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Private Recruitment Agencies Bill : de l’ordre attendu dans le recrutement de Mauriciens et d’étrangers 

La nouvelle législation devrait consolider et renforcer la loi relative au recrutement de Mauriciens et d’étrangers.

Le « Private Recruitment Agencies Bill » a été présenté en première lecture par le ministre du Travail Soodesh Callichurn ce mardi 18 juillet.  En quoi consiste ce nouveau projet de loi ? Qu’est-ce qui changera ? Quelles seront les implications dans le monde du travail ? Éléments de réponses.

Le projet de loi sur les agences de recrutement privées (Private Recruitment Agencies Bill) a été approuvé par le Cabinet le vendredi 14 juillet et a été présenté en première lecture à l’Assemblée nationale ce mardi. L’objectif principal est d’abroger la loi sur le recrutement des travailleurs et de la remplacer par un nouveau cadre législatif plus approprié. Conforme aux recommandations de l’International Labour Organisation (ILO) et l’International Organisation for Migration (IOM), la nouvelle législation devrait consolider et renforcer la loi relative au recrutement de Mauriciens pour un emploi dans le pays et à l’étranger, et au recrutement d’étrangers pour un emploi à Maurice. 

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De l’ordre dans le secteur 

Le projet de loi prévoit qu’aucun opérateur à Maurice ne doit recruter un travailleur pour travailler à Maurice ou à l’étranger, à moins qu’il ne soit agréé en tant qu’agence de recrutement privée. Thierry Goder, le CEO de l’agence de recrutement Alentaris, estime que c’est une bonne initiative de la part des autorités. « Il était grand temps de mettre de l’ordre dans ce secteur », dit-il. Ce dernier affirme que sur le site officiel du gouvernement, il y a un bon nombre d’agences qui opèrent. « La grande question est de savoir combien d’entre elles respectent les exigences de la loi actuelle », demande-t-il. 

Un avis que partage Ravish Pothegadoo, directeur de l’agence Talent On Tap. Ce dernier rappelle que la Recruitment of Workers Act date de 1993. « On doit toujours améliorer les processus et les règles et rester en phase avec le temps et les tendances internationales », avance-t-il. 

Adilla Diouman-Mosafeer, directrice de Talent Lab, affirme pour sa part que cette nouvelle loi était nécessaire, car elle estime qu’il y a actuellement un « désordre » dans le secteur du recrutement. « Le flux de travailleurs étrangers et, évidemment, la demande accentuée ont créé un réseau de braconniers dans le domaine. C’était le flou total avec surtout l’intérêt malsain des agences étrangères de l’Asie pour opérer à Maurice », déplore-t-elle. Ainsi, elle est d’avis que c’est important que l’État prenne contrôle de cette situation. 

Pas de frais/commission aux agences 

Thierry Goder soutient qu’il ne devrait pas être possible pour n’importe qui de se lancer dans le recrutement. « Actuellement, il existe des individus ou des sociétés qui opèrent au noir et qui se font rémunérer pour leurs services », fait ressortir notre interlocuteur. Selon Ravish Pothegadoo, le nouveau projet de loi va permettre de réduire les abus.

« Les agences de recrutement ne pourront plus facturer des commissions aux demandeurs d’emploi et je trouve que c’est une pratique qui devait cesser depuis longtemps », souligne-t-il. En effet, le projet de loi prévoit que personne ne peut facturer un travailleur des honoraires liés à son recrutement et que tous les frais de son recrutement, y compris ses frais de déplacement, sont à la charge de son employeur.

« La nouvelle loi va décourager ainsi l’approche des charlatans/ vendeurs de rêves, avec la régularisation stricte des licences octroyées aux agents recruteurs. Elle assurera un contrôle minutieux sur le personnel employé dans les agences de recrutement », appuie-t-il. De son côté, Adilla Diouman-Mosafeer indique que souvent les gens paient dans les Rs 300 000 à une agence pour entrer dans le pays.

Interdiction aux agences étrangères 

Le projet de loi prévoit également l’interdiction à une personne titulaire d’une licence étrangère de recrutement d’exercer l’activité de recrutement de travailleurs à Maurice. « En enlevant la présence des agences étrangères, nous aurons un meilleur contrôle sur la situation. Une agence mauricienne se doit de pouvoir répondre de ses actes, mais un étranger a le choix de plier ses bagages et de disparaître », soutient Adilla Diouman-Mosafeer. 

Pas vraiment une solution au problème de manque de main-d’œuvre    

Selon nos interlocuteurs, le nouveau projet de loi ne permet pas vraiment de résoudre le manque de main-d’œuvre auquel font face divers secteurs d’activité. Ravish Pothegadoo souligne que la loi met l’emphase uniquement sur les règles que les agences de recrutement se doivent de respecter et, également, sur les droits des demandeurs d’emploi. Adilla Diouman-Mosafeer explique que résoudre la pénurie de travailleurs n’est pas l’objectif de la nouvelle loi. « Elle permet plutôt d’assurer un contrôle et gérer le secteur de recrutement », dit-elle. Thierry Goder abonde dans le même sens. « Je ne suis pas certain que cette loi résoudra le problème de main-d’œuvre. Je pense plutôt qu’il est nécessaire d’élaborer une véritable stratégie de valorisation des métiers et un plan de développement des compétences humaines en entreprise », recommande-t-il.

Reaz Chuttoo, de la Confédération des travailleurs du secteur privé : « L’intention est bonne, mais ce n’est pas suffisant »

Reaz Chuttoo affirme que c’est une demande de la Confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP) qui a été finalement prise en considération. Il affirme qu’en 2018, une délégation de la CTSP était partie au Bangladesh dans ce contexte et avait soumis ses recommandations au ministère du Travail. Il soutient que 95% des travailleurs étrangers à Maurice viennent des pays de l’Asie. « Maurice a été pointé du doigt pour plusieurs manquements. D’abord, pour manque de « fair recruitment », vol des salaires et manque de protection sociale pour les travailleurs étrangers », déclare-t-il. 

Selon lui, le nouveau projet de loi s’adresse uniquement au processus de recrutement. Or, il est d’avis que les travailleurs étrangers sont victimes de vol des salaires. « L’intention du gouvernement de venir de l’avant avec une nouvelle loi est louable. Mais ce n’est pas suffisant pour adresser d’autres problèmes », ajoute-t-il. À titre d’exemple, si un travailleur décide de poursuivre son patron, sa plainte ne peut être enregistrée auprès du ministère du Travail.

 

 

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