L’herbe n’est pas toujours plus verte ailleurs. Une jeune Mauricienne de 44 ans, tentée par la promesse d’un emploi payé en euros, l’a appris à ses dépens. Son récit est une mise en garde contre ce genre d’offres alléchantes.
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Nazira (prénom modifié), 44 ans, une habitante des Hauts Plateaux, travaillait dans une bijouterie à l’aéroport. Un jour, une personne lui a donné le numéro de téléphone d’une compatriote établie en Italie. Elle a proposé à Nazira de prendre contact avec cette dernière parce que celle-ci pouvait lui offrir un emploi dans ce pays.
Pour Nazira, mère de trois filles mais divorcée, l’offre était tentante. Elle s’est dit qu’elle pourrait rapidement faire du progrès sur le plan financier car ce qu’elle gagnerait là-bas serait en euros. Même si elle a pensé aux difficultés qui pourraient entraver son séjour, elle était convaincue que gagner des euros en valait la peine.
Sa décision étant prise, elle soumet sa démission à son employeur, fait ses valises et dit au-revoir à ses enfants, proches et amies. Et, en mars 2018, elle prend l’avion pour l’Italie pour atterrir à Catane, une ville portuaire située sur la côte Est de la Sicile.
La déception
Nazira et V., une fille qui l’accompagne (cette dernière avait également reçu la même proposition d’emploi), sont accueillies à l’aéroport non par la Mauricienne avec laquelle elle est en contact, mais par son associé, un compatriote établi sur le sol italien depuis 18 ans. Mais au lieu de monter à bord d’une voiture pour se rendre chez la Mauricienne ou dans un hôtel, Nazira et V. vont poireauter pendant près de trois heures sur place. La raison : une discussion qui éclate au téléphone entre l’embaucheuse établie en Italie et son associé à propos d’argent, la femme accusant l’homme d’avoir pris ou de vouloir prendre ce qui ne lui revient pas. Il faut préciser que les sommes en jeu sont conséquentes : on a réclamé 18 000 euros à Nazira (comme sans doute à l’autre fille) en retour d’un job en Italie.
Finalement, l’homme emmène les deux femmes chez une seconde Mauricienne, que Nazira connaissait déjà. Elles y restent trois jours avant que celle qui leur a proposé du travail ne vienne les récupérer pour les emmener chez elle.
Elle ne trouve pas le travail promis
Nazira commence à travailler. Mais pas l’activité qu’on lui a promis. Le job qu’on lui propose à la place est de s’occuper d’un couple âgé. La dame est alitée. « C’était dur pour moi de m’occuper d’eux et en même temps de la maison. Je n’avais jamais été formée pour cela. Pour moi, c’était le désenchantement », raconte-t-elle. Comme elle n’arrive pas à s’adapter, elle quitte ce boulot après à peine un mois. Mais comment se débrouiller seule dans un pays étranger ? D’autant que celle qui l’avait fait venir ne semblait plus s’intéresser à son sort et que V. était partie de son côté. « En Italie, ce n’est pas comme à Maurice. C’était difficile pour moi de trouver de l’aide. Les Italiens ne sont pas des personnes chaleureuses comme les Mauriciens. C’était dur pour moi même pour demander des renseignements, à propos d’une adresse par exemple, aux Italiens. La majorité d’entre eux ne comprennent pas l’anglais », relate Nazira.
Toutefois, étant une femme de caractère, elle se ressaisit et arrive à trouver une chambre qu’elle loue pour 150 euros mensuellement. Cependant, elle est intimidée par la promiscuité qui règne dans ce logement. « L’appartement n’était occupé que par des hommes, des étudiants pour la plupart. J’avais peur », ajoute-t-elle.
Permis de séjour expiré
Comprenant bien que pour tenir le coup, elle devra maîtriser la langue du pays, Nazira aprrend l’italien sur le tas. Ce qui l’aide à trouver du travail. Elle va ainsi effectuer plusieurs petits boulots pour survivre. Ce qui n’est pas évident pour une jeune femme étrangère car exposée à tous les dangers. L’un des plus gros étant la déportation après que son permis de séjour a expiré. Elle n’arrive pas à entrer en contact avec la Mauricienne qui l’avait fait venir en Italie. « Étrangement, je suis restée en Italie pendant dix mois sans que je ne sois inquiétée. À Catane, je voyais rarement des policiers. Et même quand j’en voyais, ils ne faisaient pas attention à moi », relate-t-elle.
L’autre difficulté à laquelle fait face Nazira est le climat. « L’hiver était rude et je n’avais pas assez d’argent pour m’acheter des vêtements chauds », dit-elle.
Retour au pays
Finalement, après avoir économisé suffisamment pour s’acheter un billet d’avion, Nazira rentre à Maurice en janvier 2019. Elle n’est, hélas, pas revenue avec une valise pleine de liasses d’euros. Mais avec de très mauvais souvenirs par rapport à la dure réalité qu’elle a vécue pendant dix mois dans un pays étranger. Elle n’a pas toujours digéré le fait d’avoir été piégée par cette femme qui lui a pris ses 18 000 euros en lui faisant miroiter la perspective d’un travail agréable. « 18 000 euros peuvent ne pas sembler beaucoup, mais pour moi ils le sont. Mais il n’y a pas que l’argent. Cette femme m’a fait croire que je pouvais trouver du travail en Italie alors que ce n’était pas son intention. Une fois sur place, elle m’a abandonnée à mon sort et j’aurais pu tomber dans un piège. D’ailleurs, on m’a fait des propositions mais je ne suis pas ce genre de femmes », lâche Nazira. Son but maintenant est de dénoncer la prétendue embaucheuse aux autorités pour qu’elle n’exploite pas d’autres jeunes femmes. Et elle veut aussi récupérer ses 18 000 euros !
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