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Punir

À chaque crime atroce, les voix pour un durcissement des peines se font entendre. Au point où c’est même devenu un réflexe (trop facile) de la part d’une majorité grandissante de Mauriciens. Combien d’entre nous déplorent que « lalwa pa ase sever » ou encore « bizin pendi zot » ? Durcir les peines, voire réintroduire la peine de mort suspendue à Maurice depuis 1995, est la réponse d’une société de plus en plus violente et de moins en moins tolérante. Cette exigence est aussi le reflet de notre société, tout comme le sont les crimes. Certes, il est vrai qu’en à peine une semaine, notre petit pays aura vécu deux drames dépassant tout entendement : le massacre de deux personnes, une retraitée et sa petite-fille de 13 ans, par un amoureux éconduit de 17 ans, et un homme qui s’est vu trancher les deux mains par plusieurs individus. Il est vrai aussi que quelque chose ne tourne définitivement pas rond dans ce pays, quand on constate le degré de violence et le caractère crapuleux de certains crimes. Mais la réponse ne tient certainement pas uniquement dans le durcissement des peines. Les études prouvant que la réintroduction de la peine capitale n’est pas synonyme d’assainissement de la société ne manquent pas. Quand des ministres se mettent eux aussi à vouloir la peine de mort dans notre législation, c’est une fuite vers la « solution » de facilité. Pire, c’est une posture purement populiste, quand on sait que sa réintroduction est quasiment impossible pour des raisons diverses. Certaines sont d’ordre financier. Revenir en arrière équivaut à fermer le robinet des financements d’institutions internationales. Aucun gouvernement ne souhaiterait cela. Puis, Maurice a promis, il y a bien longtemps déjà, de ne plus tuer ses criminels à travers diverses conventions. Revenir sur cette promesse serait, entre autres, une violation des droits humains fondamentaux, au vu des articles 3 et 5 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et ferait de Maurice l’un de ces « états voyous » que la communauté internationale n’aime pas fréquenter. Quid de l’Amérique, direz-vous ? Le moins que l’on puisse dire, c’est que Maurice n’a pas le même poids que la première puissance mondiale et donc pas le même bargaining power. Puis, de très nombreux états américains ont aboli la peine de mort. Ceux qui ne l’ont pas fait se trouvent majoritairement dans le Sud (80 %) et sont justement ceux qui font face à des taux de criminalité nettement plus élevés que les états du Nord, selon des rapports du FBI. La peine de mort n’est pas plus dissuasive que la prison à perpétuité. Quelles solutions alors ? À court-terme, il n’y en a pas vraiment. Sur le long-terme, c’est l’éducation, le savoir-vivre et la tolérance. Mais, ce qu’il faut principalement, c’est une police plus apte à boucler ses enquêtes, à tracer les criminels et surtout à présenter des preuves qui ne pourront être réfutées par tel ou tel avocat talentueux. À cela, il faut ajouter une justice plus rapide. Quand on parle de plus d’efficacité, cela a trait aussi aux petits délits. Il faut que le citoyen sache qu’il sera puni pour ses délits, qu’ils soient petits ou grands. Il doit aussi savoir que la prison n’est pas une sinécure et encore moins un hôtel. Et ce changement de mindset passe évidemment par l’éducation.
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