Prêt bancaire à taux zéro pour les jeunes : qui sont les véritables gagnants ?

L’annonce électorale d’un prêt bancaire à taux zéro pour les jeunes Mauriciens de 18 à 35 ans est perçue par des opérateurs du secteur immobilier et de la construction comme une initiative pouvant faciliter l’accès à la propriété. Ce serait une réponse aux défis posés par l’augmentation des coûts de construction et les taux d’intérêt variables.

La mesure évoquée récemment par le Premier ministre concernant un prêt bancaire à taux zéro pour les jeunes de 18 à 35 ans suscite des débats. Elle pourrait non seulement les aider à devenir propriétaires, mais également de dynamiser le marché immobilier résidentiel et soutenir la croissance du secteur de la construction. Il convient de souligner que les prêts aux ménages se chiffrent à Rs 171 milliards à juillet 2024. Parmi, Rs 120 milliards sont destinées aux prêts logements. S’endetter pour l’achat ou la construction d’une maison n’est pas un fait inédit à Maurice. Kentish Moorghen, CEO de Prime Pillar Group fait observer que la majorité des personnes qui bâtissent une maison font des emprunts. Pour cause, le coût de construction va en grandissant. Une maison fonctionnelle de 1 300 pieds carrés coûterait au minimum Rs 2 000 par pied carré. Ainsi, Kentish Moorghen souligne que cette mesure ne sera pas sans incidence sur le pouvoir d’achat des emprunteurs tombant dans la catégorie annoncée. 

Le président de la Building and Civil Engineering Contractors Association (BACECA), Ravi Gutty affirme que cette mesure contribuera favorablement au secteur de l’immobilier. L’accessibilité à la propriété pourrait encourager davantage d’achats et de projets de construction par les jeunes. Il fait ressortir que la suppression des intérêts rendra l’emprunt plus abordable et les permettra d’envisager l’achat ou l’édification d’une maison, stimulant ainsi l’activité dans le secteur du bâtiment.  « La construction d’une maison génère des effets multiplicateurs dans divers secteurs : fournitures de construction, emploi local, services professionnels tels que l’architecture et l’ingénierie, entre autres », indique-t-il. 

Immobilier

Le marché de l’immobilier a subi l’impact de la hausse des coûts de construction. Ajouté à cela, le niveau des taux d’intérêt influencés par le taux directeur n’était pas sans conséquence sur l’accès à la propriété pour la jeune génération. En ce sens, Philippe de Beer, CEO de Park Lane Properties, voit cette initiative comme un moyen concret d’aider les jeunes à franchir le pas de l’accession à la propriété, ce qui a été, selon lui, difficile ces dernières années. « Les taux d’intérêt étant variables à Maurice lorsqu’on contracte un prêt bancaire, ces jeunes seraient d’autant plus protégés d’une éventuelle augmentation des taux et donc d’une hausse de leurs remboursements mensuels », fait-il ressortir. Ainsi, il est d’avis que cette annonce aurait un impact favorable à la fois socialement et économiquement, en dynamisant le marché de l’immobilier résidentiel et en soutenant la construction. « Si cette initiative est bien encadrée, elle pourrait donc stimuler le marché mauricien dans les segments de l’immobilier abordable », poursuit-il.

Critère sine qua non, la situation financière peut, dans certains cas, être défavorable aux demandeurs de prêts. Gilles-Guy de Salins, directeur de Caterpal Services Ltée, estime qu’il s’agit d’un élément propice à un début de désescalade de l’inflation interne du pays. Selon lui, les jeunes sont de facto souvent exclus lorsqu’il s’agit d’emprunts immobiliers. Il indique que, pour y être éligible, il faut avant tout être dans une situation financière stable et ne pas consacrer plus de 33 % de ses revenus au remboursement du crédit. « Ainsi, je trouve que cette offre est effectivement une bonne initiative. En revanche, ce dispositif financier doit être pérenne, car une fois mis en œuvre, son arrêt soudain pourrait avoir des effets désastreux », prévient-il.

Si les conditions pour obtenir ces prêts sont trop strictes ou complexes, cela pourrait limiter l’impact de la mesure"

Mise en œuvre 

Relayée pour l’heure au stade de promesse électorale, cette mesure ne pourrait être efficace que si les conditions adéquates sont réunies. Pour Ravi Gutty, son succès dépendra de la mise en œuvre des détails pratiques et de la capacité des acteurs concernés à répondre à cette nouvelle mesure. Il ajoute que si les modalités pour obtenir ces prêts sont trop strictes ou complexes, cela pourrait limiter l’impact de la mesure. Kentish Moorghen se demande quel est le salaire maximal qu’un jeune de 18 ans peut toucher, car c’est ce qui déterminera le montant de crédit accessible. Il convient selon lui de faire la différence entre être éligible à un crédit et proposer un prêt sans intérêt. « La base des salaires est un des critères à prendre en considération, d’où l’importance d’avoir des paramètres bien réfléchis », fait-il ressortir.