Mohammad Osman, un troisième suspect arrêté à l’île sœur, est accusé par le skipper Joseph Mike Didier Brasse d’être le lieutenant d’un parrain de la drogue. Le skipper est lui-même sous le coup d’une enquête de la commission anticorruption et une de ses vedettes, évaluée à Rs 15 millions, a été saisie lundi.
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Qui est le cerveau dans le trafic de drogue entre Maurice et La Réunion ? La Direction régionale des douanes de La Réunion et les gendarmes de la section de recherches de Saint-Denis sont en présence de versions contradictoires. Ils ont arrêté trois Mauriciens et quatre Réunionnais au port de plaisance de Sainte-Rose, dans la nuit du jeudi 10 novembre.
Joseph Mike Didier Brasse, un Mauricien de 45 ans, est considéré comme le cerveau de ce trafic régional. Il est le propriétaire de la vedette rapide L’Ilôt Gabriel et accuse un autre Mauricien, Mohammad Osman, d’être le bras droit du parrain ayant commandé l’héroïne estimée à Rs 630 millions. À l’île sœur, le brown sugar vaut dix fois moins cher, car il n’est pas aussi prisé qu’à Maurice où un gramme s’écoule à Rs 15 000, quelle que soit sa pureté.
Originaire de la rue Arsenal, à Port-Louis, et actuellement domicilié à Baie-du-Tombeau, Mohammad Osman dément et soutient que Joseph Mike Didier Brasse est le cerveau du trafic. Celui-ci était déjà dans le viseur de la brigade antidrogue. Par coïncidence, une de ses vedettes, équipées de deux moteurs, évaluée à Rs 15 millions, est sous le coup d’une demande de saisie de la part de la commission anticorruption en Cour suprême.
L’Independent Commission against Corruption (Icac) estime que cet habitant de Camp-L’Amour, à Grand-Baie, s’est vite enrichi. Elle le soupçonne de blanchiment et a ouvert une enquête le mois dernier. Il serait impliqué dans un trafic de drogue entre Maurice et Madagascar. Elle a eu la surprise d’apprendre qu’il a été coincé à La Réunion en début de semaine. Elle s’intéressera à l’aspect blanchiment de cette affaire.
Stock balancé en mer
Les autorités réunionnaises se demandent si l’île sœur est une plateforme pour les trafiquants mauriciens. Joseph Mike Didier Brasse soutient qu’il venait de récupérer son stock à Madagascar et qu’il rentrait à Maurice lorsqu’il a été victime d’une panne. Il raconte qu’il s’est rendu dans la Grande île en octobre et qu’il a acheté l’héroïne à 100 000 euros, soit près de Rs 4 millions. Il a ainsi confié avoir repêché un autre stock balancé en mer par un bateau en provenance de Madagascar en mars, sans passer par La Réunion.
À cause de cette panne, explique Joseph Mike Didier Brasse, il a dû contacter le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) de La Réunion, afin de pouvoir jeter l’ancre à Port-Ouest. À partir de là, il dit avoir sollicité l’aide de sa maîtresse réunionnaise, Corinne, pour mettre son stock à l’abri à l’étang-Salé. Elle savait pour la drogue, tout comme un de ses fils, d’où leur inculpation devant le tribunal de Champ-Fleuri lundi.
Joseph Mike Didier Brasse a alors élaboré un plan B pour que la drogue puisse arriver à bon port. Il explique avoir pris l’avion pour Maurice et convaincu Royce Almond Capdor, dit Almonzo, un habitant de Cotteau-Raffin, à La Gaulette, de l’aider. Âgé de 26 ans, celui-ci était aussi surveillé par l’Anti Drug & Smuggling Unit (Adsu) car il a déjà été condamné à deux reprises par la cour intermédiaire et le tribunal de Bambous pour possession et consommation de gandia.
Le hors-bord d’Almonzo Capdor, le Sweet Love Mama, saisi par les autorités réunionnaises aux côtés de L’Ilôt Gabriel, devait également être sous le coup d’une saisie par l’Icac le jeudi 17 novembre. La mère du jeune homme, Angela Shwedeen, a témoigné mardi sur les ondes de Radio Plus pour expliquer comment elle l’a aidé à financer l’acquisition de ce bateau.
Aux autorités réunionnaises, Almonzo Capdor a soutenu que Joseph Mike Didier Brasse lui a promis plusieurs milliers d’euros pour mener à bien cette mission. Celles-ci ont estimé que ce n’était pas un trafic international et elles ne transmettront donc pas son dossier à Paris.
« La marchandise, dont la destination finale était Maurice, a transité par Madagascar, puis selon toute vraisemblance, de manière fortuite, par La Réunion où elle a été stockée, pendant quelques semaines », explique la Direction régionale des douanes de La Réunion. Les enquêteurs mauriciens, menés par le directeur général de l’Adsu Choolun Bhojoo, auront leur mot à dire dans cette affaire.
- Elle bénéficiait d’une ‘social aid’
Une bénéficiaire de l’aide sociale a été entendue par l’Icac jusqu’à fort tard le lundi 14 novembre dans le cadre d’une demande de saisie en Cour suprême jeudi. Outre le fait de posséder l’une des vedettes rapides saisie à Port-Louis, le Ty Amor, et qui est évaluée à quelque Rs 2 millions, cette femme a été trouvée en possession de plusieurs dizaines de milliers de roupies en devises. Son mari, Jacquelin Surengon, qui est un skipper, a aussi été entendu. Il a été condamné dans le passé pour avoir aidé Sabitree Devi Sabapathee, l’épouse de l’ex-Mr Mauritius Rajen Sabapathee, à rejoindre Madagascar à bord du Gadiam-B.
- Trafics intenses
La Réunion aurait toujours été une plateforme pour les trafiquants, notamment pour le trafic de gandia qui se vend à prix d’or à Maurice. Récemment, un procès a été ouvert à l’île sœur sur la saisie de plusieurs kilos de cette drogue sur un voilier mauricien, il y a six ans, dans des bouteilles de plongée destinées à Maurice. Le cerveau serait le skipper Jacques Désiré Baya, déjà impliqué dans une affaire similaire. Sept Mauriciens et Réunionnais considérés comme des fournisseurs, des intermédiaires et des transporteurs de drogue, ont comparu devant le tribunal de Champ-Fleuri.
Jacques Désiré Baya avait déjà été arrêté en 2003 à l’île sœur avec 23 kilos de gandia dissimulés dans des bidons de plastique à bord du voilier Fou Baladin en partance pour Port-Louis. Il avait alors été condamné à cinq ans de prison. Après qu’il a purgé sa peine, son nom a été balancé par le skipper mauricien François Marc Marot, arrêté dans l’affaire des bouteilles de plongée bourrées de drogue.
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