People

Raj Sookun, nommé à l’ONU: le charretier devenu diplomate

Raj Sookun, l’actuel chef de protocole, assumera à la fin du mois le poste de Deputy Permanent Representative de Maurice au bureau de l’Organisation des Nations unies, à Genève. Portrait d’un commis de l’État hors du commun. Jamais une mutation au sein du service diplomatique n’aura suscité une telle réaction. Supérieurs hiérarchiques, collaborateurs et subordonnés se désolent de son départ. Affable mais surtout humble, Raj Sookun est l’homme-orchestre derrière les visites des chefs d’Etats et des gouvernements. D’ailleurs sa bible, confie-t-il, est la liste de préséance protocolaire qui ne le quitte jamais. « Mem si mo dan karo ek mo gagn enn kout telefonn, mo la liss ek mwa », assure-t-il. Raj Sookun se distingue aussi pour son sens de professionnalisme et sa disponibilité, même pour la presse. Le futur Deputy Permanent Representative de Maurice au bureau de l’Organisation des Nations unies, à Genève – il prend son poste fin de juillet – se dit fier de son parcours, n’étant pas né avec une cuillère en argent à la bouche. « Je n’ai aucune honte à le dire, nous étions très pauvres. Nous vivions dans une maison avec un toit en chaume et le sol recouvert de bouse de vache », lance-t-il. Son père, Indur, était un charretier et sa mère Dhanon, femme au foyer. D’ailleurs, plaisante-t-il, encore un peu et il voyait le jour sur de la paille. « Je suis né le 12 mars 1968. Ma mère devait aller couper de l’herbe pour nourrir les animaux. » Naître le jour même où l’île Maurice devenait officiellement indépendante est une grande fierté pour Raj Sookun, Rajkumar pour l’État civil. Il est le cadet d’une fratrie de six enfants. Il n’a pas connu l’opulence, dit-il, mais était entouré de parents visionnaires qui ont permis à leurs enfants d’avoir une éducation de qualité. D’ailleurs, les Sookun sont cités en exemple à Lallmatie.

L’école le matin, le travail l’après-midi

« En fait, c’est grâce à ma mère que j’ai pu aller à l’école car mon père m’avait réquisitionné pour l’aider dans son travail de charretier. Mais ma mère a mis son veto. Ils sont donc arrivés à un compromis : j’irai à l’école le jour et travaillerai les après-midi. » Un arrangement qui n’est pas de tout repos pour le jeune Raj qui, en saison de coupe, doit être à pied d’œuvre dès 2 heures du matin. Mais ce ‘zanfan lindependans’, comme il se plaît à s’appeler, était très mature malgré son jeune âge. « Je ne me plaignais pas car je savais que mes parents n’avaient pas le choix. Grâce à eux, le dur labeur ne me fait pas peur. » En dépit de ses responsabilités additionnelles, il brille à l’école du gouvernement de Lallmatie, passe le cap de la ‘petite bourse’,  intègre la Junior Secondary School de Flacq et complète le Higher School Certificate au collège Ramparsad Neerunjun. Avec des résultats plus qu’honorables, il a la chance d’être accepté à l’université de Maurice. « J’avais choisi de faire un BSc en Pure Science et Environment Science. Ma chargée de cours était l’actuelle présidente de la République, Ameenah Gurib-Fakim. Cela a été un pur plaisir de décrocher mon diplôme sous sa férule », dit-il avec fierté. Fraîchement émoulu de l’université en 1991, Raj Sookun peine à trouver du travail. Mais qu’à cela ne tienne, il y en a un qui l’attend. « Il n’y a pas de sot métier. C’est sans honte et plutôt avec honneur que j’ai continué à être charretier aux côtés de mon père, avec mon diplôme en poche. » Il fera par la suite un bref passage dans une compagnie d’assurances, enseignera quelque temps avant d’intégrer le ministère des Affaires étrangères en tant que second secrétaire en 1993. En 23 ans de carrière, Raj Sookun a assumé les responsabilités de Chef de Protocole en plusieurs occasions. De second secrétaire, il a gravi les échelons avec ténacité et a aussi servi le pays à l’étranger notamment à Beijing, où il a lui même installé notre représentation, Washington, Pretoria et Mumbai, entre autres. Ses moments forts sont nombreux. Parmi, les visites du Premier ministre indien Sri Narendra Modi, du président du Ghana, John Mahama et du secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki Moon.

L’influence de SSR

Raj Sookun soutient aussi avoir été très marqué par le père de la Nation, sir Seewoosagur Ramgoolam (SSR). « Je lui dois beaucoup car c’est grâce à l’éducation gratuite que j’ai pu aller à l’école. Quand j’ai eu un an, j’étais parmi la cinquantaine de bébés qu’il avait conviés à l’hôtel du Gouvernement pour marquer la première année de l’indépendance », indique-t-il. Il a pour seul regret que SSR soit décédé avant que le pays n’atteigne ses 18 ans d’indépendance. Concernant sa mutation, notre interlocuteur soutient que celle-ci dans la vie des fonctionnaires est normale. « Il faut juste donner le meilleur de soi où que nous soyons postés. » Marié à Kavita, Raj Sookun est père de deux fils, Harish et Darshan.
Publicité
 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !