Les mesures annoncées mardi dans le discours du Budget permettront-elles à l’économie mauricienne de rebondir ? La question était débattue ce jeudi dans l’émission « Au cœur de l’info ». Florence Alexandre et Prem Sewpaul recevaient en studio Pierre d’Unienville et Adil Aboobakar. François de Grivel, Jean Michel Pitot et Jean Claude de l’Estrac sont également intervenus.
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Coup de pouce au pouvoir d’achat
Pierre d’Unienville, directeur exécutif de Kick Advisory Services, avance que le Budget présenté mardi par le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, mise sur une relance de la consommation. « Il y a beaucoup de mesures ‘feel good’ pour les citoyens. Le but est d’encourager les consommateurs à dépenser plus pour faire redécoller l’économie. » L’augmentation de la pension de retraite et la prime mensuelle de Rs 1 000 accordée à 350 000 salariés vont dans ce sens, selon lui.
Adil Aboobakar, Head of Business Development de Providentia Asset and Fund Managers, partage cet avis. « Nous constatons une volonté du gouvernement d’aider les consommateurs à rétablir leur pouvoir d’achat », dit-il.
Des freins au développement
Le port de Maurice pourrait devenir un pilier de l’économie mais son potentiel n’est pas suffisamment exploité, estime Pierre d’Unienville. « C’est déplorable de voir que les bateaux et les grandes lignes maritimes préfèrent aller à La Réunion au lieu de venir chez nous. Il fallait injecter plus d’argent dans le développement du port. »
Il pense aussi que le Budget aurait pu contenir plus de mesures pour accompagner le secteur du tourisme. Pierre d’Unienville fait ressortir que si les Maldives ont dépassé Maurice en termes d’arrivées touristiques, c’est principalement en raison du retard de la réouverture des frontières. Aujourd’hui, « l’assouplissement des restrictions sanitaires permettrait d’attirer plus de visiteurs. Il faut abolir le port du masque et éliminer la limite de 50 personnes pour les événements », préconise-t-il.
En ce qui concerne le secteur des services financiers, Adil Aboobakar soutient que les opportunités sont nombreuses. « Il y a un engouement de la part des étrangers pour investir à Maurice », soutient-il.
Emploi : les Mauriciens d’abord
Adil Aboobakar estime qu’au lieu d’inciter des étrangers à venir travailler à Maurice, ce serait mieux d’employer les Mauriciens et de les former grâce à des programmes de mentorat. « Nous avons aujourd’hui accès à des informations qui n’étaient pas disponibles il y a 30 ans. Donc, je pense que nos jeunes ont déjà les capacités », dit-il. Par ailleurs, souligne-t-il, la Mauritius Investment Corporation lancera un Capital Venture Fund pour financer des projets innovants portés par des jeunes entrepreneurs.
Plus vert mais pas assez
Pierre d’Unienville trouve que l’accent mis sur l’embellissement du pays et le développement des énergies renouvelables est louable, mais que le chemin à parcourir est encore long pour en arriver au stade d’économie durable. « Les incitations pour acquérir des voitures électriques sont intéressantes. Cependant, on a besoin de bouger plus rapidement vers la consommation d’électricité propre, », dit-il.
Jean Michel Pitot, CEO du groupe Attitude : «Challenging mais possible d’atteindre 1,4 million de touristes en un an»
Le CEO du groupe Attitude souligne que l’hôtellerie connaît une reprise depuis quelques mois. « Nous sommes très satisfaits. Les mois d’avril et mai ont été très bons. » Juin, juillet et août s’annoncent plus compliqués. « Mais c’est normal car c’est la basse saison. À partir de septembre, les recettes augmenteront davantage. Jusqu’à la fin de l’année 2022, l’industrie devrait faire une bonne performance en général », prévoit-il.
D’ailleurs, il pense que Maurice pourra accueillir 1,4 million de touristes pendant l’année financière 2022/2023, comme prévu par le ministre des Finances. « Cet objectif est challenging mais c’est possible », dit-il. En outre, il observe que les touristes dépensent plus dans les hôtels. « Nous bénéficions du ‘revenge travel’. Les Européens, par exemple, ont économisé pendant la pandémie et, désormais, ils dépensent plus que d’habitude pour les voyages », explique-t-il.
L’augmentation du budget de la Mauritius Tourism Promotion Authority, poursuit-il, permettra d’investir dans les programmes de promotion sur différents marchés. Cependant, il estime nécessaire d’ouvrir davantage le ciel pour augmenter le nombre de sièges et donc d’arrivées.
Enfin, Jean Michel Pitot précise les hôteliers font actuellement face au même problème que les usines : « Le manque de main-d’œuvre est un gros souci. »
François de Grivel, industriel : «Aucune mesure pour faciliter l’emploi des travailleurs étrangers»
Pour François de Grivel, le Budget 2022/2023 est avant tout un budget pour les consommateurs. « La stratégie est de redynamiser la consommation pour remplir les caisses de l’État. » L’industriel concède que Maurice est dans une situation économique difficile. « Cependant, dans le secteur manufacturier, les activités sont plutôt favorables. Il y a une augmentation des ventes et même une hausse des commandes pour les mois à venir. »
Toutefois, il trouve déplorable que le Budget ne contienne aucune mesure pour faciliter l’emploi de travailleurs étrangers. « Tous les opérateurs du secteur industriel font face à un manque de main-d’œuvre. Sans nouveaux employés, on ne pourra pas atteindre nos objectifs. Il faut accélérer les formalités d’embauche », réclame François de Grivel. Alors que 35 000 travailleurs étrangers sont présents à Maurice, il indique « le secteur manufacturier a besoin de 3 000 à 6 000 travailleurs supplémentaires. »
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