L’octroi d’un boni de 14e mois fait débat depuis que le sujet a fait l’objet d’une Private Notice Question du leader de l’Opposition, Xavier-Luc Duval, au Parlement le mardi 21 novembre. Certes, tout le monde serait heureux d’en bénéficier pour terminer en beauté 2023, mais le pays peut-il faire face au coût financier d’une telle entreprise ?
Dev Luchmun, économiste, consultant en relations industrielles et ex-conseiller au ministère du Travail et des Relations industrielles, trouve que face à la cherté de la vie, l’idéal serait d’accorder un 14e mois pour soulager les salariés qui peinent à joindre les deux bouts, mais qu’en retour, cela pourrait être désastreux pour l’économie nationale.
C’est la même inquiétude qu’exprime Ajay Beedassee, président de SME Chambers. Il explique que plusieurs petites et moyennes entreprises (PME) sont à bout de souffle et qu’une charge supplémentaire ne va pas les aider. « Elles ont déjà sur leurs épaules le paiement du boni de fin d’année et de la compensation salariale », souligne-t-il. Plusieurs petites et moyens entrepreneurs sont lourdement endettés auprès de la Banque de Développement. « Ce sont des emprunts qu’ils ont contractés pour faire rouler leurs entreprises », fait ressortir Ajay Beedassee. Il laisse entendre que plusieurs d’entre eux envisagent de mettre la clé sous le paillasson dans un proche avenir.
Pour le président de SME Chambers, il n’est « pas possible d’alourdir davantage le fardeau des petites et moyennes entreprises. Si les grosses entreprises, qui ont réalisé des profits mirobolants, veulent octroyer un 14e mois à leurs employés, qu’elles le fassent. Il n’est pas question qu’on impose ce paiement à toutes les entreprises indistinctement », ajoute-t-il.
Dev Luchmun rappelle que, dans le passé, certaines compagnies du secteur privé, financièrement solide, accordaient un 14e mois à leurs salariés, mais « tout a chamboulé avec la pandémie de COVID-19 et une situation financière difficile sur le plan international. Certes, on parle d’une reprise dans plusieurs secteurs d’activité, mais en vérité, le pays ne peut permettre des largesses qui la plongeraient de nouveau dans le chaos économique ».
Logique… ou pas
L’économiste explique que si des grosses compagnies peuvent accorder un 14e mois à leurs salariés, « tel ne sera malheureusement pas le cas pour les autres compagnies, dont les PME qui souffrent toujours des séquelles de la pandémie. « C’est pour cette raison que j’estime qu’il serait « illogique » de légiférer pour contraindre indistinctement toutes les compagnies à accorder un boni de 14e mois à leurs employés, car en retour, cela pourrait fragiliser leur sécurité d’emploi », fait-il ressortir.
Le président de l’Union of Finance Officers (UFO), Vidianand Naugloo, n’est pas du même avis. Il trouve « logique que les employés bénéficient d’un 14e mois, car ils ont travaillé durement pour permettre la reprise économique. « Le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, reconnaît lui-même que l’économie est sur la bonne voie » fait-il ressortir. Il justifie aussi l’octroi d’un 14e mois par le fait que « les travailleurs font face à une hausse sans précédent du coût de la vie et qu’ils arrivent difficilement à joindre les deux bouts ».
Pour Vidianand Naugloo, l’octroi d’un 14e mois aura le mérite de relancer la consommation et accélérer davantage la reprise. « Quand les consommateurs ont plus d’argent, ils dépensent plus et la forte demande va stimuler davantage la production au niveau des entreprises. L’argent a un « multiplier and accelerating effect », soutient-il.
Quant à Dev Luchmun, il ajoute qu’il serait préférable pour le gouvernement d’accorder une compensation salariale adéquate à tous les salariés, les pensionnaires et autres bénéficiaires de prestations sociales. « Tous les travailleurs aiment avoir plus d’argent surtout pour les fêtes de fin d’année, mais je trouve qu’ils préfèrent de loin jouir d’une sécurité d’emploi sur le long terme », soutient-il.
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