Restitution de l’archipel des Chagos à l’État mauricien - Shafick Osman : «Maurice a plus de chances avec le Parti travailliste britannique»

L’État mauricien devra prendre toutes les précautions nécessaires, quand il enverra un bateau vers l’archipel des Chagos. Selon Shafick Osman, l’armée américaine postée sur la base militaire de Diego Garcia pourrait riposter. C’est ce qu’estime le docteur en géopolitique et chercheur associé à la Florida International University (Miami). Selon lui, Maurice a plus de chances de récupérer l’archipel, si c’est le Parti travailliste britannique qui remporte les élections de décembre prochain.

Malgré l’avis consultatif de la Cour internationale de justice et la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies donnant gain de cause à Maurice, la Grande-Bretagne a fait comprendre qu’elle n’allait pas céder l’administration de l’archipel. Que peut faire Maurice face à cette situation ? 
Pas grand-chose, sauf dénoncer cela au niveau international, dans les différentes instances africaines et onusiennes, entre autres. Cela dit, il faudra voir ce que l’assemblée générale des Nations unies fera, car c’est sa résolution. 

Honnêtement, Maurice peut taper fort et à juste titre, sur le Royaume-Uni, mais je ne vois pas le gouvernement mauricien marteler trop fort sur la scène internationale, car les États-Unis sont parties prenantes de l’affaire. Je vois difficilement Maurice confronter frontalement les États-Unis, car ceux-ci sont un allié de taille pour non seulement le gouvernement de Narendra Modi, mais aussi pour l’Inde de manière générale. 

A priori, Maurice sollicitera tous ses « amis » sur la question y compris la Chine et la Russie qui ont voté pour la dernière résolution onusienne, mais l’Inde devrait être un intermédiaire privilégié.

Le gouvernement mauricien envisage d’envoyer un bateau vers l’archipel au début de l’année prochaine et d’y poser pied à terre. Est-ce que c’est une bonne initiative ?
Oui, et cette éventualité avait été évoquée par le parti Lalit depuis 2010, si je ne me trompe pas. L’État mauricien devra prendre, bien sûr, toutes les précautions nécessaires, car les américains, à Diego Garcia, pourraient riposter, même si cela me semble peu envisageable. Mais avec le Président Donald Trump, tout peut arriver. Cela dit, beaucoup va dépendre du nouveau gouvernement en Grande-Bretagne également. Si les travaillistes l’emportent, avec Jeremy Corbyn comme Premier ministre, la situation pourrait très bien évoluer dans le sens de la résolution des Nations unies en faveur de Maurice. Si jamais Maurice envoie un bateau aux Chagos, il faudrait que tout une « armée » de journalistes locaux et internationaux de tous bords y soient aussi.

Est-ce qu’il y a un recours juridique pour obliger la Grande-Bretagne à partir ?
Par rapport à la résolution onusienne, non, car elle n’est pas contraignante. Maurice peut envisager des mesures « temporaires » diplomatiques et politiques contre le Royaume-Uni, comme une menace de retrait du Commonwealth, celle d’une suspension temporaire des relations diplomatiques avec le Royaume-Uni, etc. Mais, à l’ère de la communication mondialisée, c’est la présence médiatique de Maurice qui est très importante en sus des discussions et visibilité politiques. Maurice devra agir sur les réseaux sociaux aussi, en sus des médias traditionnels.