhooshun Ramtohul et Vinesh Sewsurn. Selon le président de la NA, le recrutement de 2 000 infirmiers est nécessaire en raison de la diversification des services qui s’est opérée au fil des années. Le service de santé public souffre aussi d’un manque de médecins, mais aussi de spécialistes dans des domaines particuliers, dont l’endocrinologie, l’oncologie, la gynécologie et la néphrologie, entre autres. Le ministère devrait encourager les médecins à se spécialiser et à se perfectionner dans les domaines qui souffrent d’une grande carence en leur accordant des bourses, explique le Dr Ramtohul qui plaide aussi pour « un service de super-spécialisation. »


Hausse du nombre de lits

Le manque de lits dans les salles pour admettre les nouveaux patients est un problème auquel le ministère de la Santé devrait s’attaquer, estime Ram Nowzadick. Ce dernier considère qu’il est « inadmissible » que des patients poireautent de longues heures dans les salles d’attente avant d’être admis à l’hôpital. Comme le fait remarquer le Dr Bhooshun Ramtohul, le nombre de lits à l’hôpital SSRN n’a pas augmenté depuis 1968, alors que la population ne cesse de croître. Le problème de manque de place est fréquent dans pratiquement tous les hôpitaux, car le nombre d’admissions a augmenté de manière générale, selon le Dr Sewsurn. Il en est de même en ce qu’il s’agit du nombre de fréquentations dans les centres de santé publics. Ce qui témoigne, selon le président du MHOA, de la « bonne santé » du service, en dépit de ses imperfections. « La population fait davantage confiance au service public », affirme-t-il. Le Dr Sewsurn préconise, néanmoins, une décentralisation des services avec des spécialistes postés dans les centres de santé primaire. Nasser Essa souhaite, pour sa part, un agrandissement des hôpitaux, car avec la diversification des services, les places pour les admissions sont devenues de plus en plus difficiles.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !