Le gouvernement relance le permis à points avec un projet de loi visant à renforcer la sécurité routière. Le texte introduit de nouvelles pénalités, révise le Road Traffic Act et élargit son application.
Les chauffards n’ont qu’à bien se tenir. Le Road Traffic (Amendment) Bill, déposé au Parlement le 28 novembre 2025, passe en première lecture ce mardi 2 décembre. Il prévoit la réintroduction du système de points sur les permis de conduire — un mécanisme abandonné en 2015 — ainsi qu’une série d’ajustements visant à « établir un cadre efficace pour une meilleure conformité aux lois routières ». Selon l’Explanatory Memorandum du ministre du Transport, Osman Mahomed, le texte a pour objectif « d’améliorer la protection des usagers de la route » et de « promouvoir une culture de conduite responsable ».
Ce retour au système de pénalités s’accompagne d’un vaste chantier de révision du Road Traffic Act, touchant à la fois aux définitions légales, aux procédures judiciaires, aux amendes, aux avis d’infractions et à la gestion administrative des permis. Le champ d’application s’élargit aussi aux conducteurs étrangers : le dispositif s’appliquera désormais « non seulement au titulaire d’un permis de conduire et d’un permis provisoire, mais aussi au titulaire d’un permis de conduire international ».
Un système de points modernisé et étendu
Le cœur du texte repose sur la refonte du système de points, désormais défini avec précision. Les nouvelles définitions insérées à l’article 2 du Road Traffic Act prévoient ainsi l’introduction de trois instruments clés : l’Endorsement Certificate, le Penalty Points Certificate — qui pourra être délivré aussi sous forme numérique — et la notion de « permitted maximum number of penalty points ».
Le seuil maximal autorisé varie selon le type de permis détenu :
• 10 points pour les détenteurs d’un permis provisoire ;
• 15 points pour les titulaires d’un permis mauricien valide ;
• 15 points aussi pour les titulaires d’un permis international.
Les points seront effectifs pour une durée maximale de 36 mois, sauf s’ils sont utilisés dans le cadre d’une décision de disqualification. L’article 123AG(2) précise que les points cessent d’être effectifs dès qu’ils ont été pris en compte pour une disqualification, ou à l’issue des 36 mois, « whichever occurs earlier ».
Cependant, en cas de procédure visant une disqualification, les points restent valables jusqu’à ce que la cour statue définitivement, conformément à l’article 123AG(3).
Une procédure judiciaire encadrée
Toute condamnation pour une infraction listée au Third Schedule entraînera l’intervention de la cour. L’article 123AG(4) impose au juge :
1. de demander au Licensing Officer un « Penalty Points Certificate » à jour ;
2. d’allouer « des points dans la fourchette indiquée » pour l’infraction ;
3. de prononcer, si nécessaire, une disqualification selon le nouveau dispositif ;
4. et d’informer l’autorité compétente dans les 14 jours au moyen d’un « Endorsement Certificate ».
Lorsque plusieurs infractions sont commises
« on a single occasion », la cour attribue uniquement le nombre de points correspondant à l’infraction la plus sévère. Si des infractions présentent la même fourchette de points, les points les plus élevés seront retenus.
En cas de contestation, l’attribution des points peut être portée en appel. L’article 123AG(6) précise que le jugement est alors suspendu « pending the outcome of the appeal ».
Une liste détaillée de 33 infractions assorties de points
Le First Schedule, qui remplace l’ancienne liste des infractions à points, présente un tableau exhaustif comportant 33 infractions routières, toutes accompagnées d’un « range » de points. Celui-ci varie de 2 à 10 points selon la gravité.
Parmi les infractions les plus courantes, punies de 2 à 4 points, figurent :
• le non-port du casque ;
• l’absence de feux avant ou arrière la nuit ;
• la conduite sur une voie centrale ;
• la non-ceinture ;
• le franchissement d’une ligne continue ;
• le non-respect des feux de signalisation ;
• le défaut de gilet haute visibilité.
Les excès de vitesse sont traités selon deux seuils :
• dépassement de 15 à 25 km/h : 2 à 4 points ;
• dépassement de plus de 25 km/h : 4 à 6 points.
Le texte réserve les sanctions les plus lourdes — 8 à 10 points — à la participation à une course routière illégale : « Taking part in an unauthorised road race or trial of speed between motor vehicles on a road ».
Certaines pratiques dangereuses, comme l’usage d’un téléphone portable en conduisant ou le transport de passagers debout dans un pick-up, entraînent 3 à 6 points.
La disqualification : un mécanisme plus strict et plus automatisé
Le projet de loi introduit un nouveau chapitre, entièrement consacré au dépassement des seuils de points. Lorsque la cour constate que le conducteur dépasse le maximum autorisé, elle doit le disqualifier immédiatement, au cours de la même audience, pour une durée allant de 6 à 12 mois dans la plupart des cas. Les modalités varient selon le type de permis détenu.
Ainsi :
• un conducteur titulaire d’un permis complet sera disqualifié pour « all classes of motor vehicles » ;
• un détenteur de permis provisoire verra son permis annulé ;
• un étranger muni d’un permis international sera interdit de conduire à Maurice pour la même durée.
Plus sévère encore, celui qui conduit sans permis valide sera frappé d’une interdiction de 12 à 24 mois.
La loi prévoit également une obligation de suivre un « rehabilitation course » avant de récupérer son permis. Cette formation devient incontournable pour toute personne disqualifiée.
Le conducteur doit remettre son permis au tribunal dans un délai maximal de 5 jours, faute de quoi il commet une infraction passible d’une amende allant « de Rs 10 000 à Rs 50 000 » et d’une peine d’emprisonnement pouvant atteindre 12 mois.
Enfin, en cas de deuxième disqualification dans un délai de 36 mois, la Cour procède automatiquement à « l’annulation du permis ».
Un dispositif administratif renforcé
Une nouvelle obligation incombe à la Licensing Authority, chargée de maintenir « an up-to-date record » de tous les points attribués.
Le conducteur pourra aussi demander un « Penalty Points Certificate » officiel, moyennant paiement des frais prévus.
La gestion des avis de contravention (Fixed Penalty Notice - FPN) et des notifications émises par radars (Photographic Enforcement Device Notice - PEDN) est revue afin d’intégrer le système de points. L’article 191(3A) prévoit que, lorsqu’une FPN comporte plusieurs infractions, la référence doit être faite au « lowest number of penalty points » de l’infraction la plus grave. Le même principe est appliqué pour les PEDN à l’article 195(4).
Désormais, les personnes réglant une amende liée à une infraction à points doivent se présenter en personne au tribunal et produire leur permis ainsi que leur carte d’identité.
Des amendes revalorisées
Le législateur profite de la réforme pour alourdir différentes sanctions financières.
• L’article 123B double les amendes prévues : les montants passent de Rs 25 000 à Rs 50 000 pour la première catégorie, et de Rs 50 000 à Rs 100 000 pour la suivante.
• Les sanctions prévues pour les récidivistes (article 123B(1A)) sont encore plus sévères : elles atteignent désormais Rs 200 000 à Rs 500 000.
Le même relèvement touche l’article 123D, relatif notamment à la conduite sans permis ou sous influence d’alcool ou d’autres substances.
La possibilité de racheter des points : une innovation encadrée
Le texte introduit un mécanisme inédit : la « redemption of penalty points » (article 123AJ). Le conducteur ayant accumulé entre 10 et 14 points peut demander à la cour d’effacer jusqu’à 3 points.
Cette demande ne peut être déposée qu’à certaines conditions :
1. avoir suivi un « Approved Rehabilitation Course » ;
2. remplir le formulaire officiel ;
3. présenter un « Penalty Points Certificate » ;
4. et attendre 36 mois avant toute nouvelle demande.
Le juge peut accepter ou rejeter la demande. Dans les deux cas, il doit informer le « Licensing Officer » dans les 14 jours.
Toutefois, aucune demande n’est recevable si le total des points dépasse 15 avant la décision.
Une réforme technique, mais structurante
Le projet de loi porte des ambitions claires : renforcer la discipline sur les routes mauriciennes en donnant à l’État des outils de suivi plus performants et en responsabilisant les conducteurs.
Le ministre Osman Mahomed souligne dans son « Explanatory Memorandum » que la réforme vise à replacer la sécurité routière au cœur des priorités nationales. La réintroduction des points, indique-t-il, permettra « d’améliorer la protection des usagers » et d’encourager « une culture de conduite responsable ».
En encadrant plus strictement les excès, en alourdissant les sanctions et en imposant des formations obligatoires, le texte met l’accent sur la prévention et la correction plutôt que sur la seule répression. La possibilité de racheter des points, innovation notable, s’inscrit dans cet esprit de réhabilitation.
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