Les récents événements viennent une fois de plus mettre en lumière le métier des policiers et leurs conditions de travail. Souvent au-devant de la scène, ils n’ont pas la tâche facile tous les jours.
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La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux dimanche soir. Un policier en patrouille a été pris pour cible par un groupe de jeunes auquel il reprochait de faire un rallye illégal. L’un d’eux en est venu aux mains avec le policier pendant que les autres se moquaient de lui. Le soir même, après l’arrestation du principal suspect qui dément avoir participé à un rallye illégal et accuse le policier d’avoir été sous influence de l’alcool, la maison et la voiture du caporal Choollun à Poudre-d’Or Hamlet ont été saccagés. Plus de dix personnes ont été interceptées alors que d’autres arrestations sont à prévoir.
Ce n’est pas le premier incident rapporté. Le jeudi 16 août, un habitant de Rose-Belle est accusé d’avoir, après une vive dispute, giflé une policière qui l’avait pris en contravention. Heureusement que ses collègues, qui étaient dans les environs, ont pu maîtriser l’individu. Ce dernier a été arrêté puis placé en détention avant de comparaître devant le tribunal de Mahébourg.
Investis d’une mission
La vidéo du caporal et des jeunes a été vu par plus de 200 000 internautes qui n’ont pas manqué de commenter l’incident. Ils sont nombreux à déplorer le manque de respect des jeunes envers ceux qui portent l’uniforme bleu. Wendy Amaury, 21 ans, estime que ces jeunes doivent être punis : « On ne peut pas tolérer ce type de comportement, surtout envers des policiers. Il faut les respecter. Je pense que ces jeunes doivent être sanctionnés comme il se doit pour que ce type d’incident ne se reproduise plus. »
Joy Ramdin, 19 ans, souligne l’importance de montrer que les autorités protègent la police : « Si les autorités ne réagissent pas comme il faut, les jeunes n’auront plus envie de se lancer dans ce métier. Il faut démontrer que les forces de l’ordre sont là pour assurer notre sécurité. »
Les policiers sont partout : dans les rues, en patrouille, à l’aéroport et devant certaines institutions. Leur métier consiste à veiller au respect des lois, des droits et des libertés individuelles de tout citoyen. Les policiers ont non seulement le devoir d’être présents pour prévenir tout acte malveillant et intervenir d’urgence, mais ils sont aussi investis d’une mission ; celle de faire usage des pouvoirs qui leur sont conférés pour faire respecter la loi.
Dans certains cas, les forces de l’ordre sont appelées à porter assistance aux personnes en danger car cela fait aussi partie de leur engagement. Il n’y a pas longtemps, un jeune habitant d’Engrais Martial à Eau-Coulée a échappé à la mort. Il se faisait agresser au sabre en pleine nuit. Il aurait pu y laisser la vie. Grâce à l’intervention des policiers de la région qui étaient en patrouille au bon moment, les malfrats ont pris la fuite. Le drame a pu être évité.
Les pour et les contre
Les policiers ont la chance d’exercer ce métier. Leur travail se fait en équipe. Il est d’ailleurs d’une grande utilité sociale. Ils ont une sécurité d’emploi puisque c’est une institution qui tombe sous l’égide de l’État. Ils ont aussi la possibilité d’être en contact permanent avec les citoyens.
Cependant, comme dans tout métier, il y a des aspects négatifs, notamment quand il s’agit de faire des horaires difficiles, de travailler les jours de fête et de gérer des situations délicates dans l’urgence. D’autres aspects éprouvants du métier : rester des heures sur pied très tôt afin de contrôler le flot de véhicules durant les embouteillages ou encore être postés devant des bâtiments comme les banques toute la journée, voire plus, tout en étant débout.
«Votre mission est de faire honneur au pays.»
C’est ce qu’avait déclaré le Premier ministre, Pravind Jugnauth, dans un discours tenu en mai 2018 alors qu’il s’adressait aux recrues de la force policière. Il n’avait pas manqué de féliciter les policiers ayant fait une bonne action, comme cela avait été le cas le 31 mai 2018. Dans une lettre adressée à Pooja Adhin, la policière qui avait aidé une femme à accoucher de jumeaux dans l’enceinte du poste de police de Roche-Bois, il a dit : « Vous avez fait preuve de beaucoup de professionnalisme et de compassion face à un événement complètement inattendu. Vous avez pris l’initiative d’aider une femme qui s’apprêtait à accoucher avant que l’aide médicale ne soit disponible. Vous avez été exemplaire… »
Akash (prénom modifié) Ex-policier : «On dirait que nos vies passent au second plan»
« Lorsque j’étais policier, je me rappelle avoir reçu l’ordre de faire une patrouille à 2 heures du matin dans la rue. L’endroit ne m’inspirait pas confiance. Notre sécurité dans tout ça ? On dirait que nos vies passent en arrière-plan et que c’est le travail avant tout. Il a fallu se cacher et laisser croire que nous faisions le travail pour ne pas prendre de risques. Le plus malheureux est qu’on ne peut contester cette décision par peur d’encourir des sanctions. »
L’inspecteur Shiva Coothen : «Ce n’est pas donné à tout le monde d’exercer un métier aussi noble»
L’inspecteur Shiva Coothen indique qu’il n’est pas donné à tout le monde d’exercer le noble métier de policier. « Il y a environ 13 000 policiers postés dans différentes régions. La police est l’organisation la plus visible sur l’île. Nous sommes sous le feu des projecteurs. Ce métier requiert beaucoup de sacrifices. être policier demande une force physique et mentale. Certains officiers se laissent parfois dominer par la faiblesse. C’est regrettable, mais c’est très rare. » Parlant des tâches administratives, l’inspecteur dit que les policiers sont appelés, après leur intégration, à servir n’importe quelle unité, dont la garde-côte nationale, le Groupement d’intervention de la police mauricienne et l’Anti-Drug and Smuggling Unit. « Des officiers sont parfois envoyés à Rodrigues et à Agaléga pour assurer la sécurité. Ils ont de quoi être fiers de faire ce métier. »
Jaylall Boojhawon, président de la Police Officers Solidarity Union : «Des peines de prison pour ceux qui agressent des policiers»
Quelle est votre réaction à la suite du dernier incident impliquant le caporal Choollun ?
Tout le pays a eu l’occasion de voir cette vidéo. C’est suivant des plaintes qu’une équipe de l’Emergency Response Service est allée sur place. Le constable Toolsee et le caporal Choollun ont parlé à un motocycliste mais son groupe les a encerclés. Les policiers étaient là pour faire leur travail. C’est inadmissible que des jeunes huent, humilient et agressent des policiers en service. Il y a aussi eu vengeance contre le caporal. Nous sommes tous écœurés par ces actes d’agression.
D’un autre côté, cela démontre qu’il y a un problème de sous-effectifs au niveau des postes de police et que les agents ne sont pas bien équipés. Cela fait un moment déjà que la Police Officers Solidarity Union demande des équipements de sécurité comme ceux dont bénéficient tous les policiers à travers le monde. Ils en ont besoin pour faire face aux agressions.
Nous déplorons également que des sanctions pénales ne soient pas assez sévères en matière d’agressions envers les policiers. Nous demandons au gouvernement d’apporter des sentences plus sévères car il y a trop d’agressions. Il faut des peines d’emprisonnement, non des cautions pour ceux jugés coupables d’agression sur des policiers.
Nombre de jeunes estiment que les policiers font des travaux « ingrats ». Est-ce exact ?
Le problème est que les policiers sont sollicités de toute part. On fait appel à eux pour la moindre petite chose. Certains, par exemple, sont postés dans différents ministères pour travailler comme agents de sécurité. D’autres sont présents durant les examens du Primary School Achievement Certificate, du School Certificate ou du Higher School Certificate. Les surveillants sont rémunérés mais pas les policiers. Il y a aussi des policiers armés devant les banques. Si les compagnies de sécurité employaient des gens de calibre au lieu de retraités, ce problème ne se poserait certainement pas. Si cela continue, peu importe le nombre de policiers qui seront recrutés, nous serons toujours en manque d’effectifs.
La police vient de recruter. Quels conseils donneriez-vous aux jeunes qui veulent embrasser ce métier ?
Je leur dirais de ne pas intégrer la force policière par défaut. Il faut aimer ce travail et être passionné. S’ils le font par obligation, ils seront vite désespérés et ils le regretteront. J’ai d’ailleurs déjà été témoin de pareils cas durant ma carrière. Ils doivent peser le pour et le contre. Il faut une vocation pour faire ce métier.
OPINIONS
Abhay Khadah : « Il faut du courage pour devenir policier car ce n’est pas facile d’assurer la sécurité de toute une population. Je leur dis chapeau ! Dommage de constater qu’ils ne sont pas souvent appréciés à leur juste valeur. »
Ashfaq Hussein : « Auparavant, devenir policier était un rêve pour beaucoup. Aujourd’hui, nous avons l’impression que ceux qui n’arrivent pas à décrocher le métier de leur choix se tournent vers le recrutement dans la police rien que pour avoir un travail. Ces derniers temps, les recrutements se font en masse. Nous avons l’impression que n’importe qui peut s’enregistrer pour devenir policier. »
Beatrice Augustin : « Les gens n’ont plus peur des policiers. Il n’y qu’à voir la réaction des jeunes en leur présence. Ils ne les respectent pas. Ils les huent. Ils les provoquent. Les seules fois où la police est évitée c’est sur la route quand les automobilistes font tout pour ne pas avoir de contraventions. »
Divya Rampadaruth : « On considère souvent la force policière comme étant active uniquement sur le terrain mais nous oublions la vie sociale des policiers. Ils ont des horaires difficiles. Ils sacrifient souvent leur vie sociale et familiale pour le bien-être des citoyens. Voici une phrase qui résume leur situation : ‘A soldier is never off duty’. »
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