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Revenge porn : ces femmes exhibées en un clic

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Au cours des derniers mois, plusieurs cas de cyberintimité violée, aussi appelée revenge porn, ont été signalés à la police. La majorité des cas concerne des femmes piégées par amour pour leurs anciens compagnons. 

Après une rupture amoureuse, certains individus, submergés par la déception et la colère, choisissent de se venger en diffusant des photos ou vidéos de nature intime, à caractère sexuel explicite. Cette pratique, appelée revenge porn ou cyberintimité violée, a pris de l’ampleur à Maurice dans un monde digital, où un simple clic pour mémoriser des moments intimes peut avoir une conséquence dévastatrice pour la victime, dont la majorité sont des femmes. 

Certaines de ces images étaient extrêmement personnelles et n’avaient clairement pas été destinées à une diffusion en ligne. Elles peuvent causer un préjudice moral, psychologique et social irréparable aux victimes, qui se retrouvent exposées au regard des autres, sans leur consentement.
C’est notamment le cas de Sharmila (prénom d’emprunt), la quarantaine. Elle vit aujourd’hui dans la dépression et est suivie par un psychologue en raison de son état fragile face à son calvaire. Le 2 octobre 2023, elle dépose une plainte au Central Criminal Investigation Department (CCID) après que son ex-partenaire a diffusé des photos intimes d’elle sur TikTok. Ce qui aurait dû rester privé est devenu une source de honte et d’embarras pour cette mère de famille.

Sharmila dit être une femme complètement détruite.
Sharmila dit être une femme complètement détruite.

Selon ses proches, Sharmila n’est plus la même depuis que ses photos intimes ont été publiées sur le réseau social, sans compter que des vidéos intimes de son ex et elle sont en circulation sur WhatsApp. L’auteur, sans remords, a envoyé des sextapes de Sharmila à ses enfants et aussi à son père qui est une personne âgée. Du coup, elle se retrouve isolée dans son malheur, et passe des nuits blanches à pleurer. 
L’humiliation se lit sur son visage. « Mes enfants et mes proches n’ont plus le même regard sur moi. Aujourd’hui c’est moi, et demain ce sera une autre femme qui sera victime de ‘revenge porn’ », dit Sharmila avec dépit. 
La quadragénaire souhaite que la police agisse rapidement. « J’espère que la justice donnera une sévère leçon à ces personnes qui n’ont rien à perdre en détruisant la vie des femmes », lance-t-elle. 

Elle n’est, en effet, pas la seule dans ce cas. En octobre toujours, une jeune femme de 23 ans a porté plainte contre son ex-petit ami, un habitant d’un village du Sud de l’île. Il la menace de divulguer des vidéos intimes d’elle. Ne digérant pas leur rupture, il insiste pour qu’ils se remettent ensemble, menaçant de rendre publiques ces vidéos intimes. 

Leur histoire a commencé en février 2019 lorsqu’ils se sont rencontrés au travail, devenant amis avant de se mettre un couple en août de la même année. Elle a accepté de se filmer en situation intime à la demande de son petit ami, pensant que ces vidéos resteraient privées. Aujourd’hui, elle regrette amèrement cette décision.

Des victimes de « revenge porn » sont nombreuses. En août 2023, c’est une habitante de Bambous, âgée de 19 ans, qui a porté plainte pour violation de l’ICT Act contre son ex-petit ami, Emmanuel, 22 ans, de Quatre-Bornes, suite à un acte de vengeance. Le 6 juillet 2023, elle avait partagé deux photos intimes avec lui sur WhatsApp, avant de mettre fin à leur relation quelque temps après. Un mois plus tard, en août, un ami l’a informée qu’une de ses photos nues circulait sur Telegram.

Un mois plus tôt, une femme de 21 ans, originaire d’un village du Sud, portait plainte contre son ancien petit ami pour sextorsion. Elle expliquait à la police de L’Escalier qu’elle s’était fait berner par le suspect qui lui faisait du chantage avec des photos et vidéos intimes d’elle. 
Après avoir vécu dans la peur pendant plusieurs semaines, ne supportant plus cette situation, elle a fini par le dénoncer. Elle a remis aux policiers les messages de menaces du suspect, qui a déjà mis ses menaces à exécution. 

Rachel (prénom d’emprunt), elle, a 18 ans. Victime des agissements de son ancien amoureux, elle confie vivre dans l’ombre. « Mon ex-copain utilise une ancienne ‘sextape’ de moi pour se faire de l’argent et nuit à ma réputation », témoigne la jeune femme. L’habitante de Port-Louis a porté plainte pour violation de l’ICT Act en octobre 2022. 

C’est à l’âge de 16 ans, en 2020, qu’elle a fait la connaissance d’un jeune homme de 17 ans, habitant la région de Bambous. « Un jour, alors qu’on passait un moment intime chez moi, il a commencé à filmer nos actes sexuels avec son téléphone. Au début, je n’étais pas d’accord, mais il a réussi à me convaincre. Il m’avait promis qu’il garderait la vidéo privée. Il m’avait parlé d’amour. C’est alors que j’ai accepté, par amour pour lui », raconte Rachel. Bien mal lui en a pris. 

 

Le rôle du MAUCORS


Le Mauritian Cybercrime Online Reporting System (MAUCORS) est un système national en ligne qui permet au public de signaler de manière sécurisée les cybercrimes qui se produisent sur les médias sociaux. Il offre également des conseils pour aider à reconnaître et à éviter les cybercrimes les plus courants sur ces plateformes. 
Le MAUCORS est une initiative clé dans le cadre de la Stratégie de lutte contre la cybercriminalité et soutient la Stratégie nationale de cybersécurité, qui détaille l’approche du gouvernement pour lutter contre la cybercriminalité à Maurice. Ce système a pour objectif de faciliter le signalement des cybercrimes et de mieux comprendre leur impact sur les citoyens mauriciens.

Me Erickson Mooneapillay : «Les cas de revenge porn sont en hausse»

ericksonPouvez-vous définir ce qu’est le revenge porn ?
Le revenge porn est un phénomène préoccupant où un individu partage, diffuse ou publie des photos ou vidéos à caractère sexuel d’une autre personne sans son consentement.

Qu’est-ce qui, selon vous, explique ce phénomène grandissant ?
En premier lieu, ce problème est commun après une rupture sentimentale. L’un des conjoints, qui a été blessé par cette séparation et qui ne l’accepte pas, décide de se venger de l’autre. Ensuite, un individu jaloux peut commettre le revenge porn afin de ternir la réputation d’un collègue de travail ou d’un adversaire politique afin de détruire sa carrière. 
La recrudescence du revenge porn est due aux réseaux sociaux, car les gens n’ont plus peur de partager des photos intimes ou des « sex tapes ». Par conséquent, cela augmente les risques de revenge porn.

Avez-vous des chiffres sur le nombre de plaintes concernant ce délit ?
À Maurice, nous n’avons pas de chiffres exacts sur le nombre de plaintes, mais nous pouvons affirmer que les cas et les plaintes sont en hausse car ce problème est commun. En 2021, le revenge porn avait fait scandale sur Telegram, Messenger, WhatsApp et Facebook. Plusieurs cas avaient été rapportés à la police, donc cela démontre que les cas de revenge porn augmentent dans notre pays. 
En 2022, il y avait plus de 19 000 cas de revenge porn en Angleterre, par exemple.

Quelles sont les étapes à suivre lorsqu’une victime apprend que des photos ou vidéos intimes d’elle circulent sur les réseaux sociaux ?
En premier lieu, la victime doit informer un proche, comme un conjoint ou un parent, même si cela est difficile. Ensuite, il faut récupérer les preuves, c’est-à-dire les photos ou vidéos et l’adresse IP, et connaître la source ou les sites qui diffusent ces vidéos comme Telegram ou Pornhub. 

Puis, il faut essayer de savoir comment ces vidéos ont été diffusées, par un ex-petit ami, un proche, un ami ou une connaissance sur Facebook. Après avoir eu les preuves et identifié un principal suspect, la victime doit avertir la police et porter plainte. Par la suite, la police prend les choses en main et commence son enquête.

Comment la police procède-t-elle ou devrait-elle procéder à la suite d’une plainte ?
(a) Il faut d’abord donner une assistance et une aide psychologique à la victime.
(b) La police doit transférer le cas à la Cybercrime Unit. Leurs agents sont spécialisés dans ce type de cas.
(c) Puis, il faut immédiatement agir et avertir les sites concernés afin qu’ils retirent les photos et les vidéos des plateformes.
(d) La police doit analyser les preuves, l’adresse IP et les pistes afin d’identifier le suspect et procéder à son arrestation.

Pour le moment, il n’y a pas de loi spécifique à Maurice pour prendre des sanctions contre les plateformes en ligne qui hébergent le revenge porn»

Comment faire pour obtenir le retrait de ces photos/vidéos intimes ?
La Cybercrime Unit doit être informée et elle dispose des outils pour obtenir le retrait de ces photos/vidéos. La victime peut informer les sites web concernés par message, email ou par les options 
« Signaler un problème » qu’on trouve dans l’option « Paramètres ».

Y a-t-il des lois en vigueur qui traitent le revenge porn ? Quelles sont les sanctions prévues contre l’auteur ?
Selon l’article 19 du Cybersecurity and Cybercrime Act 2021, l’auteur est passible d’une amende de Rs 1 million et d’une peine d’emprisonnement de 20 ans.

Les sanctions sont-elles les mêmes si le revenge porn implique des mineurs ?
Pour l’instant, l’article 19 du Cybersecurity and Cybercrime Act 2021 englobe tous les cas. Donc, il n’y a pas de distinction entre les majeurs ou les mineurs.

Ces sanctions sont-elles suffisamment dissuasives, selon vous ?
Je pense que les sanctions sont assez sévères, mais il faut surtout une campagne de sensibilisation si nous voulons diminuer les cas de revenge porn.

Depuis que le Cybersecurity and Cybercrime Act est en vigueur, savez-vous s’il y a eu des condamnations ? 
Il y a beaucoup de cas qui ne sont pas médiatisés.

Quels sont les recours de la victime contre l’auteur du revenge porn ?
(a) Porter plainte contre l’auteur pour une affaire criminelle.
(b) Intenter une action au civil pour réclamer des excuses publiques et une compensation financière pour dommages moraux.
(c) Elle peut également intenter une action pour diffamation.
(d) Des injonctions prohibitoires.

Y a-t-il un délai légal à respecter pour intenter des poursuites ?
Non, mais le plus tôt est le mieux.

Comment la loi traite-t-elle les situations où le revenge porn est utilisé comme moyen de chantage ?
Ce phénomène est connu sous le nom de sextortion. Les articles 2 et 18 du Cybersecurity and cybercrime Act 2021 prévoient la « cyberextortion ». Les sanctions sont similaires à l’article 19 concernant le revenge porn et donc l’article 18 englobe le sextortion et tous les cas où il y a du chantage.

Quels sont les droits d’une victime si le revenge porn a été partagé avec des tiers, tel que ses employeurs ou sa famille ?
En plus de rapporter l’affaire au pénal, la victime peut réclamer des dommages au civil.

Quelles sont les implications légales pour les plateformes en ligne qui hébergent le contenu de revenge porn ?
Pour le moment, il n’y a pas de loi spécifique à Maurice pour prendre des sanctions contre les plateformes en ligne qui hébergent le revenge porn, puisqu’il y a un problème de jurisdiction. En Angleterre, les activistes mènent des campagnes afin de prendre des actions contre les plateformes en ligne, mais la loi reste assez laxiste sur ce sujet.

Comment, selon vous, mieux sensibiliser la population afin d’éviter de telles situations ?
Il faut éduquer sur les dangers du revenge porn, les causes et les situations qui mènent au revenge porn. Il faut aussi sensibiliser sur les conséquences du revenge porn comme le suicide, la dépression, la perte de confiance et une réputation gâchée.

Les types courants de cybercrimes

La cybercriminalité est un fléau qui peut prendre diverses formes, menaçant la sécurité en ligne et la confidentialité des individus. Voici un aperçu des types courants de cybercrimes :

Harcèlement en ligne 
L’utilisation d’Internet pour intimider, menacer ou molester une personne.

Piratage informatique 
L’accès non autorisé à des systèmes informatiques, souvent dans le but de voler des informations sensibles.

Contenus offensants ou illégaux 
Cela inclut la diffusion de matériel pornographique, la pédopornographie, les contenus sexuellement explicites, la promotion du racisme, du terrorisme, les discours de haine, la violence et les contenus graphiques, ainsi que le spam.

Sextorsion 
L’utilisation de photos ou vidéos intimes pour extorquer de l’argent ou d’autres faveurs sous la menace de divulgation publique.

Vol d’identité 
L’usurpation de l’identité d’une personne pour commettre des actes illicites, tels que des fraudes financières.

Cyberharcèlement 
L’utilisation des médias numériques pour harceler, menacer ou intimider quelqu’un de manière répétée. Le cyberharcèlement peut également prendre la forme d’une surveillance constante d’une personne en ligne, généralement dans le but de l’effrayer ou de l’intimider.

Arnaques et fraudes en ligne 
Diverses escroqueries en ligne visant à extorquer de l’argent ou des informations personnelles.

Hameçonnage (phishing) 
L’utilisation de faux sites web ou de courriels pour tromper les individus et leur faire divulguer des informations confidentielles comme leurs identifiants, leurs mots de passe ou leurs coordonnées bancaires.

 

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