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Sanjay Subron, expert en réseaux : «Des tactiques à la ‘Missie Moustass’ seront utilisées à l’avenir»

Sanjay Subron parle du passé, du présent et de l’avenir du secteur des technologies de l’information et de l’importance de l’intelligence artificielle. Cet expert en réseaux revient également sur l’un des faits marquants de 2024 : les « Missie Moustass Leaks ». 

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La valeur ajoutée du secteur des TIC à Maurice a augmenté de 8,4 % en termes nominaux, passant de Rs 29,55 milliards en 2022 à Rs 32,03 milliards en 2023. Comment évaluez-vous l’évolution des TIC et des secteurs connexes à Maurice ?
Le secteur des TIC contribue à hauteur d’environ 5 % à 6 % au produit intérieur brut (PIB) de Maurice, son influence s’étendant à diverses industries, notamment les services financiers et la Fintech, l’e-Government et les services publics, ainsi que le tourisme et l’hôtellerie. Alors que les progrès mondiaux en matière d’intelligence artificielle (IA), de Cloud Computing et de cybersécurité s’accélèrent, Maurice peut tirer parti de sa stabilité politique et de son solide cadre réglementaire pour s’imposer au-delà d’un simple leader régional en Afrique. 

Positionner les TIC comme un pilier clé de la croissance économique, à l’instar de ce que nous avons fait avec l’industrie textile, nécessite une base solide, contrairement à d’autres secteurs. Il s’agit notamment de réformer le système éducatif en proposant un programme d’études tourné vers l’avenir et adapté aux futures exigences de l’économie numérique.

Le ministère des Technologies de l’information, de la communication et de l’innovation travaille à l’élaboration d’un plan global pour le secteur pour les cinq prochaines années à Maurice. Quels sont, selon vous, les éléments essentiels de ce plan ?
Il est clair que le plan devra prendre en compte l’évolution rapide du paysage numérique. Des éléments tels que la cybersécurité et la mise en œuvre de l’IA seront des facteurs clés. Le ministère met l’accent sur la formation d’une main-d’œuvre qualifiée, en particulier pour permettre à Maurice de devenir un centre régional de l’IA. C’est une excellente initiative.

Cependant, nous avons besoin des ressources et infrastructures nécessaires pour maintenir notre position dominante dans la région. Cela commence par une population bien formée dans le domaine concerné afin de minimiser autant que possible la dépendance à l’égard de l’expertise étrangère. La promotion de la culture numérique parmi la jeune génération leur permettra de se préparer à la nouvelle ère numérique.

À cet égard, j’ai introduit l’école iCode à Maurice depuis 2019, afin d’aider la jeune génération à se préparer à ce qui sera un besoin critique pour que Maurice atteigne son objectif en matière de TIC.

Positionner les TIC comme un pilier clé de la croissance économique nécessite une base solide contrairement à d’autres secteurs.»

La loi sur la protection des données et la loi sur la cybersécurité et la cybercriminalité de 2021 peuvent-elles relever les défis complexes posés par les technologies émergentes comme l’IA ?
L’essor de l’IA présente à la fois des opportunités et des défis pour ces lois. Les lois sur la protection des données et la cybersécurité ne doivent pas être considérées comme des documents statiques, à l’instar des écritures religieuses. L’évolution rapide des cybermenaces induites par l’IA, comme les fraudes de type « deepfake » et le piratage automatisé, exige des mises à jour constantes des lois sur la cybersécurité pour qu’elles restent efficaces. 

Je ne peux pas prédire l’avenir, mais je peux vous dire que les lois sur la cybercriminalité de chaque pays pourraient se diriger vers une convergence mondiale, traitant les cybermenaces pilotées par l’IA comme le trafic illégal de stupéfiants. Cela garantirait une approche unifiée et transfrontalière de l’application de la loi et de la réglementation.

Les dernières élections à Maurice ont été marquées par les « Missie Moustass Leaks ». Que pensez-vous de ce phénomène et de l’influence d’Internet et de son développement, dans la mesure où les auteurs de ces écoutes et de leur diffusion n’ont pas encore été retrouvés ?
Malheureusement, Internet est devenu une plateforme qui peut être utilisée pour presque tout, y compris la propagation d’informations nuisibles. Dans le cas des « Missie Moustass Leaks », cela a été fait habilement et avec des intentions spécifiques. L’auteur savait exactement ce qu’il faisait.  Les autorités peuvent tenter de remonter à la source, mais ce processus peut s’avérer très difficile, en particulier lorsque des outils tels que les VPN, qui cryptent le trafic, ou The Onion Router (TOR), qui garantit l’anonymat, sont utilisés pour masquer l’origine. La réalisation d’une expertise numérique nécessite souvent la coopération de YouTube et le respect de protocoles juridiques. 

Quoi qu’il en soit, les plateformes de médias sociaux ne devraient pas être verrouillées uniquement à cause de cet incident. Nous pouvons presque garantir que des tactiques similaires ou plus préjudiciables seront utilisées à l’avenir.

Le rôle d’Elon Musk aux côtés du Président des États-Unis pourrait-il freiner le développement de l’informatique et de l’IA sur la scène internationale ?
Elon Musk et Donald Trump ont des approches contrastées de l’IA. Elon Musk a été un défenseur notable du développement responsable de l’IA, soulignant ses risques tout en y investissant. Donald Trump, quant à lui, a mis l’accent sur la déréglementation et la compétitivité économique, mais pourrait également soulever des inquiétudes quant à la surveillance éthique et à la collaboration internationale.  Leur influence combinée pourrait créer une dynamique complexe. La prudence de Musk pourrait entrer en conflit avec l’approche déréglementaire de Trump, ce qui pourrait entraîner une fragmentation des efforts internationaux en matière de gouvernance de l’IA.  Toutefois, leur notoriété pourrait également attirer l’attention sur l’importance de l’IA et susciter des discussions à l’échelle mondiale sur son avenir. L’interaction entre la prudence et l’ambition nécessitera une approche équilibrée qui favorise l’innovation tout en tenant compte des implications éthiques et sociétales. Cette responsabilité incombera au monde entier, et pas seulement aux États-Unis.

Bio data de Sanjay Subron 

  • Éducation et formation : Sanjay Subron est détenteur d’un B.S. Electrical Engineering à l’University of Alberta au Canada, d’un Master of Business Management and Operations à Harvard University, d’un Ph.D. en Computer Science à Colorado Technical University et du Cisco Certified Internetwork Expert (CCIE Certification) #47104. 
  • Son parcours professionnel : Après ses études, Sanjay Subron a travaillé dans plusieurs entreprises au Canada et aux États-Unis (comme Network Operations Engineer à la Bank of Montreal, Manager, System Engineering Team Data Processing Science à Indianapolis, comme Senior Customer Support Engineer Nortel Networks, comme Software Engineer Cisco Systems, entre autres). Il est actuellement Director of Operations de CYBDATA Ltd à Maurice. Il est aussi parallèlement Adjunct Professor of Information and Communication Technology (ICT) à la Southern New Hampshire University aux États-Unis.
 

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