Dans le cadre de la préparation de son Budget, le ministère des Finances étudie une série de mesures visant à soulager ceux qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts. L’une des idées contemplées est d’offrir des « social vouchers » et des « food packs ».
Comment soulager ceux qui sont au bas de l’échelle et ceux issus de la classe moyenne ? C’est le dilemme auquel est confronté le ministère des Finances face à la perte du pouvoir d’achat. Ce sujet devrait être un des principaux axes du Budget 2022-23 qui est en préparation.
Au vu de la situation économique avec un taux d’inflation qui est désormais à deux chiffres pour avoir atteint les 10,7 % en mars, le ministère étudie plusieurs options. L’une d’elles serait de proposer des « social vouchers » et des « food packs ». Il s’agit de mesures plus ciblées sur lesquelles travaillent ceux impliqués dans la préparation du Budget.
Au lieu de proposer de simples mesures, l’idée est de venir avec un programme de soutien plus ciblé. Ils sont plus d’un au ministère à constater que les subsides sur des produits importés sont loin de suffire. « En préparant le Budget, nous devons penser à des mesures ciblées pour ceux de la classe moyenne et ceux qui sont au bas de l’échelle », affirme un technicien du ministère.
Concept pas nouveau
Compte tenu de la situation et des propositions faites par la société civile, la distribution de « social vouchers » et de « food packs » contenant des produits de base serait envisagée. « Rien n’a encore été déterminé. Mais une chose est sûre : la perte du pouvoir d’achat sera à l’agenda du Budget. Nous avons toujours œuvré en faveur de ceux en difficulté », indique-t-on à l’hôtel du gouvernement. Cette même source souligne que le ministre Renganaden Padayachy lui-même a affirmé mardi à l’Assemblée nationale qu’il travaillait en ce sens.
Au lieu de proposer de mesures classiques, l’idée est de venir avec un programme de soutien plus ciblé.»
Mais le concept en lui-même n’est pas nouveau. Des organisations non gouvernementales (ONG) distribuent des « food packs » et des « social vouchers », à l’instar de Caritas, qui le fait depuis cinq ans. « Cette pratique est de plus en plus répandue au niveau des ONG », explique Patricia Fidèle, secrétaire générale de Caritas Maurice.
Elle ajoute que vu la situation économique difficile qui prévaut depuis plusieurs années, des ONG n’étant pas nécessairement impliquées dans la distribution de vivres ont été contraintes d’emboîter le pas à celles qui le font. « C’est surtout le cas au niveau des écoles où de plus en plus d’ONG distribuent de la nourriture aux enfants qui n’ont pas forcément accès aux services sociaux », ajoute-t-elle.
Patricia Fidèle explique qu’au niveau de Caritas, les « food packs » distribués contiennent surtout des grains secs, des fruits secs et des nouilles séchées, entre autres. « Quant aux food vouchers, ils permettent à nos bénéficiaires d’avoir accès à des produits frais, tels que des légumes ou des fruits », dit-elle.
Elle trouve que ce serait une excellente chose que le gouvernement propose lui aussi ces mesures mais à l’échelle nationale, car cette démarche aurait ainsi une plus grande portée. « Durant les consultations pré-budgétaires, nous avons plaidé auprès du ministre des Finances pour que ces mesures soient appliquées. »
Une autre mesure que le gouvernement pourrait appliquer, selon elle, c’est la création de boutiques de solidarité. « Caritas l’a fait avec l’aide des supermarchés opérant dans des poches de pauvreté. Grâce aux dons que nous percevons, nous arrivons à subventionner des produits. Ils sont donc vendus moins cher. C’est une autre mesure que pourrait adopter le gouvernement car il a les moyens nécessaires pour toucher un plus grand nombre de personnes », dit-elle.
La parole à des économistes
Plusieurs économistes plaident pour l’introduction de mesures sociales qui aideront à rétablir le pouvoir d’achat des personnes les plus vulnérables. Pour Takesh Luckho, ce que doit surtout éviter de faire le gouvernement, c’est de proposer des mesures qui aideront à faire accroître la croissance économique.
« On se préoccupe de faire grimper la croissance lorsqu’on est dans une situation confortable et que l’on veut attirer plus de richesses. Mais au vu de la situation actuelle, il faut réfléchir en termes de mesures sociales », souligne l’économiste.
Il conseille aussi d’éviter de se contenter de venir avec des subsides. « Pour la simple et bonne raison que les personnes issues de la classe moyenne ne ressentent pas les effets des subsides universels. Il ne faut pas oublier que la classe moyenne a tendance à être une vache à lait à laquelle on taxe Rs 10 et à laquelle on donne Rs 3 de subsides », fait remarquer Takesh Luckho.
Il se dit en faveur de « vouchers » ou encore de « credit vouchers » qui peuvent être acceptés par des banques comme mode de paiement. « Il suffirait ainsi de les présenter aux banques et les bénéficiaires obtiendraient de l’argent en retour », propose-t-il.
Il plaide également pour que la Negative Income Tax soit étendue à davantage de bénéficiaires et que l’exemption à l’Income Tax soit étendue à plus de salariés. « Ce sont les personnes qui touchent un salaire de Rs 275 000 annuellement et qui ont des dépendants à leur charge qui sont exemptés pour le moment. Je pense qu’il faudrait l’étendre à ceux dont le salaire annuel atteint Rs 300 000 », dit-il.
L’économiste Bhavish Jugurnath chiffre, pour sa part, le nombre de personnes nécessiteuses à environ 100 000. Il se base sur les chiffres du Consumer Price Index pour l’année 2017. « Les chiffres sont là. Le gouvernement sait qui sont ceux qui sont les plus en difficulté. Il ne devrait pas avoir de grandes difficultés à proposer des mesures ciblées. Pour éviter de stigmatiser ceux qui sont au bas de l’échelle, il pourrait élaborer une formule de remboursement aux plus nécessiteux à travers un calcul des produits de base », suggère-t-il.
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