Interview

Patrick Vitry, président de l’Académie des chefs : «Il faut repenser le système de formation des métiers de bouche»

Patrick Vitry

Les cuisiniers, boulangers et pâtissiers sont très demandés dans l’hôtellerie mais aussi sur les bateaux de croisière. Parlez-nous des perspectives de carrière pour ces métiers ?
Aujourd’hui, c’est le monde entier qui recherche des métiers de bouche.  Les perspectives sont énormes. Un enseignement et un accompagnement de très haut niveau doivent toutefois être de rigueur. Je regrette cependant que la motivation des jeunes ait baissé en général. Je ne dis pas qu’il n’existe pas de jeunes passionnés, mais ce sont des métiers assez stricts, avec des horaires difficiles. Il faut donc être sûr de son choix dès le départ. Il faut savoir que si un jeune a choisi un de ces métiers comme une voie de garage, il ne percera jamais dans le secteur.

Publicité

En votre qualité de président de l’Académie des chefs et modérateur assermenté au Mauritius Institute of Training and Development, constatez-vous un manque de professionnels pour ces activités ?
Oui. Il y a un grand manque de professionnels pour ces activités. Beaucoup de jeunes commencent leur formation, mais plus de 50 % abandonnent en cours de route. Pour contrer ce manque, il faut pouvoir offrir à ces jeunes une réelle perspective d’avenir et d’évolution. Il faut donner à chacun l’occasion d’embrasser cette carrière et de faire ses preuves, car on privilégie souvent les meilleurs au détriment des plus nécessiteux.

D’autres mesures peuvent être prises pour redorer le blason de notre profession. Il faudrait, par exemple, aller à la rencontre des jeunes pour leur expliquer notre métier et les accompagner dans leur démarche. En somme, il faut repenser tout le système de formation des métiers de bouche et les méthodes d’accompagnement.

Les hôtels sont confrontés à la concurrence des bateaux de croisière en termes de recrutement. Cette compétition a-t-elle contribué à faire grimper les salaires dans ces domaines d’activités ?
Bien évidemment, vu que la demande est plus importante que l’offre. En ce qui concerne les jeunes non formés, on a tendance à payer plus cher pour avoir du personnel, sans avoir la volonté de le former. Mais en privilégiant cette méthode, nous risquons de le payer très cher à terme. Il y a aussi le fait que beaucoup veulent se rendre à l’étranger pour des raisons financières, mais je leur recommande vivement de gagner en expérience à Maurice avant de voler vers d’autres cieux.

Est-ce qu’il y a une grande demande de la part des jeunes mauriciens pour se perfectionner dans ce domaine ?
Comme je le disais précédemment, la demande est très élevée, mais c’est la méthode qu’il faut repenser. Il existe certes des écoles très prestigieuses. Sauf que je pense que le niveau de formation a baissé. Pour des raisons budgétaires notamment, les jeunes ne travaillent pas tous avec les mêmes produits aujourd’hui. Tout dépend donc de l’école et de l’établissement dans lequel ils font leur stage. Cela joue un rôle important dans leur formation.

Il me semble qu’il y ait beaucoup de restaurants qui prennent des apprentis, histoire d’avoir de la main-d’œuvre pas chère et sans vouloir réellement former ces jeunes. Je trouve cela dommage. Il faut faire attention dans le choix de l’établissement dans lequel on souhaite faire son apprentissage.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !