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Qui suis-je ? : À 27 ans, sans acte de naissance, sans carte d’identité et pas reconnue par l’État civil

Belinda et sa soeur Rachel.

C’est le récit d’une jeune femme qui, depuis 20 ans, vit sans identité. N’étant pas reconnue par l’État, elle est privée de ses droits civils les plus basiques. Elle ne peut pas travailler et se marier. Sa sœur est dans la même situation. Leur histoire est comme un puzzle. Pour voir plus clair, il faut mettre une pièce à la fois. 

Belinda Maria Schwering, âgée aujourd’hui de 27 ans, est arrivée à Maurice à l’âge de 6 ans. Depuis deux décennies, elle mène une existence qui ne ressemble à aucune autre. Mais, peut-on parler de vie quand on n’a pas de pièce d’identité ? Sa grande sœur se retrouve dans le même cas. Pour comprendre leur histoire, il faut retourner sur celle de leurs ancêtres. Les parents de leur mère sont des Mauriciens qui sont partis en Afrique pour travailler. Ils ont eu une fille qui est née en Zambie et c’est ainsi que la maman de Belinda détient aussi la nationalité mauricienne. Plus tard, elle rencontre un Allemand et l’épouse. Le couple, installé au Botswana a deux filles, Belinda et sa sœur.

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Quand leurs filles atteignent l’âge de 6 et 8 ans respectivement, le couple décide, peut-être à la demande de la grand-mère dont le mari est décédé sur le sol africain, de quitter le Botswana pour venir vivre à Maurice. Toute la famille s’installe à Grand-Baie et les filles fréquentent l’école du gouvernement de Cap-Malheureux. Elles poursuivent leurs études secondaires, mais Belinda n’ira pas au-delà de la Grade 7, tandis que sa sœur s’est arrêtée à la Grade 9. 

« Nous avons commencé à avoir des soucis parce que nous n’avions pas de papiers. Je n’avais même plus mon acte de naissance avec moi », explique Belinda. Les problèmes ont commencé à cause du départ de son père. « Il est resté à Maurice à peine quatre ou cinq mois. Ensuite, il a pris tous nos documents et il est parti pour l’Allemagne en nous disant qu’il allait entamer des démarches afin qu’on vienne le rejoindre là-bas. C’était il y a 20 ans. Il est parti pour de bon et n’a jamais donné de ses nouvelles. Malgré toutes nos démarches que nous avons entreprises pour le retracer, on ne l’a jamais retrouvé. Je suis dans l’incapacité de vous dire s’il est encore vivant. On ne sait pas qui est sa famille en Allemagne », raconte Belinda. Sa mère ne peut pas l’aider.  Suite au terrible coup que lui a infligé son mari qu’elle a épousé à 18 ans, elle a perdu ses esprits et s’est recroquevillée sur elle-même.

Démarches impossibles

Pour obtenir une copie de son acte de naissance, Belinda a contacté l’administration de l’école du gouvernement de Cap-Malheureux. « Malheureusement, ils m’ont dit qu’ils n’avaient plus la copie de mon acte de naissance. Je suis entré en contact avec les autorités du Botswana qui  m’ont fait comprendre que mon cas était compliqué, car la clinique où ma mère a accouché a fermé ses portes depuis. On m’a demandé de venir au Botswana en personne, mais je n’ai pas les moyens de m’offrir un billet aller-retour, puisque je ne travaille pas, n’ayant pas le droit de le faire », se lamente-t-elle.

Contrairement à elle, sa sœur ainée est en possession de son acte de naissance, mais cela ne lui est d’aucune aide. « Elle n’a pu avoir sa carte d’identité ni la citoyenneté mauricienne. Comme moi, elle n’existe pas pour l’État », soupire-t-elle.

Belinda s’est rendue au bureau de l’État civil et à celui du Premier ministre pour effectuer des démarches. « Malheureusement, les officiers m’ont expliqué qu’ils ne pouvaient rien faire pour moi. Ils m’ont aussi dit qu’il fallait que j’insiste auprès des autorités du Botswana. À défaut d’obtenir la citoyenneté mauricienne, j’ai essayé de régulariser mon permis de résidence, mais cela coûte. Il faut Rs 2 000 pour entamer les démarches, puis Rs 50 000 (par tête) une fois la demande approuvée. Où est-ce que ma sœur et moi allons trouver autant d’argent ? Nous n’avons aucun revenu », explique la jeune femme. 

Devant l’impossibilité de se marier, Belinda vit en concubinage. Elle a aujourd’hui deux enfants, un garçon âgé de 6 ans et une fille de 2 ans, mais sa vie est loin d’être parfaite. Comment peut-il être autrement quand on n’a pas d’identité ?

Au Prime Minister’s office

Qu’est-ce qui peut être fait pour Belinda et sa sœur ? La rédaction s’est adressée au PMO et voici la réponse qu’elle a reçue : « Toutes deux doivent se rendre de nouveau au Bureau du Premier ministre, plus précisément au Idendity Department, situé au quatrième étage de l’Hôtel du Gouvernement. Elles seront reçues par des officiers qui leur donneront les conseils appropriés sur leur permis de résidence ».

La rédaction a aussi pris contact avec l’administration de l’école du gouvernement de Cap-Malheureux où Belinda avait présenté une copie, voire l’originale de son acte de naissance. « Cela s’est passé au début des années 2000. Malheureusement, nous ne conservons pas les anciens documents dans nos archives. Donc, il nous est impossible de retracer l’acte de naissance de Mme Belinda », a déclaré une responsable de l’administration.

 

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