Elle pourrait symboliser l’âge d’or de la pâtisserie à Plaine-Verte, et même au-delà. Sharfaa Boodoo réussit la transition vers une pâtisserie moderne, répondant aux attentes des Port-Louisiens post-2000. Tout cela, sans jamais renier les gâteaux traditionnels proposés dans sa boutique, Tout De Sweet.
Longtemps restés dans l’ombre des cuisiniers, les pâtissiers et pâtissières tiennent aujourd’hui leur revanche. Cela est notamment rendu possible grâce à des femmes audacieuses qui bousculent les codes de la pâtisserie mauricienne traditionnelle.
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À l’angle des rues China et Magon, à Port-Louis, dès qu’il franchit la porte de Tout De Sweet, le client est tenté par le péché de la gourmandise tant l’endroit est achalandé. À elle seule, Sharfaa Boodoo, chaleureuse et souriante, incarne cette nouvelle génération de pâtissiers. Elle est épaulée par ses parents et sa jeune salariée, Warda. Ensemble, elles assurent la transition entre les attentes modernes et les goûts de la clientèle traditionnelle.
Trois facteurs ont permis à la jeune femme de répondre à ces attentes : d’abord une passion pour la cuisine depuis sa plus tendre enfance, puis des études en Business Administration qui l’aident à cibler la bonne clientèle. Enfin, une véritable passion chevillée au corps la pousse à rechercher constamment l’excellence.
« …qualité et délais… »
« On ne peut pas se permettre d’économiser en qualité et en délais, car la concurrence n’est pas loin, un client perdu un jour, ça va, mais deux jours, il ira voir ailleurs. La confiance est perdue. Il ne faut pas négliger ces détails », explique-t-elle.
Certes, depuis 2019, date où elle a ouvert sa pâtisserie avec le soutien de ses parents, elle a pignon sur rue, mais elle veille constamment à la qualité. « Notre carte, ce sont quelque 50 références, avec des pâtisseries qui partent parfois plus vite selon la clientèle », fait ressortir Sharfaa, fille de Yusuff, médecin, et Sultana, femme au foyer, domiciliés à St-François.
Avant de réaliser sa vocation et après les études, elle s’est initiée aux bases de la pâtisserie dans un centre de formation. « J’ai appris les techniques de la pâtisserie, dont la préparation des pâtes, pour les feuilletés, croissants et autres massepains et comment bien choisir ses crèmes, entre autres », confie-t-elle. Puis, elle consolide cet acquis au sein d’une pâtisserie à Arsenal où elle se familiarise avec les pâtisseries « customisées » et autres décorations.
Mais bientôt l’envie de se mettre à son compte prend le dessus. Elle se souvient encore de ce décembre 2029, lorsque la pâtisserie a ouvert ses portes : « J’ai découvert un emplacement à l’endroit où je me trouve actuellement. Comme c’était un magasin où on vendait des abat-jours, il me fallait un budget approprié pour réaliser des travaux propres à une pâtisserie. Il fallait une cuisine spéciale avec un four à gâteaux, des vitrines et des décorations ».
« Ce n’était pas facile, je n’étais pas connue, j’ai commencé par confectionner des gâteaux traditionnels et d’autres comme les cheese-cakes déclinés en blue et le red velvet, entre autres », dit-elle. Entre les travaux, l’installation du matériel et les recettes à mettre en vitrine, Sharfaa comprend tout de suite qu’elle a son destin entre ses mains : « Je n’ai jamais voulu travailler dans un bureau entre quatre murs, il me fallait bouger, dialoguer, partager, relever des challenges. J’étais prête à jeter toutes mes forces dans ce qui était ma vocation ».
Variéte de Gateaux
Comme partout à Maurice et dans le monde, la pandémie de Covid-19 frappe brutalement les commerces les forçant à cesser leurs activités. Les conséquences économiques engendrées par la pandémie seront encore plus aiguës avec la baisse de la roupie, la hausse du coût du fret et celle des denrées de base importées.
« Heureusement que mes parents m’ont aidé à la réouverture, toutefois les coûts de production avaient augmenté pour tout le monde et ça a rejailli sur les coûts à la vente. Mais, heureusement, tous les Mauriciens l’avaient compris », fait-elle valoir.
Avec quelques employées à mi-temps, sa mère à la caisse en alternance avec Warda, son père assurant par intermittence les livraisons de commandes et de transport de matières premières, Sharfaa arrive à rebondir. Elle confie : « Warda est partout à la fois : en pleine cuisine pour parfaire son apprentissage, à la caisse pour accueillir les clients, et derrière les écrans pour assurer la présence digitale de la pâtisserie ».
Totalement investie dans la confection de ses gâteaux, outre son souci d’équilibrer les coûts de production et autres dépenses liées aux frais fixes, Sharfaa a aussi un œil rivé sur le retour de l’appréciation client. « C’est un élément crucial pour tout commerçant : il faut savoir si l’on est sur la bonne voie. Pour l’instant, tout va bien. J’ai une clientèle fidèle, notamment de nombreux jeunes à la sortie des écoles et collèges, ainsi que des passants qui observent avant d’entrer. C’est pourquoi nous avons installé quelques tables et chaises, pour leur permettre de consommer des boissons chaudes. Les clients font attention à trois choses : l’accueil, la propreté et la qualité ainsi que la variété des gâteaux. Le prix reste également déterminant : à Plaine-Verte, si c’est trop cher, les gens vont voir ailleurs », fait-elle ressortir.
Les préférences de la clientèle
Aujourd’hui, après trois années à la tête de sa pâtisserie, elle connaît bien les préférences de sa clientèle, des enfants aux adultes, en particulier des jeunes très présents sur les réseaux sociaux. Elle observe aussi une île Maurice de plus en plus ouverte à la gastronomie.
« Le défi aujourd’hui est d’offrir le choix afin de capter tout type de clientèle, mais aussi de consolider la diversification et de respecter les délais, dont des commandes pour les fêtes, mariages, fiançailles, anniversaires, entre autres », dit celle dont le péché mignon reste toujours le biryani local.
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