Interview

Salil Roy: « la canne n’est pas rentable pour les petits planteurs »

Un bon nombre de petits planteurs ne pourront pas bénéficier pleinement de la hausse actuelle du prix du sucre au niveau mondial, déplore Salil Roy. Dans cet entretien, le président de la Planters’ Reform Association livre également ses attentes pour le Budget 2016-17.

Publicité

[blockquote]« Il y a eu une augmentation de 1 000 % dans le prix de la bagasse. Toutefois, c’est un chiffre purement mathématique. »[/blockquote] La récolte sucrière est en cours actuellement et devrait prendre fin en décembre. À la Chambre d’Agriculture, on prévoit une production de 400 000 tonnes de sucre en 2016. Les petits planteurs s’attendent-ils à une meilleure récolte cette année ? En 2015, le pays a connu le taux d’extraction de sucre le plus bas depuis les années 60. Ce qui a affecté le ‘cash-flow’ des planteurs. Nous attendions depuis le mois de décembre une assistance financière de Rs 2 000. Ce qui aurait servi à acheter du fertilisant en vue d’avoir un meilleur rendement pour la coupe de 2016. Or, c’est au début de juillet que les petits planteurs ont obtenu cette assistance. Ce mauvais ‘timing’ de financement de la part des autorités, notamment du Sugar Insurance Fund Board, pénalise un bon nombre de planteurs. Certains n’ont pas fertilisé leurs champs alors qu’il y a eu une sous utilisation du fertilisant par d’autres planteurs. Nous nous attendions donc à une baisse au niveau du rendement. Tout cela est chagrinant et démontre que l’industrie est encore bien mal comprise par les autorités. La hausse du prix du sucre au niveau mondial devrait, toutefois, apporter un certain soulagement aux petits planteurs…   Ce sera seulement le cas pour les planteurs qui ont mis du fertilisant dans leurs champs. Les autres ne vont pas bénéficier pleinement, car le rendement sera bas en raison du manque de fertilisant dans les champs. Toutefois, en termes de prix du sucre, le pire est derrière nous. Ce que les planteurs souhaitent, avant tout, c’est une redistribution de la richesse de l’industrie cannière. Nous souhaitons un meilleur prix pour la bagasse, la mélasse et ainsi qu’une ‘equity participation’ à hauteur de 35 %.  Or, ces mesures sont annoncées chaque année dans le Budget, mais il n’y a rien eu de concret jusqu’ici. Au nombre de 36 000 dans le passé, la communauté des planteurs a été réduit à environ 12 000 actuellement. L’abandon de terre est-il toujours d’actualité ? Oui. Si le business ne rapporte pas et n’est pas viable économiquement et financièrement, les planteurs seront forcés de le délaisser. Quel planteur voudrait planter de la canne pour faire de la perte ? Si le gouvernement a à cœur l’intérêt des planteurs, qu’il vienne de l’avant avec des mesures concrètes dans le Budget et qu’il vienne corriger certaines anomalies présentes dans l’industrie. Je tiens, toutefois, à faire ressortir que les petits planteurs ne sont pas des assistés. Ils demandent tout simplement leur dû. D’autant plus que l’heure est grave, car le nombre de planteurs diminue année après année. Parlons de la production d’énergie, elle a augmenté en 2015 dû notamment à une hausse de 19 % dans la production  de bagasse, selon les dernières données de Statistics Mauritius. Les petits planteurs en ont-ils tiré des bénéfices ? Certes, il y a eu une augmentation de 1 000 % dans le prix de la bagasse. Toutefois, c’est un chiffre purement mathématique. Le prix est concrètement passé de Rs 25 la tonne à Rs 250 la tonne. Or, chez nos voisins, la bagasse vaut Rs 1 500 la tonne. Les petits planteurs auraient dû obtenir un strict minimum de Rs 1 000 sur une tonne de bagasse. Quant à la mélasse, qui est utilisée pour la production d’éthanol, elle nous rapporte Rs 1 650 la tonne alors que nous aurions obtenu plus de Rs 3 000 si nous l’exportions. Par ailleurs, il faut compter Rs 5 000 à Rs 6 000 si on importe de la mélasse. Il faudra mettre bon ordre dans l’industrie, car si la canne est  bel et bien rentable, elle l’est pour certains, mais certainement pas pour les planteurs. Plusieurs amendements ont été apportés à la Sugar Industry Efficiency Act. Des changements qui ne répondraient pas, selon vous,  aux attentes des planteurs. Qu’est-ce qui vous amène à cette conclusion ? Certaines mesures sont taillées d’une telle façon qu’elles font les affaires de certains. Il y aurait dû avoir des consultations. Les planteurs se retrouveront coincés si ces amendements entrent en vigueur. Nous espérons que les autorités tiendront des consultations avant d’aller de  l’avant avec ces changements.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !