Le directeur d'Ergomax, Vidarmen Payen, jouissait d'une totale liberté pour mener à bien ses projets, au détriment de Mauritius Telecom. Ses relations spéciales lui ont en effet donné carte blanche pour ce faire.
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« Nous ne pouvions jamais nous permettre de faire la moindre remarque sur ses projets. Il faisait ce qu'il voulait, au détriment de la compagnie ». C'est ainsi qu'un employé de Mauritius Telecom (MT) s'exprime au sujet de Vidarmen Payen, directeur d'Ergomax.
Ce dernier, qui est actuellement interrogé par la Special Striking Team (SST), s'est forgé une réputation d'homme de fer dans les couloirs de la Telecom Tower, à Port-Louis. En effet, plusieurs employés de la société de télécommunication nationale affirment que Vidarmen Payen a bénéficié d'une liberté totale de la direction pour décider de la manière dont les projets qui lui étaient confiés devaient être exécutés. « Malgré le fait que Mauritius Telecom était un client important qui payait cher, nous n'avions pas notre mot à dire. C'est pourquoi plusieurs projets conçus par Ergomax laissent aujourd'hui à désirer », affirme un autre employé de MT.
Un projet initié sous la direction d'Ergomax qui illustre bien les dires de nombreux employés de MT est celui du MUGA. Ce programme, qui consiste à installer plusieurs espaces sportifs à travers le pays, fait aujourd'hui l'objet de nombreuses critiques de la part du public en raison de l'état des équipements.
Selon différentes sources consultées au niveau de la direction de MT, ainsi que certaines dénonciations faites à la police et à l’Independent Commission against Corruption (Icac), il existe un flou considérable quant aux conditions dans lesquelles MT a attribué les contrats de construction des espaces MUGA à Ergomax. Certaines sources affirment qu'il n'y a pas eu d'appel d'offres, tandis que d'autres lanceurs d'alerte déclarent qu'il y a eu plusieurs arrangements pour favoriser Ergomax. Quoi qu'il en soit, il est établi qu'Ergomax aurait perçu entre Rs 30 M et 35 M, et que la qualité de nombreux travaux laisse aujourd'hui à désirer. Certains rapports internes ont d'ailleurs attiré l'attention du conseil d'administration de MT sur le fait qu'Ergomax aurait utilisé des matériaux de mauvaise qualité dans la construction des espaces MUGA, malgré les contrats lucratifs qui lui ont été accordés.
« Le sentiment chez Mauritius Telecom est que l'essentiel était de maximiser les profits des contrats qui lui étaient attribués. Le programme MUGA était relégué au second plan », explique un cadre basé à la Telecom Tower. Les employés, normalement chargés de superviser l'avancement des travaux, ont été exclus. « Ceux qui osaient critiquer la qualité des travaux s'exposaient à des sanctions ou à des mutations », disent-ils. En d'autres termes, l'installation des équipements se faisait sans aucune supervision, et ce n'est qu'au moment de la livraison que MT pouvait constater la qualité des installations.
En sus du projet MUGA, on apprend qu'Ergomax a également bénéficié de toutes sortes de largesses concernant les travaux d'aménagement réalisés dans différents Telecom Shops à travers le pays, ainsi que les travaux de rénovation effectués dans deux étages de la Telecom Tower à Port-Louis.
Ergomax, encore et toujours
Une source bien informée chez MT attire également l'attention sur le fait que la direction de MT a décidé, en l'espace de six ans, de changer à trois reprises l'emplacement de son magasin à Quatre-Bornes. Dans les trois cas, les contrats d'aménagement ont été accordés à Ergomax. Un autre exemple qui illustre la puissance de cette compagnie chez MT est le contrat de rénovation obtenu pour la rénovation de deux étages du quartier général de MT, estimé à Rs 200 M. « Pour mettre cela en perspective, la construction du bâtiment de Mauritius Telecom à Port-Louis a coûté la somme de Rs 600 M ». Et là encore, la qualité des travaux effectués au 15e étage laisse à désirer, selon plusieurs employés. « Le simple fait que le 15e étage n'ait pas de plafond en dit long sur ce qui a été fait », ajoutent des employés.
Le domaine de chasse de Bananes, bombe à retardement ?
Dans un proche avenir, Vidarmen Payen devrait être interrogé sur l'origine de ses biens, ce qui le contraindra inévitablement à expliquer les circonstances entourant le bail de cette propriété qui appartient à l'État. Les réponses qu'il sera amené à fournir pourraient mettre certaines personnes occupant des postes à responsabilité dans une situation embarrassante.
L'interrogatoire de Vidarmen Payen aura pour objectif de faire toute la lumière sur les circonstances exactes de l'obtention de cette propriété. Les détails sur les conditions, les accords ou les privilèges qui ont facilité cette acquisition seront examinés avec attention. Il est possible que des preuves ou des informations nouvelles et troublantes soient révélées, mettant ainsi en évidence d'éventuelles irrégularités ou ces cas de favoritisme.
Telecom Shop de Quatre-Bornes : Enquête sur un prête-nom
Des informations circulent selon lesquelles Mauritius Telecom envisage de résilier le contrat de bail avec le propriétaire de l'emplacement où se trouve sa Telecom Shop à Quatre-Bornes. Selon des enquêtes internes menées par la direction, il semble que cet emplacement soit détenu par un prête-nom proche de l'ancien CEO de la compagnie de télécommunication nationale. Si ces informations sont fondées, cela pourrait entraîner l'intervention de la Commission anti-corruption et soulèverait de nouvelles questions sur la transparence et l'intégrité des opérations de l'entreprise.
MUGA tire à sa fin
Interrogé, le jeudi 8 juin, sur l'avenir du programme MUGA, le CEO de MT, Kapil Reesaul, a confirmé que les projets en cours de conception seront menés à terme. Cependant, une fois les 17 sites de MUGA terminés, la direction de l'entreprise a pris la décision de ne pas poursuivre ce programme. Cette annonce marque un tournant dans la stratégie de MT, mettant fin aux initiatives lancées sous l'ancien CEO Sherry Singh. Il est aussi important de souligner que le rapport réalisé par la société américaine, FTI Consulting, a mis en lumière les relations entre l’ancienne direction de MT et Ergomax qui n’étaient « pas saines » pour l’entreprise.
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