À l’occasion d’un rassemblement à Rose-Hill, plusieurs intervenants ont plaidé pour la légalisation du cannabis et la révision d’une loi jugée obsolète sur les substances dangereuses.
Ils étaient peu nombreux ce dimanche, à Rose-Hill. Mais leurs voix portaient loin. Réunis autour du thème « Ki la lwa kanabis pou lil Moris ? », militants, sportifs et professionnels de santé ont plaidé pour la légalisation du cannabis. Leur argument principal : cette plante ne causerait aucun mal, ni effet secondaire, car elle serait naturelle, contrairement aux drogues synthétiques, présentées comme responsables d’états de dépendance sévère.
Micro en main, une femme s’avance, le visage marqué. Elle témoigne de la situation de son fils, tombé dans la drogue synthétique. « Mo demann gouvernma pran kont, bann zenes pe fini, mo garson finn rant ladan ek pa kapav sorti mem si li anvi. Toulezour mop lore, ena lezot mama ki kouma mwa… » Elle poursuit : « Bann zenes pe vinn kouma zonbi, zot pa travay… Ladrog simik pli danzere ki gandia, ki enn fey natirel. Mo espere ki mo bann parol finn tande. »
Son témoignage donne le ton de ce rassemblement organisé par Percy Yip Tong, militant engagé qui a réuni plusieurs activistes pro-cannabis et des professionnels favorables au cannabis médical. L’événement coïncidait avec les 25 ans de la mort du chanteur Kaya, figure de proue de ce combat. Entre chansons et interventions, Percy Yip Tong affirme : « Il faut légaliser le cannabis, car il n’est pas toxique, contrairement aux drogues synthétiques. »
Un autre témoignage marquant est celui de Ranini Cundasamy. Spécialiste du Kun Khmer et du Muay Thai, deux fois championne du monde en Kun Khmer et quatre fois championne du monde en Muay Thai, elle évoque son parcours. Enfant de la Résidence Barkly à Beau-Bassin, elle explique que la drogue circulait librement dans son quartier. « La plupart du temps, je ne sortais pas, sauf pour aller au collège ou pour des besoins spécifiques. À chaque coin de rue de la cité, il y avait des drogués, souvent très jeunes. » Le sport devient alors son échappatoire.
Installée ensuite à Bambous avec son mari Patrick, elle dit avoir constaté « des jeunes, et surtout des adolescents, pour qui l’oisiveté était devenue une deuxième nature ». Le couple ouvre alors un centre de formation pour offrir gratuitement des cours de Kun Khmer et de Muay Thai.
Selon elle, l’initiative portait ses fruits jusqu’à son départ en Thaïlande pour s’entraîner. « J’ai été bloquée là-bas à cause du COVID et j’étais logée dans un centre résidentiel. » À son retour, elle dit avoir été surprise : « La plupart de ceux que nous avions formés et soutenus étaient tombés dans la drogue synthétique. Je ne les reconnaissais plus. »
Le couple décide néanmoins de poursuivre son action. « Le comble, c’est que ces jeunes qui étaient nos élèves auparavant sont revenus vers nous, mais ils n’avaient plus la même dextérité. Ils avaient honte, car ils savaient qu’ils étaient en tort. »
Son expérience thaïlandaise nourrit également sa réflexion : « Au centre, des sportifs infusaient le cannabis pour leur bien-être et non pour ‘gagn nisa’. Selon eux, le cannabis a plusieurs avantages pour les sportifs. » Son message aux jeunes : « Faites du sport, même si vous rencontrez des obstacles, ‘kraz ladan mem’. »
Une loi jugée « archaïque »
Dev Ramano apporte une autre perspective au débat. « Je suis pour la légalisation, bien que je n’en sois pas un consommateur. » Il estime que « ceux qui demandent des preuves que le cannabis a des vertus sont des hypocrites » et considère que le sujet « fait peur ».
Il juge également que la politique de répression actuelle s’est révélée insuffisante. Selon lui, la classification du cannabis sous le Dangerous Drugs Act relève d’ « une loi archaïque qu’il faut revisiter ».
Plusieurs intervenants se succèdent ensuite : Raouf Khodabacus, Ras Naty Baby, Natacha Rose, Jacques Achille, Heman de l'ONG 420, Sunny Shiva et Kathy, jeune militante. Parmi eux, la prise de parole d’Azaria, fils de Kaya, retient l’attention : « Simik finn pran lanpler ek pe touy nou bann zenn zanfan, li vann dan tou kwin simin, gramatin, midi ek aswar. Bizin legaliz gandia pou anpes ladrog sintetik, ek donn drwa plante pou konsomasion personel. »
Enfin, le chanteur engagé Nitish Joganah interpelle ceux qui s’opposent à la légalisation : « Mettez vos enfants dans une pièce avec du cannabis et du ‘simik’, là vous saurez. » Reste à déterminer si ces voix, bien que peu nombreuses, parviendront à s’inscrire dans le débat national.
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