Economie

Propositions budgétaires 2018-2019 : n’emprunter que pour investir

Tous les ministères et départements publics ont jusqu’au vendredi  6 avril 2018 pour soumettre leurs propositions budgétaires au ministère des Finances. Trois semaines d’intenses branle-le-bas pour peaufiner les chiffres, les stratégies, mais aussi les indicateurs de performance. Le secrétaire financier indique que la devise cette année est : on emprunte seulement pour investir.

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C’est parti pour le grand exercice annuel. Après le coup d’envoi des consultations budgétaires à Rodrigues au début du mois, voilà que le ministère des Finances invite tous les ministères et départements publics à soumettre leurs propositions d’ici trois semaines. Le Budget 2018-2019 sera préparé en tenant compte de deux lignes directrices : emprunter pour ne financer que les investissements et ramener la dette publique à un niveau de 60 % du PIB d’ici à 2020-2021.

Pour y arriver, le ministère des Finances veut que tous les acteurs concernés fassent preuve d’innovation et viennent de l’avant avec des mesures bien articulées et facilement applicables. Plus important, ces mesures doivent être travaillées dans le cadre du plan stratégique triennal et la vision globale du gouvernement.

Contexte

Selon le secrétaire financier, ce Budget sera préparé dans un contexte où l’impact positif et le résultat des deux derniers exercices budgétaires, qui étaient centrés sur une nouvelle ère de développement et la relève des défis majeurs, sont encore visibles. Notre économie montre des signes constants de reprise d'une croissance plus élevée et nous avons fait des progrès concrets dans la lutte contre le problème de la pauvreté absolue et le rehaussement du niveau de vie des familles à faibles revenus. Le gouvernement estime que la prochaine année financière  verra l’amplification du progrès, si nous maintenons une gestion financière saine, d'autant plus que l’économie globale se porte mieux.

Objectifs

L’exercice budgétaire veut cette année privilégier des réformes économiques et sociales plus aptes à amener une meilleure croissance, une rapide création d’emplois et une amélioration de la qualité de vie des Mauriciens, tout en tenant compte des contraintes fiscales. L’ambition est aussi de réaliser un taux de croissance supérieur à 4 %, voire 4,3 % cette année et durant les années à venir.

Alors comment y arriver ? C’est là qu’entre en jeu l’innovation. Le gouvernement veut des propositions facilement « implémentables » et qui épousent sa vision et ses priorités. Le 'plan stratégique triennal' lancé l’année dernière contient les objectifs à court terme et les estimations des coûts de différents projets. Cette année, les ministères et les départements devront mettre le plan à jour, compte tenu du progrès déjà accompli ou d’autres nouvelles initiatives à entreprendre.

Les contraintes

Le ministère des Finances ne veut pas encore alourdir la dette publique, donc, le déficit budgétaire doit être impérativement réduit. Les autorités projettent de ramener la dette publique à 60 % du Produit Intérieur Brut d’ici l’an 2020-2021. De ce fait, la marge de manœuvre paraît limitée, car le ministère de Finances veut contenir les dépenses récurrentes. Parmi d’autres contraintes, l’existence d’un ‘paper-based office structure’ qui encourage la bureaucratie ; un manque d’expertise pour lancer des nouveaux secteurs et un lien insuffisant entre les dépenses publiques et les résultats.

Les opportunités

Le pays peut toujours attirer davantage d’investissements. Un fort taux de croissance économique dans plusieurs pays africains est une opportunité pour Maurice, car si le pouvoir d’achat des Africains augmente, c’est un marché potentiel qui se développe pour nos produits et services. Ensuite, il y a l’émergence de l’État océan, l’économie numérique et la coopération  avec l’Inde et la Chine.

Les grands défis

Le BREXIT demeure un des plus grands défis auxquels le pays aura à faire face, de par ses conséquences sur notre économie. La résurgence du protectionnisme est un autre facteur menaçant, de même que la rude concurrence venant d’autres juridictions offshore. Il y a, aussi, la trappe à revenu intermédiaire (Middle Income Trap) et la baisse de la compétitivité de nos industries exportatrices.

Chiffres

Pour l’année financière 2016-2017, le taux d’inflation était de 2,4 %, alors que le taux de chômage était de 7,3 %. Le déficit budgétaire était de l’ordre de 3,5 % du Produit Intérieur Brut.  Selon le ministère des Finances, il y a eu environ 6,500 recrues dans la fonction publique. Au 31 juillet 2017, les réserves du pays en devises étrangères étaient estimées à Rs 181 milliards, contre Rs 169 milliards, un an auparavant. Le montant des investissements directs étrangers à Maurice avait atteint Rs 15,4 milliards. Toujours pendant l’année financière 2016-2017, la Mauritius Revenue Authority a collecté des revenus fiscaux de l’ordre de Rs 75,7 milliards.

Les grands axes : Business Facilitation

Selon nos sources, comme dans chaque exercice budgétaire, la facilitation des affaires occupera une place importante dans le prochain Budget et se poursuivra à travers des réformes et la rationalisation des permis et autres licences. À noter que l’Union Européenne finance à hauteur de 7 millions d’euros le projet de ‘National e-licensing’ piloté par l’Economic Development Board. Malgré plusieurs réformes, il y a toujours quelques couacs au niveau de l’implémentation, ce qui exaspère la communauté des affaires, surtout les PME. À titre d’exemple, les banques exigent toujours un ‘Trade Licence’ à l’ouverture d’un compte courant. D’autre part, certaines institutions (publiques et privées, y compris les banques) ne sont pas encore à l’ère numérique, car ils exigent toujours des documents en papier, alors que la Companies Division opère déjà sur le web et émet des certificats digitaux.

Cibler l’Afrique

L’Africa Strategy demeure toujours un des créneaux importants de notre diversification économique et tout indique que le prochain Budget contiendra encore des mesures incitatives visant à consolider cette avenue pour nos entrepreneurs, mais aussi pour les investisseurs étrangers désirant utiliser Maurice comme plate-forme. Le Mauritius Africa Fund aura un rôle prépondérant à jouer dans cette optique. À noter que Maurice a signé des accords avec Madagascar, Ghana et Sénégal pour le développement des zones économiques spéciales, et les projets sont en cours.

Renforcer les PME

Avec le lancement de la SME Mauritius Ltd, les PME peuvent s’attendre à des nouvelles mesures incitatives lors du prochain Budget. En effet, les PME sont considérées comme un véritable moteur de croissance et l’objectif du gouvernement est d’encourager davantage l’émergence des petites entreprises.

Secteurs productifs

C’est un fait que le secteur immobilier domine l’économie et les investissements directs étrangers. Les autorités veulent promouvoir d’autres secteurs productifs, à l’instar du manufacturier et de l’agro-industrie. Tous les acteurs concernés sont conscients de la nécessité de transformer le secteur manufacturier à travers l’innovation pour demeurer compétitif.


Ken Poonoosamy : «Je vois Maurice comme une plate-forme de services compétitive et prospère»

Le Deputy Chief Executive de l’Economic Development Board, Ken Poonoosamy, se dit très optimiste pour l’avenir socioéconomique de Maurice, malgré tous les défis qui nous guettent. Dans une déclaration au Défi Media Group, Ken Poonoosamy explique sa vision pour le pays. Il estime que l'accès aux nouveaux marchés donnerait un nouvel élan à la croissance des entreprises engagées dans l'ingénierie de précision et les dispositifs médicaux par exemple. L'agriculture verticale nous permettrait de créer une plus grande indépendance dans la sécurité alimentaire. Notre économie de l'océan deviendrait un moteur clé de la croissance générant des emplois hautement rémunérés.

Notre secteur des services financiers, combiné à un marché des capitaux dynamique, serait la scène centrale pour les opérations transfrontalières, la liste des fonds et le siège de sociétés mondiales investissant en Afrique. Le pays serait équipé d'un système de transport moderne, une meilleure connectivité aérienne avec des niveaux plus élevés de touristes et de passagers en transit, une plus grande bande passante internationale soutenant notre secteur des TIC et un hub portuaire et logistique de classe mondiale qui fait de Maurice, une passerelle naturelle entre l'Asie et l'Afrique dans le mouvement des marchandises.

« De mon point de vue, nos trois principaux défis seraient les suivants: soutenir la croissance tout en réduisant les inégalités; intensifier la coopération internationale pour un accès plus large et meilleur aux marchés dans un monde de plus en plus multipolaire et aborder les ‘policy trade-offs’ émergents vis-à-vis du défi démographique », conclut-il.

 

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