Il s’est transformé en pompier des recalés du CPE et de l’actuel PSAC. Pourtant, Reshad Sayfoo aurait pu dormir sur ses lauriers. Mais il a choisi un chemin truffé de multiples soucis, « ziska anvi plore parfwa ».
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Que fait donc cet homme lettré, directeur du Vocational Training Institute (VTI), bourré de diplômes, qui a titillé le monde politique, qui aspirait à être ministre, homme d’affaires notable, tranquille dans son coin, fréquentant la mosquée et fait son jummah chaque vendredi sans manquer, et qui tend la main à ceux qui le lui demandent ? C’est un homme qui aurait dû se reposer chez lui, prenant son thé vanillé avec des biscuits, allant faire son shopping tranquillement, mais il a choisi une autre voie, celle des défavorisés. Cela à travers l’éducation technique, celle contre laquelle beaucoup ont des préjugés. « Certains estiment que les sujets techniques sont pour les laissés-pour-compte, les recalés, les ninport. Mais moi, je leur ai tendu la main, c’est un geste du cœur », nous dit Reshad Sayfoo.
Certains estiment que les sujets techniques sont pour les laissés-pour-compte, les recalés, les ‘ninport’ ; mais moi, je leur ai tendu la main, c’est un geste du cœur »
Et il n’a pas eu tort. à force de persévérer, de lutter contre ceux qui nous gouvernent, il s’est donné pour mission de jeter la bouée de sauvetage à ces jeunes qui ont bifurqué pour des raisons multiples. « Si ces jeunes ont échoué au CPE ou autres, est-ce réellement leur faute ? Moi, je ne suis pas un bienfaiteur, mais un Mauricien dans l’âme et je leur dis de venir au VTI. C’est leur chaloupe, car un métier actuellement vaut plus qu’un diplôme », nous dit Reshad Sayfoo.
Au vu du look malheureux extérieur et aussi intérieur du centre technique, on se demande comment cet homme roule une berline flambant neuve… « Depuis 1075, le VTI existe et je bosse comme un âne. Je mène une vie simple et noble, pas de fla fla. L’actuel bâtiment se fait vieux, je le reconnais, et je projette de faire construire un nouveau complexe de 50 000 pieds carrés, avec de nouvelles classes et six nouveaux cours de Niveau 2 Front Office, house keeping, restaurant and bar services, cuisine et surtout un diplôme de niveau 3 en hospitality et management ».
Reshad Sayfoo est d’origine modeste, avec son père qui était chauffeur d’autobus et sa mère femme au foyer. Les deux sont illettrés. Il a cinq frères et une sœur. « L’éducation que mes parents n’ont pas eue, ils nous l’ont offerte jusqu’à l’université et c’est un peu pour cela que je sens que je dois quelque part à mes parents de rendre ce que j’ai obtenu à des jeunes recalés pour les sauver des aléas de la vie et leur donner la chance de reprendre un nouveau départ dans la vie. » Un frère qui vit à Londres a été pour beaucoup dans l’ascension de la fratrie et chacun a tracé son destin.
On se souvient du combat de Reshad Sayfoo pour que les élèves du VTI puissent avoir le pass du transport gratuit. « Je me suis battu, me mettant à dos plusieurs ministres, mais pour moi, il était injuste pour des parents des cités et des enfants défavorisés de payer l’autobus pour venir au centre, alors que des enfants bien lotis voyageaient gratos ? Où était la logique ? »
Ces délaissés sont devenus des mécaniciens, électriciens, plombiers, avec des métiers qui les feront vivre, alors qu’ils étaient voués à traîner dans la rue »
Il se dit fier et heureux que tout soit rentré dans l’ordre et surtout que ses étudiants aient trouvé du travail dans des secteurs très demandés. « Ces délaissés sont devenus des mécaniciens, électriciens, plombiers, avec des métiers qui les feront vivre. J’en suis heureux. Alors qu’ils étaient voués à traîner dans la rue, aujourd’hui ils volent de leurs propres ailes, sans honte. »
Quel regard jette-t-il sur le PSAC ? « En éliminant l’A+, c’est le nombre de candidats qui obtiendront le Grade 1 qui va augmenter, soit ceux qui obtiendront entre 75 et 100 points. »
Quid des critères d’admission ? « La ministre a déclaré que les critères pour un collège seront déterminés par le choix des parents, les résultats obtenus et la proximité de la résidence. Il y a problème, car dans une même zone, deux candidats peuvent obtenir l’un 75 points et l’autre 90 points, mais celui avec 75 points réside à côté du collège. Peut-il avoir préséance sur l’élève ayant obtenu 90 points ? »
Cet homme, qui n’a pas sa langue dans sa poche, estime que si tout le monde se penchait un peu plus sur le fond de notre système d’éducation, sur les laissés-pour- compte de notre société, « ceux-là qui sont lésés même pour des postes qualifiés de médiocres », sur le cri du cœur du petit peuple, entre autres, on aurait un pays où il ferait bon vivre. « Mais je doute fort que tout cela change. Moi, je mène mon combat depuis 1975, pour des démunis que la société n’a pas gâtés. C’est mon apport personnel, comme un père pour ses enfants. »
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