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Samer Kassem : «L’entreprise ne peut survivre sans les décisions de nos puissantes femmes» 

Au mois d’avril 2023, la société Aspen Global Incorporated, engagée dans le secteur pharmaceutique, a obtenu la certification EQUAL-SALARY, l’équivalent d’un certificat ISO pour les salaires. Une véritable avancée en termes d’égalité de rémunération entre hommes et femmes. « Cette certification est un arbre crucial parmi une plus grande forêt. Nos pratiques équitables et égales sont au cœur de nos valeurs » fait valoir Samer Kassem, CEO d’Aspen Global Incorporated. « J’ai grandi dans un pays où c’est normal pour les gens de faire face à la discrimination, surtout par rapport à la religion,  sans agir », indique-t-il.

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Quelles ont été les conditions prises en compte par la direction d’Aspen Global Incorporated afin d’obtenir la certification EQUAL-SALARY ? Quels critères convenait-il de respecter ?
Notre directeur financier, Issam Sarkis, a identifié cette opportunité comme étant un moyen d’être évalué par une accréditation prestigieuse, car il estimait que notre système de salaires basé sur le mérite avait de grandes chances d’obtenir de bons résultats lors du processus d’évaluation. 

La certification EQUAL-SALARY peut être décrite comme une certification ISO pour les salaires. Elle comprend deux phases. Dans un premier temps, les experts d’EQUAL-SALARY font une analyse statistique des données salariales grâce à une méthodologie développée avec l’Université de Genève. Si les résultats sont positifs et démontrent un écart de rémunération entre hommes et femmes de moins de 5 %, la deuxième étape est enclenchée et un audit est conduit par une tierce partie qui vient certifier la conformité du processus. C’est durant cette phase que l’engagement général de l’entreprise en matière d’égalité salariale, ainsi que sa mise en œuvre à travers les politiques et pratiques des Ressources Humaines, sont évaluées par cette tierce partie. 

Afin de rendre le processus totalement inclusif, les employés participent à l’audit sur place par le biais d’interviews et de sondages. Ce sont uniquement les entreprises remplissant toutes les conditions requises, en d’autres termes celles ayant atteint l’excellence en matière d’égalité salariale, qui obtiennent la certification EQUAL-SALARY. Même si cette certification n’est pas une surprise pour ma part, je suis fier que des tierces parties aient validé notre traitement équitable et égal envers les femmes travaillant à nos côtés.

Pourquoi la compagnie Aspen Global Incorporated tenait-elle à ce que son personnel féminin perçoive les mêmes salaires que le personnel masculin ?
J’ai grandi dans un pays où c’est normal pour les gens de faire face à la discrimination, surtout par rapport à la religion, voire les sectes, sans agir. J’ai moi-même été une victime de la discrimination lorsque j’ai débuté ma carrière. Je me suis promis, à un très jeune âge, de ne jamais faire vivre cela à quelqu’un d’autre, peu importe ses croyances, sa couleur de peau et sa nationalité, etc. Cette promesse est devenue de plus en plus importante au fur et à mesure que j’occupais des postes à responsabilité.

Ainsi, cette certification est un arbre crucial parmi une plus grande forêt. Nos pratiques équitables et égales sont au cœur de nos valeurs au sein de l’équipe des cadres supérieurs d’Aspen Global Incorporated. En effet, nous avons un écosystème global qui s’assure que nous traitons les personnes comme des êtres humains, et non comme des chiffres. Ce système s’assure que tout ce que nous faisons soit juste : promotion, gestion des performances, récompenses et reconnaissance, équilibre vie professionnelle/vie privée, et plus encore. 

Pour conclure, l’importance de recevoir une certification de ce genre démontre les principes d’équité et d’égalité que nous avons chez Aspen Global Incorporated, et nous encourageons les autres entreprises à emprunter cette voie.

La contribution des femmes à ma vie a commencé dès le début de mon existence, avant même qu’il n’était question d’affaires et d’entreprise.»

Depuis la création de la société Aspen Global Incorporated, quelle a été la contribution des femmes au sein de l’entreprise et comment ont-elles évolué ?
Permettez-moi tout d’abord de rendre hommage à la première femme de ma vie, ma mère, qui m’a appris à faire face à l’adversité tout en m’inculquant un système de valeurs axé sur la bienveillance. Sans ces enseignements, je n’aurais jamais pu m’installer dans un pays que je visitais pour la première fois et y créer une entreprise internationale. La contribution des femmes à ma vie a commencé dès le début de mon existence, avant même qu’il ne soit question d’affaires et d’entreprise. Si je devais énumérer toutes les contributions des femmes à Aspen Global Incorporated, il me faudrait écrire un livre, c’est pourquoi je m’en tiendrai à quelques commentaires uniquement. Quelques mois après avoir déménagé à l’île Maurice pour créer Aspen Global Incorporated, j’ai embauché cinq employés qui ont travaillé jour et nuit pour lancer cette entreprise. Trois de ces cinq employés étaient des femmes. Je suis donc éternellement reconnaissant à Kessy, Lindsay et Claire. Aujourd’hui, je suis entouré de femmes très puissantes à tous les niveaux d’Aspen Global Incorporated. L’entreprise ne peut survivre sans les contributions et les décisions de nos puissantes femmes au sein de l’équipe de direction, de notre Chief Operating Officer (COO) ou encore de mon assistante. 

En sus, certains de nos collègues ont été diagnostiqués d’un cancer au fil des ans. Cette épreuve nous a notamment enseigné le pouvoir de la résilience, et la façon dont nous pouvons nous unir en tant qu’équipe. Elle nous a également permis de mettre la situation des patients au premier plan. Cela a ravivé la flamme de notre mission en tant qu’entreprise pharmaceutique.

Êtes-vous partisan de l’idée que la parité salariale devrait devenir la norme partout ?
J’aimerais qu’on atteigne avant tout un tel niveau de normes, où nous n’aurions pas besoin de politiques et de régulations pour prouver que nous traitons un être humain comme un être humain. 

Lorsque j’effectue mes activités quotidiennes, je pense aux personnes qui apportent leur contribution et qui font la différence. Je ne tiens pas compte du sexe, de la religion ou de la nationalité, etc. J’aimerais vivre dans un monde où personne n’aurait le moindre doute sur le fait que ma fille soit promue uniquement en raison de son sexe, des politiques et autres régulations. 

Bien que cet article mette en lumière la parité salariale et la contribution des femmes au sein d’une entreprise, il est important de noter que je suis entouré d’hommes remarquables qui ont joué un rôle majeur dans notre réussite. Nous devons protéger les droits de tout un chacun, incluant ceux des hommes introvertis qui ne s’expriment pas.

En résumé, nous devons éliminer nos préjugés conscients de la prise de décision et mettre en place des systèmes d’entreprise pour gérer nos préjugés subconscients.

À ce jour, quels sont les blocages qui font que des femmes compétentes ne bénéficient toujours pas des mêmes droits que leurs collègues masculins ?
Tout commence par la façon dont certains parents élèvent leurs enfants par rapport aux stéréotypes de genres. Ils sont par la suite exposés à des préjugés implicites et explicites de la part de certains enseignants à l’école et finissent sur un lieu de travail avec des styles de leadership de la vieille école ainsi qu’une historique de discrimination chronique. Cela dit, nous ne devrions pas imposer des conséquences de genres/quotas de genres, car cela entraînerait des problèmes plus complexes pour la société. Si le nombre de femmes qui souhaitent devenir Chief Executive Officer (CEO) et membres du Conseil d’administration et qui ont les capacités de l’être, est égal au nombre d’hommes dans la même catégorie, alors nous aurons des femmes qui occuperont 50 % des postes de CEO et de membres du Conseil d’administration. Cependant, nous ne devrions pas forcer indirectement quelqu’un qui veut être médecin à devenir CEO à titre d’exemple.

Même si tout peut être amélioré, l’île Maurice doit être fière d’avoir assuré la gratuité des soins de santé publique à ses habitants.»

La certification EQUAL-SALARY encourage-t-elle les entreprises à adopter les bonnes pratiques pour garantir un espace de travail égalitaire entre hommes et femmes ?
Il y a une expression qui dit que si vous ne pouvez pas le mesurer, c’est que vous ne pourrez pas le gérer ou l’améliorer. La certification EQUAL-SALARY est un bon moyen de mesurer les pratiques internes des entreprises et de mettre en avant l’idée d’équité, qui doit aller au-delà de l’unique concept de la rémunération. J’encourage vivement les autres entreprises à suivre cette pratique et je suis heureux de voir que certains grands noms de l’île Maurice, comme la MCB, se sont engagés dans cette voie, ce qui est louable.

Pour en venir à la raison sociale de votre entreprise, comment le secteur de la pharmaceutique partout où Aspen Global Incorporated est implantée, a-t-il vécu les confinements et comment celles-ci ont impacté vos activités à Maurice ?
Aspen Global Incorporated a été confrontée à des défis similaires à ceux rencontrés par de nombreuses autres entreprises, comme des perturbations dans la logistique et la chaîne d’approvisionnement, ainsi qu’une augmentation considérable des coûts de transport. Cependant, nos sites de production et nos partenaires tiers dans le monde entier ont fait preuve d’une résilience exceptionnelle en continuant à produire dans des conditions difficiles sans précédent. Nous avons également contribué à l’approvisionnement en vaccins contre la COVID-19, ainsi qu’à l’approvisionnement en anesthésiques. Je suis très fier de nos différentes contributions pour lutter contre la pandémie. Je suis également fier d’avoir concrétisé notre vision en fournissant des médicaments abordables de haute qualité dans le monde entier. Notre équipe est restée unie et connectée pendant une longue période, car nous savions tous que nos patients comptaient sur nous.

Où en est la mise sur pied d’une filière pharmaceutique à Maurice, projet annoncé dans le Budget 2020 ? Un tel projet est-il viable à Maurice ?
La collaboration entre les secteurs privé et public a très bien démarré. De tels projets nécessitent une vision à long terme de haut niveau ainsi qu’un plan d’exécution très détaillé avec des étapes et des responsabilités clairement définies. L’île Maurice est bien placée pour fabriquer certains produits pharmaceutiques comme des comprimés sous forme solide ou des excipients. Compte tenu de la petite taille du marché mauricien, l’île dépendra toujours fortement des exportations, qui nécessitent des règles strictes en matière de BPF (Bonnes Pratiques de Fabrication) et un processus de certification, en plus de solides accords régionaux et bilatéraux.

L’île Maurice souhaite explorer davantage le marché africain. Quelles sont les conditions qui doivent prévaloir pour y arriver ?
L’île Maurice est bien placée en termes de talents, de langues et de proximité pour utiliser le vaste continent africain. Je vois des entreprises comme IBL, Grit et Gateway, entre autres, qui réussissent très bien en Afrique. C’est en soi un bon exemple pratique de plusieurs petits pas qui permettront par la suite de construire des ponts plus importants. Les besoins de l’Afrique dans le secteur pharmaceutique sont énormes. À titre d’exemple, uniquement 1 % des vaccins africains sont fabriqués en Afrique. Je pense qu’il y a quelques conditions qui feraient toute la différence, comme s’appuyer sur les réussites actuelles mentionnées plus haut, une collaboration continue entre le secteur privé et le secteur public, ainsi qu’une meilleure stratégie de rétention des talents pour éviter de perdre certains des meilleurs talents mauriciens qui sont cruciaux pour construire cette ambition africaine.

Depuis ces dernières 20 années, les filières pharmaceutiques dans les pays en développement sont en conflit avec les laboratoires sur la question des médicaments génériques et en général sur la question de l’accès aux médicaments… Où en est cette problématique à ce jour ?
Il s’agit ici d’un conflit permanent qui continuera de l’être. Ma position personnelle à ce sujet est claire et conforme à la stratégie d’Aspen Global Incorporated. Nous sommes tous favorables à l’accès à des médicaments de haute qualité et abordables, mais nous pensons également que cela doit se faire dans le cadre des règles et des réglementations. Le coût de la recherche et du développement est élevé et il y a une raison derrière la protection des brevets pendant un certain nombre d’années. Les fabricants de médicaments génériques ne devraient pas attaquer le brevet, mais devraient soit s’associer avec le créateur du médicament pour obtenir une licence (comme nous le faisons chez Aspen Global Incorporated), soit attendre que le brevet expire avant de lancer des médicaments génériques.

Quel est votre regard sur notre système de santé public et privé à Maurice ?
Même si tout peut être amélioré, l’île Maurice doit être fière d’avoir assuré la gratuité des soins de santé publique à ses habitants. Étant à Maurice depuis 15 ans, j’ai eu la chance d’avoir été témoin d’une amélioration majeure du système de santé et de l’accès aux équipements et autres services spécialisés. J’ai récemment constaté une plus grande collaboration entre les hôpitaux publics et privés, ainsi que l’inauguration de nouveaux hôpitaux spécialisés. Le chemin est encore long avant d’arriver à ce que l’on trouve dans des pays comme les États-Unis ou l’Allemagne, mais d’énormes progrès ont été accomplis et le potentiel est bel et bien réel.

 

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