Évoqué depuis plusieurs années déjà, le concept de médecin de famille semble avoir du mal à être mis sur pied. Couplé avec la décentralisation des services de santé publique, ce concept devrait aider à décongestionner les hôpitaux. Il faudrait pour cela régler toutes les complexités de ce système au préalable, selon nos différents interlocuteurs.
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Le concept de médecin de famille a maintes fois été évoqué sous divers gouvernements, mais il peine encore à se concrétiser. « C’est un concept complexe. Ce n’est pas aussi simple de l’implémenter, d’autant plus que ce ne sera pas dans un système vierge. Il faudra travailler avec les structures déjà en place et le personnel existant », a expliqué une source au ministère de la Santé. Ainsi, ce n’est peut-être pas demain la veille que le projet pourra se concrétiser, fait-il comprendre. Cela d’autant que Maurice est un petit pays et que les patients ont le loisir de consulter un médecin dans n’importe quel centre de santé.
Service de santé primaire vs hôpitaux régionaux
Et alors que le ministère de la Santé investit massivement dans la décentralisation pour un service de santé de proximité, bon nombre de patients vont directement à l’hôpital pour des traitements basiques, alors qu’ils pourraient se rendre à la médiclinique la plus proche de leur domicile ou encore à l’Area Health Centre (AHC) ou au Community Health Centre (CHC) de leur localité.
Selon les informations que nous avons pu recueillir, 80 % des cas traités dans les hôpitaux régionaux sont des cas médicaux non urgents. Nos différentes sources indiquent également que seulement 30 % des patients fréquentent les centres de santé primaire, les autres se rendant à l’hôpital, ce qui explique la congestion fréquente.
Pour nos différents interlocuteurs, le concept de médecin de famille est louable et fonctionne très bien dans de nombreux pays européens par exemple. Un médecin du service privé et un autre du service public affirment ainsi qu’il est impensable dans ces pays que les patients aillent directement à l’hôpital sans avoir été référés par un médecin généraliste.
Le médecin du privé explique que le médecin de famille est plus à même de connaître l’historique médical de ses patients et peut lui éviter de faire des examens médicaux « superflus » avec un spécialiste. Le médecin de famille peut aussi être sollicité n’importe quand, souligne-t-il. Il note, cependant, une certaine « réticence » de la part de certains professionnels de la santé pour que le projet soit implémenté. « Il y a de nombreuses implications qu’il faudrait résoudre au préalable », explique-t-il, sans vouloir entrer dans les détails.
Pour le médecin du service public, c’est toute une éducation de la population qui doit être effectuée afin que les patients se dirigent d’abord vers les services de santé primaires avant d’aller vers les hôpitaux régionaux. Il affirme ainsi que la mise en œuvre du concept de médecin de famille, couplé avec la décentralisation des services de santé, pourrait aider à décongestionner les hôpitaux régionaux. « La décentralisation des services de santé a permis de démocratiser l’accès aux médecins spécialistes », dit-il. Mais là encore, tous les patients doivent passer par un médecin généraliste, souligne notre interlocuteur.
Si le médecin du privé est d’avis qu’il y a suffisamment de médecins pour lancer le concept de médecin de famille, le Dr Dawood Oaris, président de l’association des cliniques privées, considère, pour sa part, qu’il y a une « pénurie » de médecins sur le marché. Il en est de même pour les infirmiers et les médecins spécialistes, affirme-t-il. Notre interlocuteur estime qu’il faudrait avant tout pouvoir recruter davantage de médecins et mieux équiper les services de santé primaire avant de se lancer dans ce projet.
La Government Medical Consultant in Charge Association est, de son côté, d’avis que le concept de médecin de famille est « une bonne proposition », mais considère qu’il y a un manque de personnel pour sa mise en œuvre. Selon l’association, le projet est ambitieux, mais rien n’est fait pour sa faisabilité. « La question la plus importante est le recrutement du personnel médical et paramédical », souligne-t-on.
Rôle essentiel
Les médecins de famille, également appelés généralistes, sont essentiels pour améliorer la santé de la population et offrir des soins de santé personnalisés, complets et continus aux patients, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’organisme onusien souligne également que le rôle de nombreux médecins de famille dépasse la simple prise en charge des patients. « L’éducation et les interactions directes avec les communautés locales sont cruciales pour la prévention des maladies », fait ressortir l’OMS.
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