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Poissons retrouvés morts à Poudre-d’Or : des pêcheurs dénoncent l’inaction face à la pollution marine

Plusieurs espèces de poissons ont été retrouvées mortes à Poudre-d’Or.

À Poudre-d’Or et Baie-du-Tombeau, les pêcheurs tirent la sonnette d’alarme face à une pollution marine qu’ils jugent dévastatrice. Poissons morts, coraux blanchis et silence des autorités alimentent colère et inquiétude, entre catastrophe écologique annoncée et menaces sur la santé publique.

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À Baie-du-Tombeau et à Poudre-d’Or, la colère des pêcheurs grandit de jour en jour. Ces hommes et femmes, dont la mer est à la fois le gagne-pain et l’héritage, disent assister impuissants à un « massacre écologique » qui dure depuis trop longtemps. Les images révélées récemment par le Syndicat des pêcheurs et l’Association des pêcheurs de Poudre-d’Or, montrant des coraux blanchis et des poissons morts, ont choqué l’opinion. Pourtant, malgré cette mobilisation et les rencontres avec les autorités, rien n’avance vraiment.

Les pêcheurs affirment que la pollution qui frappe la région ne date pas d’hier. Les récifs coralliens se dégradent, la biodiversité marine s’appauvrit et les poissons sont régulièrement retrouvés sans vie dans le lagon. Selon eux, une eau polluée rejetée dans la mer serait à l’origine du problème. L’usine pointée du doigt continue cependant ses activités, sous les yeux impuissants d’une communauté qui vit de la pêche depuis des générations. Pour beaucoup, la situation est devenue intenable.

Judex Ramphul, secrétaire du Syndicat des pêcheurs, tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme. « Cela fait plusieurs années que nous alertons sur cette situation. Cette pollution ne concerne pas seulement l’eau usée, mais aussi les batteries présentes dans cette eau. Si rien n’est fait, cela aura non seulement un impact sur l’environnement mais aussi sur la santé publique », explique-t-il. Sa déclaration reflète le sentiment d’une profession qui estime ne pas être entendue. Les pêcheurs répètent que les signaux sont visibles depuis longtemps et que l’absence d’action risque de transformer cette crise écologique en catastrophe sanitaire.

« Rien d’anormal », dit Rajesh Bhagwan

Un pêcheur de la région de Poudre-d’Or ne cache pas son inquiétude. Il a fait la terrible découverte la semaine dernière, retrouvant des poissons morts dans des conditions inhabituelles. Il est persuadé que la pollution des eaux est la cause directe de ce drame écologique. « Nous ne demandons pas à l’usine de fermer ses portes, mais de revoir ses activités. Ils ont un système pour traiter leurs eaux usées, mais il ne faut pas se débarrasser du produit final en mer. C’est grave ce qui se passe ici, sur la côte », dénonce-t-il. Pour lui, comme pour beaucoup d’autres, le problème ne relève pas seulement de la protection de l’environnement, mais aussi de la survie économique des familles de la région.

De leur côté, les autorités appellent à la prudence. Sollicité pour une réaction, le ministre de l’Environnement, Rajesh Bhagwan, affirme que les premiers tests réalisés sur l’eau n’ont révélé « rien d’anormal ». « Cette affaire ne concerne pas uniquement mon ministère mais aussi le ministère de la Pêche. Nous avons testé l’eau, mais il n’y a rien de suspect. Toutefois, nous attendons le rapport sur les poissons morts pour mieux comprendre ce qui a pu se passer », explique-t-il. Selon lui, seul ce rapport post-mortem, attendu dans les prochains jours, permettra d’établir les causes réelles de la mort des poissons.

Cette divergence de lecture entre pêcheurs et autorités nourrit un climat de méfiance. D’un côté, les pêcheurs disent avoir des preuves tangibles — vidéos sous-marines et constats visuels. De l’autre, le ministère insiste sur l’absence de résultats scientifiques permettant d’imputer clairement la responsabilité à l’usine. Pour les habitants, cette situation est incompréhensible : comment les autorités peuvent-elles affirmer qu’il n’y a rien d’anormal alors que les poissons meurent par dizaines et que les coraux dépérissent ?

Dans ce climat de doute et de frustration, Judex Ramphul ne compte pas en rester là. Il prépare une nouvelle rencontre avec la communauté des pêcheurs, afin d’alerter une nouvelle fois l’opinion publique et de maintenir la pression. Selon lui, il est impératif de mobiliser davantage de citoyens autour de cette cause, car il ne s’agit pas seulement d’un problème corporatiste. « C’est l’avenir de nos enfants qui est en jeu », lance-t-il, convaincu que la santé publique sera bientôt affectée si rien n’est fait.

Sur le terrain, l’incertitude pèse lourd. Les familles de pêcheurs s’interrogent sur leur avenir. Les habitants craignent une contamination de la chaîne alimentaire, tandis que certains redoutent déjà des conséquences à long terme sur leur santé. L’absence de décisions rapides accentue ce sentiment d’abandon. Beaucoup estiment que les autorités temporisent et que l’usine bénéficie d’une certaine complaisance.

Le drame écologique de Baie-du-Tombeau et de Poudre-d’Or illustre les difficultés récurrentes à concilier développement industriel et préservation de l’environnement à Maurice. Si les pêcheurs réclament des mesures immédiates et concrètes, les autorités semblent privilégier une démarche plus lente, faite d’analyses et de rapports. Mais chaque jour qui passe sans décision accentue les dégâts, tant sur l’écosystème marin que sur la confiance des communautés côtières.

Pour les pêcheurs, le temps presse. Leur message est clair : la mer, qui les a toujours nourris et fait vivre leurs familles, est en train de mourir. Et avec elle, une partie de leur identité, de leur dignité et de leur avenir.

 

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