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Patricia Adèle : l’altruisme à fleur de peau

Cette formatrice en ‘skill management’ est à la tête de Caritas Maurice.

Elle vient d’un quartier dit chaud. Avec une profonde conviction, elle s’est frayée son chemin entre l’école Emmanuel Anquetil et le collège London. Aujourd’hui, elle souffle à l’oreille des nécessiteux. Voici Patricia Adèle-Félicité, dit Pat. 

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Le débit facile, polo shirt au logo de Caritas, cette femme donne l’envie de discuter. Tellement qu’elle a de l’allant, du bagout et de l’amour pour autrui. Son altruisme à fleur de peau est contagieux. Rien que ça ! Elle est là, toute simple, ses clés de voiture et son portable devant elle, Pat est prête à en découdre avec nous.

Pat ne se destinait au départ pas à être ce qu’elle est, soit à la tête de Caritas Maurice. « Mon premier job était ‘sample machinist’, puis j’ai travaillé pour la styliste Jane Vanessa, ce qui m’a permis de développer ma créativité qui était déjà assez pointue », nous dit-elle tout sourire. Issue d’une famille très modeste, le papa étant maçon, la maman garde-malade, un frère aîné qui est dans le secteur parapublic aujourd’hui, une petite sœur qui est prof d’aérobic à son compte, Pat est une femme qui se dit comblée aux côtés de son mari Denis et de son fils Ryan, étudiant à l’université. 

Sortir de là où elle vient, des fois c’est souvent cette adversité qui la pousse à viser plus haut, à avoir cette envie de tout surmonter, pour devenir une femme respectable, si ce n’est plus. C’est cela la beauté de la vie, estime Pat. 

« Avoir fréquenté le collège London du ‘bolom’ Harold Chan Lam, lui qui a toujours mené ses ‘enfants’ à la baguette, il fallait obligatoirement faire des efforts pour réussir académiquement et dans la vie, on lui doit bien cela », dit une Pat toute souriante.

Qu’est-ce qui l’a poussée vers ce job, soit à apporter son aide, son oreille, son attention et sa gentillesse aux autres ? Réponse : « Petite, j’étais engagée avec les missionnaires de la charité et j’ai eu le virus qui est le sens du service, puis j’étais ‘coworker’ de la congrégation de Mère Teresa. Et, grâce au diocèse de Port-Louis, j’ai atterri au Caritas.»

Ainsi, ce bout de femme a servi au départ la branche de Caritas de son quartier, « une région qui était hautement stigmatisée, on nous collait des étiquettes, mais moi je me disais que ce n’est pas l’endroit où l’on naît qui nous définit et cela m’a forgée davantage.»

Tellement qu’elle se donne à fond, elle a gravi les échelons pour atterrir au Caritas de Maurice et cela fait 30 ans depuis qu’elle consacre sa vie au service des autres. « Je suis formatrice en ‘skill management’ et j’apporte mon savoir-faire au service de ceux que je côtoie, mais on sent qu’il y a une stigmatisation ambiante qui couve dans notre société », lâche-t-elle.

Est-ce à dire que ses racines de Roche-Bois est fermement ancrée dans sa tête et qu’elle voit du noir même quand il y a du gris ? Peut-elle faire la part des choses et faire un tri entre ce qui est bien et ce qui est trash ? A ces questions, Pat soupire et répond : « Ne nous voilons pas la face et regardons les choses crûment : il y a encore de la stigmatisation, même si elle est moins prononcée maintenant, il est vrai, mais elle pèse encore sur notre société.»

Pat, grâce à Caritas, est devenue coordinatrice de cette Ong pour l’océan Indien. Ce qui lui a permis d’aller souvent en mission à l’étranger : « J’ai eu de l’expérience en voyageant, que ce en Afrique, en Asie ou ailleurs. Je peux dire que comparé à certains pays, comme le Cambodge, le Mozambique ou d’autres pays, nous pouvons nous estimés heureux. Ailleurs, la pauvreté est visible, les bidons-villes (slums) sont inhumains, mais les gens y vivent normalement croyant que c’est tout à fait normal. A Maurice, il y a la pauvreté, mais pas à un tel niveau.»

Mais, il y a quelque chose qui chiffonne Pat, même si elle ne s’étale pas trop sur le sujet : lutter contre le système. « Il y a le problème d’employabilité d’une section de notre population, il y a le système de l’éducation qui est en train de créer des monstres. Si on n’y prend garde, le système va créer un génocide avec nos jeunes.»

Le constat est quelque peu sévère, mais cette femme a côtoyé trop de monde dans des quartiers misérables, des jeunes qui n’ont plus de repères, qui ne font que copier-coller de ce qu’ils voient autour d’eux : « Je le répète, on tue nos jeunes, c’est du génocide, mais il y a des solutions, comme la discrimination positive, revoir l’encadrement des parents, inciter vers l’enseignement de plus de valeurs humaines, revenons à l’ancienne et nous construirons de vrais patriotes comme il en existait jadis.»

Est-elle en colère en constatant cela ? « Non, je ne suis pas en colère, de mon côté, je fais ce que je peux pour les autres, je donne ce que j’ai reçu dans la vie aux autres, je donne de mon temps autant que je peux et je le ferais toujours », soutient-elle.

 

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