La Cour suprême n’a aucun secret pour Sadaram Timba. Âgé de 83 ans, cet habitant de Pointe-aux-Sables y travaille depuis 59 ans. D’’Office attentant’ à ‘Head messenger’, celui qu’on surnomme le notaire des pauvres dit pratiquer son métier, chaque jour, avec le même dévouement et amour.
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À l’ombre d’un grand tamarinier, nous l’attendons sur les bancs en bois de couleur verte. Il est 13 heures. Sadaram Timba pointe le bout de son nez. Passant le portail de la Cour suprême, l’homme croulant sous le poids de l’âge s’avance vers nous difficilement. À peine une brève poignée de main échangée, il nous lance d’une voix à peine audible, « enn timama mo koz ar ou la », avant de disparaître derrière une porte portant le numéro 11. Deux minutes plus tard, il réapparaît et se laisse choir à côté de nous en laissant échapper un soupir, qui caractérise tant les personnes de son âge.
Reprenant son souffle, Sadaram Timba finit par afficher un large sourire à la question : « Depi kan ou travay isi ? » Et la réponse ne se fait pas attendre. « Je travaille à la Cour suprême depuis 1957. Je suis arrivé comme ‘office attendant’ et j’ai pris ma retraite comme ‘Head messenger’. J’ai eu une longue et riche carrière », lance-t-il. C’est à l’âge de 25 ans, poursuit notre interlocuteur, qu’il prendra de l’emploi à la Cour suprême. « À l’époque, on me confiait des documents que j’emmenais au bureau de l’enregistrement. Je faisais alors plusieurs va-et-vient et c’était parfois fatiguant. Mais j’ai toujours adoré mon travail. »
À force de travail et de persévérance, Sadaram Timba sera promu ‘Head office attendant’ en 1976. « Avec ces nouvelles responsabilités, j’aurais dû être posté au bureau du Premier ministre. Mais la Cour suprême n’a pas voulu se séparer de moi. À la demande générale, j’y suis resté. Ce qui n’était pas pour me déplaire parce que, ici, c’est un peu ma deuxième maison. » Cette ‘maison’ justement, Sadaram a vieilli à ses côtés. « Je travaille ici depuis 59 ans et pratiquement rien n’a changé. La Cour suprême est telle que je l’ai connue à mes débuts. Il y a certes eu de petites rénovations, mais sans plus. De mémoire, seule la bibliothèque a subi un agrandissement. »
Un pan de l’histoire
C’est ce qui est toutefois dommage, selon Sadaram. « On augmente sans cesse le nombre de magistrats. Cependant, aucune démarche n’est entreprise pour agrandir la Cour suprême, qui ne peut pas, malheureusement, accueillir plus de monde. La solution n’est pas de la démolir parce que cette cour représente un pan de l’histoire de notre pays. Mais, à la longue, il faudra penser à la délocalisation. Mais il faudra bien réfléchir parce qu’il ne faut pas oublier que le quartier, où se trouve la Cour suprême, regroupe notaires, arpenteurs et autres avoués. »
Sadaram Timba confie n’avoir pas fait d’études secondaires. Toutefois, il a beaucoup appris en travaillant. « Je possède simplement un modeste certificat du CPE. Mais cela ne m’a pas empêché de comprendre les rouages des procédures d’affidavit, d’héritage et de la vente à la barre, entre autres. Mon expérience fait qu’aujourd’hui avocats, notaires et arpenteurs font appel à moi pour traiter certains dossiers », affirme l’octogénaire.
Travaillant désormais en ‘freelance’, Sadaram vient en aide à tous ceux qui le sollicitent. « À la Cour suprême, je suis connu comme le notaire des pauvres. En effet, j’aide le public à trouver la lumière au bout du tunnel quand il en vient à leurs démarches. Jusqu’ici, j’ai toujours trouvé une solution à leur problème même si, dans certains cas, mes recherches peuvent durer des mois voire des années. Mais aucun des dossiers sur lesquels j’ai travaillé n’a débouché sur un échec. »
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