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Réforme électorale : ça passe ou ça casse

Réforme électorale
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À 22 heures lundi soir, 28 élus avaient pris la parole sur la proposition de réforme électorale du gouvernement. Il restait encore huit orateurs sur la liste avant d’en arriver à l’instant de vérité.

En parallèle, les échos qui viennent du côté du gouvernement indiquent qu’on est prêt à assouplir sa position afin d’obtenir au moins le soutien du Mouvement militant mauricien (MMM), ouvertement courtisé par les orateurs du gouvernement lundi, pour atteindre la majorité de trois quarts des votes requise, avec le soutien de l’Organisation du peuple rodriguais. Une formule de 14 sièges sous la représentation proportionnelle (RP), plus six sièges additionnels pour atteindre le minimum de 20 demandé par le MMM, pourrait ainsi être proposé.

Le projet de réforme électorale propose de se défaire du Best Loser System (BLS) et de l’obligation de déclarer son appartenance ethnique pour être candidat aux élections. Le BLS serait ainsi remplacé par les six sièges additionnels dont les occupants seraient désignés par les leaders politiques eux-mêmes. Ces sièges serviraient aussi à rétablir l’écart du nombre de sièges entre la majorité et l’opposition parlementaire. 

Le projet de loi comprend également des mesures anti-transfuges et un mécanisme en faveur de la représentativité féminine.

Nando Bodha : «Je lance un appel au MMM»

nandoLe ministre du Transport et des infrastructures publiques, Nando Bodha, a lancé un appel directement au Mouvement militant mauricien (MMM) pour qu’il vote en faveur du projet de réforme électorale. « Je lance un appel au MMM. Ils (les mauves ; NdlR) ont été consistants sur la réforme électorale comme sur beaucoup de sujets. Tout ce qui nous sépare, c’est le calcul des sièges à la proportionnelle », a-t-il déclaré vers la fin de son discours.

Il a poursuivi son argument en avançant que le système électoral parfait n’existait pas et que la représentativité des femmes, les mesures anti-transfuges et l’augmentation du nombre de députés de Rodrigues à trois étaient des avancées que le MMM devrait soutenir malgré les imperfections. « Qui peut le plus, peut le moins », a dit le ministre.

En commentant les propositions faites plus tôt par Alan Ganoo, Nando Bodha a déclaré : « Nous savons que nous n’avons pas les trois quarts pour voter la loi, mais nous voulons faire passer cette loi. »

Nando Bodha a aussi défendu la stabilité que le First-Past-The-Post apporterait au système politique. Il estime que le ratio élevé d’élus par habitant est nécessaire pour la politique de proximité qu’exige le contexte mauricien.

Le ministre a expliqué que le système proposé par le gouvernement pour les sièges à la proportionnelle étaient un mélange de vote parallèle et de vote compensatoire. Un système de comité de sages ou l’implication de la Commission électorale ou du Président ont également été envisagés pour remplir les six ou 10 sièges additionnels, mais cela n’a pas été retenu.

Ravi Rutnah : «Nous sommes une seule communauté»

Ravi Rutnah a fait ressortir que les députés ne représentent pas leur communauté mais leurs mandants et leurs circonscriptions. Parlant du Best Loser System (BLS) introduit par les Anglais, le député de la majorité a lancé : « Pensez-vous que cela avait été fait pour rendre le pays plus stable ? » Pour lui, le but initial du BLS était d’instaurer la stabilité et de contrer la stratégie de divide and rule des Britanniques.  Il a fustigé les députés Mohamed, Duval et Uteem, qui ont, selon lui, parlé en termes de communauté alors que la majorité prône le « nation building ». « Pour moi, nous sommes une seule communauté », a-t-il souligné.

Shakeel Mohamed a soulevé un Point of Order pour démentir l’allégation selon laquelle lui et Arvin Boolell représenteraient une communauté spécifique. Mais le Deputy Speaker, Joe Lesjongard, a rejeté la demande. Adrien Duval a alors répliqué. Mais le Deputy Speaker a maintenu le refus d’accéder à la demande.

Ravi Rutnah a poursuivi son intervention. Il a qualifié Shakeel Mohamed « d’aboyeur de service » de Ramgoolam, avant de retirer ses propos.

Reza Uteem : «Pas de compromis sans garantie sur la représentation de toutes les composantes»

rezaReza Uteem a pris la parole juste après Nando Bodha. Il lui a ainsi donné la réplique après l’appel lancé par ce dernier au MMM pour voter en faveur du projet de réforme électorale. Si Reza Uteem a reconnu que le MMM était d’accord sur la majorité des changements qu’apporte cette loi, la position de son parti et du gouvernement seraient irréconciliables sur le mode d’élection des sièges à la proportionnelle.

Reza Uteem a expliqué ce que Paul Bérenger avait voulu dire que le MMM pouvait voter en faveur de la loi « under protest » même en n’étant pas d’accord sur certains points. « Sur la proportionnelle, il y a la possibilité de compromis », a-t-il indiqué. Toutefois, c’est la garantie au sujet de la représentativité des minorités qui bloquerait le vote du MMM.

« Le MMM ne fera jamais de compromis avant d’être sûr de la représentation juste et équitable de toutes les composantes de la population », a affirmé Reza Uteem. La réforme électorale élimine le First Schedule de la Constitution, qui dit qu’il faut une garantie de la représentation de toutes les composantes de la société mauricienne à l’Assemblée nationale. L’amendement proposée n’en fait aucune mention.

Le député du MMM a utilisé le terme « non-réforme » pour qualifier la proposition de rétablir la majorité par six à 10 sièges additionnels après l’allocation des sièges à la proportionnelle. « Donner c’est donner, reprendre c’est voler. Le gouvernement donne des sièges au PR pour ensuite les reprendre. »

Il a également donné l’exemple des deux hung parliaments au Royaume-Uni pour nier la stabilité qu’est censé apporter le système de First-Past-The-Post. Cette stabilité serait plutôt due, selon lui, à la culture d’alliances pré-électorales à Maurice.

Aurore Perraud : «On ne peut voter une réforme à la veille des élections»

aurore«On ne peut voter une réforme électorale, à la veille des élections. » Propos d’Aurore Perraud au Parlement lundi soir. Selon Aurore Perraud, les amendements proposés ne changeront pas le système. « On nous demande de remplacer le BLS par un système qui sera entre les mains d’un leader politique. Ceux qui dénoncent le communalisme, sont les miroirs du communalisme, par lâcheté. » Elle approuve cependant l’idée d’assurer une meilleure représentativité féminine.

« Il faudrait introduire la discrimination positive, comme cela se fait en Inde. Il faudrait changer l’appellation ‘population générale’. Les jeunes veulent une société plus juste où prévaut la méritocratie. Qu’en est-il de la discrimination dans la Fonction publique ? À chacun ses valeurs pour décider s’il faut voter ou non. »

Le ministre Eddy Boizzeson s’est interrogé sur les sources évoquées par l’élue. Anil Gayan, lui, a réclamé la publication de la liste du secteur privé. Mouvement d’agacement au sein de l’opposition. « Zot pa payer ek largen publik sa ! » Aurore Perraud d’en rajouter : « le ministère de la Jeunesse et des Sports compte des fonctionnaires d’une seule communauté. Le BLS a fait ses preuves, il faut passer à autre chose, plus juste. Hélas, le pays n’est pas prêt au changement vu que la méritocratie ne prévaut pas. »

Salim Abbas Mamode devait interrompre les débats, affirmant que le ministre Anwar Husnoo le traitait de « Bachara ».

Ashit Gungah : «Le MSM et le MMM ont toujours été sérieux sur la réforme électorale»

L’intervention du ministre du Commerce et de l’Industrie sur le Constitution (Amendment Bill) a été marquée essentiellement par plusieurs clins d’œil au Mouvement Militant Mauricien (MMM). « Le MMM et le MSM ont toujours été sérieux sur la réforme électorale », a-t-il déclaré. Il a aussi fait ressortir que c’est pendant la période 2000-2005 qu’il y a eu les toutes premières avancées sur la réforme électorale, après la parution d’un premier rapport. « On n’a malheureusement pu trouver un consensus mais c’était les premiers pas vers la réforme électorale », a-t-il déclaré. Le ministre, a en revanche été plus critique vis-à-vis du Parti Travailliste (PTr) et du Parti Mauricien Social-Démocrate (PMSD) qui n’ont rien réalisé en ce sens, selon lui. « Entre 2005 et 2014, le Parti Travailliste et le PMSD ont produit plusieurs rapports sur la réforme électorale mais qui n’ont pu être traduits en un projet de loi », a déploré le ministre.  Selon Ashit Gungah, il est grand temps de réformer le système électoral. « Ce projet de loi, va consolider notre démocratie. Il nous faut commencer quelque part », a-t-il ajouté.

Duel Mohamed – Gayan

Shakeel Mohamed et Anil Gayan.
Shakeel Mohamed et Anil Gayan.

Dérapage évité à l’Assemblée nationale. C’était lors du discours du ministre du Tourisme Anil Gayan. Le ministre a voulu répondre au député Shakeel Mohamed qui l’avait accusé de faire le lien « bizarre » entre sa communauté et son poste de chef de file du Parti Travailliste au Parlement.

Le député rouge devait l’interrompre lorsqu’il a parlé du leadership du parti. La Speaker a fait comprendre à Shakeel Mohamed que c’est lui qui a ouvert le débat. Négatif, devait répondre le député car selon lui, il était revenu sur un discours du ministre qui avait fait allusion à sa communauté en faisant le lien avec son poste au Parlement. Par contraste, Anil Gayan ne cessait de citer les interviews de Shakeel Mohamed au sujet du leadership du parti. Ce dernier l’a fait comprendre à la Speaker en lui lançant : « Je ne suis pas d’accord avec vous madame et je vous le dis poliment. » La séance a alors été interrompu pour environs 45 minutes, le temps que la Speaker aille revoir les procès-verbaux de la séance de vendredi dernier.

Pendant ce temps, les groupes se forment dans la Chambre. Raj Dayal, entre autres vient féliciter Anil Gayan et, de l’autre côté, le Premier ministre se lève pour avoir une discussion avec le ‘Chief Whip’ et le ‘Deputy Speaker’. 

À son arrivée, Maya Hanoomanjee n’a sanctionné personne. Elle a soutenu que le ministre peut répondre aux arguments du député mais elle met en garde les membres de la Chambre. « Je demande aux membres de ne pas faire d’attaques personnelles. »

Le discours de Reza Uteem relance le consensus

La dernière position affichée par le Mouvement Militant Mauricien (MMM) à travers le député Reza Uteem a été favorablement accueillie par le gouvernement. « L’intervention de Reza Uteem au Parlement (voir texte plus loin) démontre qu’il y a une volonté politique pour aboutir à la réforme électorale », nous a fait part une source bien placée à l’Hôtel du gouvernement, lundi soir. Cette même source renouvelle le souhait émis par le gouvernement d’apporter des amendements au projet de loi pour introduire une dose de représentation proportionnelle de 14 députés au lieu de 12. En revanche, le gouvernement n’entretient aucun espoir en ce qu’il s’agit du Parti Mauricien Social-Démocrate et le Parti Travailliste. Les discours des élus de ces deux partis politiques ont clairement fait comprendre qu’un consensus est impossible.

Alan Ganoo : «Il faut sauver la réforme électorale»

Le président du Mouvement Patriotique (MP), Alan Ganoo, a été on ne peut plus clair sur le projet de loi sur la réforme électorale. Il a hier lors de son intervention au Parlement, demandé au Premier ministre d’instituer un Select Committee qui reviendra avec de nouvelles propositions. « Il nous faut sauver la réforme électorale », a-t-il dit. L’élu de la circonscription No 14 (Savanne/Rivière-Noire), s’est particulièrement montré critique sur le seuil d’éligibilité à la proportionnelle qui est de 10 %. Il faut, selon lui, ramener ce chiffre à 5 %. Alan Ganoo, a aussi déploré  que cette réforme électorale, va causer un plus grand déséquilibre entre le nombre de votes recueillis dans une élection à travers le First Past The Post (FPTP) et le pourcentage de vote.

Sudesh Rughoobur : «Je n’ai pas été élu en fonction de ma communauté»

« La population ne m’a pas choisi en raison de mon appartenance ethnique. » Sudesh Rughoobur a rappelé les des leaders politiques qu’ils ne créeront jamais de système parfait. Il a évoqué trois points essentiels du texte : « La stabilité, la justesse et un équilibre approprié ». Le système électoral actuel a contribué à la transformation du pays, à son développement et sa stabilité. La maturité de notre électorat a fait que j’ai été élu par des voix issues de diverses communautés. « Ce projet de loi apportera un plus à notre système électoral ».

Dan Baboo : «Le MSM n’a jamais voulu changer ce système»

« Cette loi ne va pas agrandir l’espace démocratique dans le pays. » Dan Baboo, du PMSD est convaincu que les majorités des années 1970 ne le sont plus aujourd’hui. Il a tenté de convaincre la chambre qu’un recensement ethnique était nécessaire car la démographie a évolué depuis 1972. « Le MSM n’a jamais voulu changer ce système qui était en sa faveur. »  

Kavi Ramano : «Il n’est pas trop tard pour des consultations»

Le député indépendant rejette le projet de loi sous sa forme actuelle. Toutefois, il a fait comprendre que des amendements peuvent, encore être apportés. « Il n’est pas trop tard pour des consultations. » Il fait comprendre qu’il faut revoir le système dans le fond. Le First past the post est, selon lui, un problème avec des effets « pervers ». Il estime qu’avec ce système les alliances électorales sont obligatoires et parfois des « alliances contre nature » prennent naissance.

 

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