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Parcours du combattant pour les proches des personnes portées disparues  

Le présumé meurtrier a conduit les enquêteurs à la fosse où il avait enterré la femme de ménage.
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Il y a au moins deux cas de disparition par jour à Maurice. Chaque cas est traité différemment. Cependant, cette méthode n’a jamais fait ses preuves. Surtout, lorsqu’on sait que cela fait presque deux décennies que la police recherche un garçon âgé de neuf ans, au moment de sa disparition.  

Les Mauriciens ont encore en mémoire l’affaire Ackmez Aumeer. C’est un boulet que la police criminelle mauricienne traîne depuis maintenant 18 ans. Ce garçon de neuf ans jouait dans sa cour à Camp-Chapelon, à Pailles, ce 25 juillet 2003, lorsqu’il fut porté manquant. Les multiples enquêtes de la police mauricienne et même le recours à des experts français spécialisés dans des « Cold Cases » s’étaient révélés vains. Avec la découverte des restes de Bibi Zahira Ramputh et d’Hema Coonjobeeharry gardés par Umyad Ayyaz Ebrahim dans le verger d’arbres à litchis le mois dernier, des interrogations sont de nouveau soulevées quant à la capacité de la police à enquêter sur des cas des personnes portées manquantes. 

Hema Coonjobeeharry.
Hema Coonjobeeharry.

Les proches de Hema Coonjobeeharry, la femme de ménage de Bambous, ne gênent pas pour dire que les remarques des policiers de la localité leur sont restées à travers la gorge. En effet, des agents leur ont fait comprendre à maintes reprises qu’à 40 ans, Hema Coonjobeeharry était une adulte qui pouvait vivre sa vie à sa guise. Des réflexions qui ont accablé les proches de la quadragénaire, car ils disent avoir ressenti que leur proche était en danger. Cette dernière n’avait pas donné signe de vie depuis le lundi 10 mai, jour de son anniversaire. 

Quinze jours après la découverte macabre du cadavre de Hema, Nisha, la sœur de la victime, relate à la police que sa soeur s’était rendue à un rendez-vous avec Umyad Ayyaz Ebrahim, avec lequel elle comptait refaire sa vie. Nisha explique qu’à chaque fois qu’elle tentait d’appeler sa sœur, c’est Umyad Ayyaz Ebrahim, aussi dit Poule ou Abhi, qui décrochait le téléphone. « Sizan mo ser inn res kot mwa, ninport ki manyer li ti bizin pran enn telefon pou koz ar nou. Misie-la ti pe dir nou Hema pe dormi ou alor li malad. Ek ki apre li pou koz ar nou », explique la sœur. 

Six jours plus tard, la famille a décidé de s’en remettre à la police. « Sak fwa lapolis dir li ena 40 an, ki li majeur. Dis kou zot pe pran so nimero telefon », déplore Nisha. Le septième jour, c’est la mère de Hema qui s’est rendue à son tour au poste de police. « Mo mama inn ale 8h00, zot inn dir li revini 14h00. Zot finn repran nimero telefon Hema, zot inn telefone, misie-la finn dir wi mo ser avek li. Lerla, polisie la finn dir mo mama ale kan gagn nouvel pou fer li kone. Dan koler mo mama finn dir zot apre lamor latizann », explique Nisha. 

Bibi Zahira Ramputh.
Bibi Zahira Ramputh.

Finalement, ce n’est que le samedi 22 mai qu’une déposition pour « missing » a été enregistrée en bonne et due forme. « Parski mo nies konn enn polisie, lerla li finn fer demars pou ki nou kapav raport ka la. Avan zot ti pe nek dir ki li ena 40 an », poursuit la jeune femme. Nisha dit qu’elle avait de mauvais pressentiments pour sa sœur. Elle craignait déjà le pire. « Mo ti pe anvi tann mo ser so lavoi, mo ti dir lapolis la ki pe gagn kadav dimoun partou ek ki mo ser bizin dan enn problem. Si nou ti kone kot garson la reste nou pa ti pou atann lapolis, nou ti pou pran mo ser so foto pou al rode, Kirpip partou », lance-t-elle avec une profonde tristesse.  

Entretemps, des Field Intelligence Officers (FIO) de la Criminal Investigation Division (CID) de la Western Division s’étaient lancés aux trousses d’Umyad Ayyaz Ebrahim. Une vérification auprès de l’État civil les a menés à Grand-Port alors que l’adresse qu’il a donnée à l’opérateur de téléphonie mobile était à Forest-Side. En deux occasions, les policiers ont fait chou blanc. C’est en prenant connaissance de la découverte des restes de Bibi Zahira Ramputh à Mare-d’Albert que les limiers ont aiguillé la Major Crime Investigation Team (MCIT) sur le cas d’Hema Coonjobeeharry. 

Confronté aux policiers quant à la disparition d’Hema Coonjobeeharry, le présumé meurtrier est alors passé aux aveux. Il a alors mené les enquêteurs à la fosse où il a enterré la femme de ménage. Celle-ci avait été mise en terre à même pas dix mètres de la tombe de la première victime du tueur. Elle aussi, n’avait plus donné signe de vie depuis des mois.  

14 « missing persons» pas retrouvées depuis 2019  

Chaque jour, il y a au moins deux cas de disparition à Maurice. En 2019, des 773 disparus, 741 ont été retrouvés sains et saufs. Certains se sont donné la mort et d’autres ont été victimes d’un meurtre. Et 18 cas comprennent des disparitions en mer. Cependant, pour 14 d’entre eux, c’est toujours le mystère. L’an dernier, sur les 574 disparitions, 532 sont rentrées chez elles. De janvier à avril de cette année-ci, la police a recensé 178 « missing » et 130 sont sains et saufs. Bien qu’ils soient nombreux, cependant chaque cas est traité différemment. Dans un premier temps, les policiers dressent le profil de la personne disparue. Un policier explique que lorsqu’une plainte est consignée, la photo de la personne disparue ainsi que les détails de sa physionomie doivent être remis à la police (voir tableau). « Nou get gravite ka mising la, ena de foi ou gaygn ban zenn tifi sove avek kopin ou madam sove avek misie, apre zot al met en lantre istasyon pou dir zot finn ale volonterma », explique un policier qui dit être habitué à ce genre de cas. Il fait ressortir que les agents doivent réunir le maximum d'informations sur la personne portée disparue, notamment ses fréquentations. Pour les cas de mineures qui sont soupçonnées d'avoir élu domicile chez leur petit ami, le dossier est remis aux enquêteurs de la Brigade des Mineurs. « Quand nous démarrons une enquête, la CID est sollicitée si on soupçonne qu’il y a un ‘foul play’ », explique un limier de la criminelle. « Et si le disparu est un enfant, des recherches sont immédiatement enclenchées par différentes unités de la police », conclut-il. 

 

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