Interview

Sanjeev Teeluckdharry : «Je ne vais pas changer de camp»

Sanjeev Teeluckdharry

Il prend les Casernes centrales et la Prison centrale à témoin pour prouver que toutes ses visites en prison étaient sollicitées. Me Sanjeev Teeluckdharry, ciblé par la Commission Paul Lam Shang Leen, estime qu’il suffit aux policiers d’enquêter sur lui pour voir qu’il n’a rien à se reprocher. Devenu simple député MSM, il dément les rumeurs d’une rencontre avec Navin Ramgoolam.

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Expliquez-nous dans quelles circonstances un avocat peut rendre visite à son client ?
La Commission a des difficultés à comprendre les avocats qui exercent au pénal. On leur reproche de rendre visite à des personnes condamnées pour trafic de drogue et dont l’appel a été rejeté. C’est absurde. La prison n’est pas un goulag.  Prenez les cas de review of sentencing au vu de l’évolution de la jurisprudence :

1. L’affaire Philibert v. The State en 2010 - qui précise que l’imposition de mandatory sentence de 45 ans est anticonstitutionnelle. Après cette affaire, beaucoup de condamnés à 45 ans de prison ont voulu contester leur sanction. Ils ont sollicité plusieurs avocats pour demander conseil comment réduire leur peine.

2. L’affaire Dookee v. The State en 2012. Cette affaire dans laquelle j’ai paru aux assises présidées par le juge Paul Lam Shang Leen en 2007 et que j’ai perdue. J’ai plaidé l’appel devant le Conseil privé en 2011 contre la sentence, le JCPC a statué que quand un prisonnier a passé du temps on remand, « such period on remand should be discounted from the sentence ». L’affaire Dookee fut très médiatisée – j’ai reçu beaucoup de lettres de prisonniers qui réclamaient une review of sentence. Dans ces circonstances, il est tout à fait logique pour un prisonnier de faire appel à un avocat et que ce dernier rende visite à un prisonnier qui sollicite son conseil.

La Commission a fait mention de «  unsolicited visits ». Qu’est-ce que vous avez à dire ?
Toutes les personnes que j’ai visitées m’ont sollicité. Que ce soit personnellement à travers des lettres envoyées de la prison, à travers les appels par des Welfare Officers de la prison ou par le biais de leurs proches. Les records de la prison sont en leur possession, parmi il y a des registres concernant les correspondances des prisonniers à des avocats.

La commission vous a épinglé pour des "unsolicited visits » alors que d’autres, dans le même cas, n’ont pas eu la même conclusion. Vous en pensez quoi ?
Paul Lam Shang Leen a ignoré mon explication - il a fait abstraction de la jurisprudence, parmi l’affaire Dookee que j’ai plaidée avec succès quand les Law Lords du Conseil pPrivé sont venus à Maurice en mars 2012. J’ai dû croiser le fer avec un brillant avocat, le DPP lui-même. Le jugement établit le principe que la cour au moment de la condamnation d’un accusé doit mathématiquement déduire le temps que l’accusé a passé on remand dans le cas où il n’a pas obtenu de caution. C’est tout à fait normal pour des prisonniers qui se sentent lésés de m’écrire des lettres pour me demander conseil pour faire une review de leur sentence. D’ailleurs, il y a des preuves aux Casernes centrales et à la Prison centrale des demandes de visite aux prisonniers adressées à moi.

Et les appels téléphoniques de la prison ?
La Commission m’a demandé des éclaircissements concernant six appels provenant de la prison, et pour lesquels il n’y a aucun moyen pour moi d’en savoir la provenance. Notez qu’aucun prisonnier n’est supposé avoir ni téléphone ni Sim card. Normalement, si je reçois un appel de la prison, on me dit toujours : « Moi XXX Welfare Officer de la prison, Maître, je vous téléphone de la part de votre client Mons XXX qui veut vous dire deux mots. » C’est donc très difficile de savoir si c’est un appel officiel ou non et si c’est un véritable Welfare Officer ou si c’est un imposteur. La Commission m’a convoqué pour des éclaircissements concernant six appels étalés sur un an provenant de la prison. Impossible pour moi de savoir la provenance de ces appels

Parlez-nous de votre client Peroomal Veeren. Depuis quand le connaissez-vous ? Comment êtes-vous devenu son avocat ?
Je le connais depuis longtemps – toute autre information est priviledged. Mais d’après les documents du domaine public, par exemple les Court Records des cours de Curepipe, de Rose-Hill et de la Cour intermédiaire, vous verrez que j’ai été son avocat dans ces affaires qui ne sont pas toutes liées à la drogue, parmi il y a le recel, larceny, assaulting prison officer...

J’ai toujours agi avec intégrité et professionnalisme et dans les paramètres de la loi»

Vous avez connu une ascension comme avocat et comme politicien. Venons-en au code d’éthique. Opérez-vous dans les paramètres du droit ?
Bien sûr. J’ai toujours agi avec intégrité et professionnalisme et dans les paramètres de la loi. J’ai connu une ascension fulgurante comme Defence Counsel in high profile cases grâce à ma persévérance, mon assiduité au travail et au soutien indéfectible de ma femme, Namrata, et de mes proches. Et en politique également, j’ai eu du succès. Aux dernières élections, j’ai devancé l’ancien PM dans son fief par plus de 3 000 voix après seulement trois semaines de campagne électorale.

Dans le passé, vous avez eu quelques démêlés avec le Bar Council pour non-respect du code d’éthique, notamment dans l’affaire Michaela Harte et votre déclaration contre le DPP dans l’affaire Gooljaury. Où en sont les choses ?
L’affaire Michaela Harte est sans doute le procès aux assises le plus long et le plus médiatisé par la presse internationale. Cela a sans doute attisé beaucoup de jalousie…  En tant qu’avocat, j’ai paru dans pas mal de high profile cases ces 18 dernières années. Le reste est derrière nous.

Pourquoi avez-vous démissionné de votre poste de Deputy Speaker?
On a tellement terni mon image qu’il m’était difficile, dans ces circonstances, de présider les travaux parlementaires à l’Assemblée. Ce poste doit rester above all suspicion. Paul Lam Shang Leen a fait ressortir à plusieurs reprises que je ne suis accusé de rien. La Commission m’a convoqué pour des éclaircissements sur six appels de la prison. Impossible pour moi de savoir qui m’appelle de la prison.

Pourquoi demeurer député alors ?
Si je m’absente du Parlement plus qu’il n’en faut, selon les Standing Orders, mon poste devient automatiquement vacant. Pour le moment, je ne suis pas disqualifié et je reste député. Quant à mes absences de ces derniers temps, c’était pour réorganiser mon travail d’avocat. Après on verra.

On dit que vous avez approché les Travailistes…
Je ne vais pas changer de camp. Je n’ai pas rencontré Navin Ramgoolam.

Pourquoi avez-vous abandonné l’idée d’une révision judiciaire ?
C’est mon plan B et je dispose de trois mois pour le faire. Pour l’instant, je demande à ceux qui ont jeté de la boue et ceux qui ont fait de fausses allégations de venir prouver leurs dires.

Que répondrez-vous aux enquêteurs, si jamais il y a une enquête sur vous ?
Les enquêteurs auront la tâche facile, car mes explications à la commission sont suffisamment claires, nettes, précises et soutenues par des Court Records où j’ai représenté ces prisonniers devant les prétoires — la plupart avaient retenu mes services et pour quelques-uns, la cour m’avait commis d’office pour les représenter gratuitement - in forma pauperis dans le scheme de la Legal Aid.

 

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