Les propositions autour de la réforme électorale datent depuis plus d’une vingtaine d’années. Cependant, les partis politiques traditionnels n’arrivent jamais à se mettre d’accord sur la formule à adopter. Tout reposerait autour de la problématique de la proportionnelle.
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«Une réforme électorale avec une dose de proportionnelle tout en laissant intacte la formule actuelle de First Past The Post (FPTP) ne change pas grand-chose dans le fond. Cela pourrait certes corriger certaines anomalies, mais pas plus ». C’est l’avis partagé par l’avocat et expert en matière de constitution, Milan Meetarbhan, sur la déclaration du Premier ministre. Pravind Jugnauth, qui intervenait, mercredi lors d’une cérémonie officielle marquant les 20 ans d’autonomie de Rodrigues au stade de Camp-du-Roi, a fait état de la nécessité de procéder à une réforme du système électoral à Maurice. Le chef du gouvernement s’est aussi exprimé sur le système de proportionnelle. Même si cette formule n’existe pas dans le système électoral mauricien, il est cependant déjà en application dans le système électoral de Rodrigues. Sauf que la formule de proportionnelle à Rodrigues est source d’instabilité, selon Pravind Jugnauth. C’est aussi en ce sens que s’était exprimé son père, sir Anerood Jugnauth.
La dose de proportionnelle proposée par le Mouvement socialiste militant (MSM) en 2018 avait été un des désaccords fondamentaux entre l’opposition et le gouvernement. Le MSM avait proposé que 12 députés soient élus à la proportionnelle et qu’ils soient désignés par la Commission électorale à partir d’une liste de 24 candidats choisis par les leaders politiques. Aussi, pour qu’un parti soit éligible à cette formule de proportionnelle, il avait été proposé qu’au minimum 10 % des voix au suffrage universel devaient avoir été récoltés.
Le Mouvement Militant Mauricien (MMM) et son leader, Paul Bérenger, s’étaient fortement opposés à cette formule. Le leader mauve l’avait d’ailleurs qualifiée de « galimatia ». Il avait souligné que le but d’une réforme est de corriger les défauts du FPTP sauf que ce qu’avait proposé le gouvernement était « de maintenir le système ».
Ainsi, selon Milan Meetarbhan, la formule de Pravind Jugnauth veut que l’issue des élections générales soit toujours déterminée par le FPTP. « À ce moment-là, une dose de proportionnelle vient juste corriger quelques inégalités. Il faut savoir que dans certains pays, les élections ont sur lieu sur la base de proportionnelle », explique l’avocat.
Votes perdus
Commentant la formule proposée par la défunte alliance Parti travailliste (PTr)/MMM avant les élections générales de 2014, Milan Meetarbhan avance qu’elle avait été grandement inspirée des propositions de l’ex-ministre des Finances, Rama Sithanen. « Cela consistait aussi à garder la formule de First Past The Post et on aurait ajouté un certains nombres de députés sur une formule qui allait tenir compte des votes perdus. Pour le moment, les votes recueillis par un candidat classé à la quatrième place est considéré comme un « waste vote ». Ainsi, la formule Sithanen voulait prendre en compte « ces votes perdus » pour allouer des sièges additionnels », dit l’intervenant.
Ainsi, face à autant de divergences fondamentales sur cette question hautement sensible politiquement, Milan Meetarbhan soutient qu’il faut avoir un consensus national avant de changer quoi que ce soit. « Il faut justement que toute proposition présentée au Parlement fasse l’objet de consultations et de négociations. Surtout lorsque c’est le parti au pouvoir qui fait des propositions concernant le système électoral. Passer par un référendum afin d’avoir une plus large consultation serait idéal », ajoute-t-il.
Commentant les propos de Pravind Jugnauth à l’effet que l’opposition n’avait pas soutenu sa proposition de réforme électorale en 2018, Milan Meetarbhan soutient que c’est « injuste » de mettre « cet échec sur le dos de l’opposition » et prend ainsi le soin de rappeler au chef du gouvernement que le MSM n’avait pas accepté les propositions d’un comité indépendant en 2001 sur la réforme électorale.
« Formule un peu spéciale »
Dev Sunnasy, membre de Linion Pep Morisien, estime, lui, que la formule de proportionnelle proposée par Pravind Jugnauth est « un peu spéciale ». « Cela a été pondu par sa cuisine. Il doit apprendre que, dans d’autres pays, un système de proportionnelle peut changer les résultats d’une élection. C’est cela la démocratie », fait-il ressortir. D’ajouter que le système actuel convient au final aux partis politiques traditionnel comme le MMM, le PMSD et le PTr. « Est-ce qu’il y a eu un parti qui a rédigé un document sur la réforme électorale récemment ? La réponse est non. Sak lane zot dir pou vini mem. Mais LPM a produit un document avec des propositions concrètes sur la réforme électorale », avance-t-il.
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