Interview

Roshan Rajroop : «Les droits humains sont sacrés, indivisibles et inaliénables» 

Roshan Rajroop

Notre invité cette semaine est Me Roshan Rajroop, président de DIS-MOI, qui fait le bilan des actions de cet organisme au cours de l’année. Il nous parle aussi du choix qui l’a amené à être membre de DIS-MOI et de sa fierté de présider cette ONG qui a fait avancer les droits humains au sein de la République.

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Me Rajroop, on vous sait le plus discret des membres de DIS-MOI, vous êtes considéré comme la force tranquille de l’ONG. Comment expliquer cette réputation ?
Permettez-moi de faire une analogie. Il y a ceux qui pensent aux tactiques et développent la stratégie qu’il faut pour réaliser les objectifs que nous nous sommes fixés. Certes, c’est un travail collectif mais des fois il y a un leadership qui émerge autour duquel les militants des droits humains se mettent à l’ouvrage. Je suis heureux que cette formule-là marche très bien chez nous bien qu’on ne m’entende pas si souvent.

Vous êtes avoué de profession, comment êtes-vous passé du statut de commis de l’État à vous mettre à votre compte ?
Sans arrogance, il y a le service aux autres dans l’ADN de mes parents dont j’ai hérité et que je pratique depuis ma tendre jeunesse. En tant que commis de l’État, vous travaillez dans un cadre spécifique au mieux de votre compétence. Je ne sous-estime pas ce travail car il est crucial pour l’avancement du pays, mais moi j’ai choisi un autre chemin… J’ai pris des cours pendant que je travaillais et, par vocation, j’ai choisi le métier d’avoué pour être au service du plus grand nombre de mes compatriotes. 

Vous êtes connu pour « aider » ceux qui ont des difficultés …
C’est ma manière de pratiquer le pro bono à ma façon.

Revenons aux droits humains. Comment concilier votre métier et celui d’ardent défenseur des droits humains ?
Aider à rendre justice est en soi une manière de protéger les droits des gens, qu’ils soient accusés ou suspects, coupables ou repentis. Mon métier me permet de facilement appréhender la soif des gens avides de justice à tous les niveaux, qui veulent que leurs droits soient respectés. Tout simplement.

L’éducation aux droits humains doit être au programme d’études, formelle ou informelle, car je suis convaincu qu’elle aidera à améliorer la société.»

Quel a été le déclic qui vous a fait rejoindre DIS-MOI ?
Les camarades au sein de DIS-MOI, à l’instar de Lindley Couronne, m’avaient convaincu de la justesse de la mission et de la vision de l’organisation. Celle de promouvoir dans la région du Sud-Ouest de l’océan Indien une culture des droits humains et le respect des valeurs humaines.

DIS-MOI s’attelle à la sensibilisation de nos compatriotes par le biais de diverses commissions spécialisées : droits des femmes, des enfants, de l’environnement, des personnes âgées, commission contre la torture, commission prison, entre autres.

C’est ce grand programme, cette grande ambition, que je voulais aussi faire mien.

Quel regard  jetez-vous sur le bilan de ces commissions ?
En toute modestie, DIS-MOI est devenue un buzzword comme on dit. La commission des Droits des Personnes Âgées a porté haut les couleurs, si on peut s’exprimer ainsi, de DIS-MOI, des ONG des quatre coins du monde au Conseil des Droits Humains à Genève au mois de juillet dernier. Pour dire qu’il est temps, après au moins dix ans de débats, de commencer la rédaction d’une Convention des droits des personnes âgées.

Nous avons notre Pro-Bono Clinic qui opère sous la férule de mon collègue Me Erickson Mooneapillay pour un service bénévole aux victimes qui ne peuvent encourir des frais en cours de justice. 

La commission Femmes, animée par notre collègue Ny Onja Hon Fat, fait en ce moment un travail de fourmi et, par ailleurs, Jean François Favory anime un vaste programme de sensibilisation auprès des personnes à handicap.

Ce sont là, je dirai, les projets phares de DIS-MOI et j’en suis très fier.

Pouvez-vous nous parler des contacts établis avec les militants des droits humains de la région ?
Le Sud-Ouest de l’océan Indien grouille de gens qui sont très conscients de leurs droits, des droits humains. Cela est vrai pour les Comores où nous avons été animer des séminaires sur le sujet, aux Seychelles, à Madagascar. Des amis rodriguais et agaléens ont participé à nos cours de formation en droits humains.  

À ce jour, nous avons une antenne à Rodrigues, une ONG DIS-MOI à Madagascar et aux Seychelles. Aux Comores, les choses avancent lentement mais nous faisons le suivi. Nous sommes en train de créer une coalition d’organisations de droits humains comme l’ont faite ailleurs d’autres activistes.

Cette démarche s’inscrit dans notre vision, comme je le disais plus haut, et préconise une région où les droits fondamentaux sont respectés tels qu’ils sont exprimés dans la Charte Africaine et dans la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Et au-delà de la région ?
C’est une dimension de notre programme qui me porte à cœur. De retour des Comores, nous nous sommes rendus, à mon initiative, au bureau de Help Age International à Nairobi. Et ce fut là le démarrage d’une collaboration fructueuse entre Help Age et nous. Notre affiliation avec GAROP nous a ouvert un grand boulevard sur le continent africain. DIS-MOI est membre du Steering Committee du Stakeholder Group on Ageing Africa. DIS-MOI est, par ailleurs, jumelée avec Ageing Nepal et KARIKA de Nairobi, deux organisations sœurs qui ont les mêmes objectifs que nous.

J’ajoute que nous sommes accrédités auprès de l’ONU au niveau du Open-Ended Working Group on Ageing mis en place à la demande du Secrétaire Général de l’ONU, lequel groupe se réunira pour la 11e fois en avril prochain. Nous ne manquons pas d’y faire des soumissions chaque année pour alimenter les débats.

Pour revenir à Maurice, pouvez-vous nous dire pourquoi autant de programmes et de projets ?
Vous savez, l’humain tel qu’il est peut agir d’une manière consensuelle pour le bien-être du plus grand nombre, mais souvent il y a des déviations, des pervers, des égoïstes, des malfaiteurs. Ceux-là ont besoin d’être pris en charge, d’être conscientisés aux droits, ceux des autres comme les leurs. Il y a les jeunes, les sans-emplois, les travailleurs manuels, les professionnels, les personnes âgées qui ont besoin de connaître leurs droits. L’éducation aux droits humains doit être au programme d’études, formelle ou informelle, car je suis convaincu qu’elle aidera à améliorer la société. Les droits humains sont sacrés, indivisibles et inaliénables.

Me Rajroop, le mot de la fin….
Nous avons vécu une année charnière et j’en remercie mes collègues, mes collaborateurs et le personnel dévoué de DIS-MOI.

2020 sera une année de beaucoup de défis dans la continuité de nos activités mais dans l’entame des nouveaux projets ici comme dans la région.

Je tiens à souhaiter à tous et à toutes, à nos lecteurs, une très bonne et heureuse année.

Propos recueillis par Jenila Lindor

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