Il y a exactement 70 ans aujourd’hui, la presse mauricienne de l’ère coloniale accueillit un nouveau venu. Le 14 août 1954, deux jeunes Travaillistes, Beekrumsingh Ramlallah et Kher Jagatsingh, lancèrent l’hebdomadaire Mauritius Times comme outil de combat politique.
De l’époque française à la première moitié du XXe siècle, la presse mauricienne fut essentiellement contrôlée par l’oligarchie économique et le pouvoir local favorisé par l’administration coloniale britannique. Il y eut quelques exceptions, dont La Sentinelle de Rémy Ollier et quelques publications en langues orientales qui échappèrent au contrôle de l’oligarchie.
Ainsi, l’arrivée de l’hebdomadaire Mauritius Times consolida la présence du Parti travailliste (PTr) dans la presse. Advance fut lancé vers la fin des années 1930. Ce quotidien travailliste, devenu best-seller dans les villages, fut fortement soutenu par des commerçants de Port-Louis et des professionnels.
Contrairement à Advance, Mauritius Times se distingua par sa pugnacité dans la lutte pour les réformes constitutionnelles – en 1954, le suffrage était bien limité – pour un système électoral correct et démocratique et enfin pour l’indépendance.
Il serait utile de souligner que sans le combat acharné du tandem RamlallahJagatsingh, le Parti mauricien socialdémocrate (PMSD) se serait porté au pouvoir en faisant installer un nouveau système électoral et en jouant la carte ethnique de façon encore plus divisionniste. Des années 1950 à 1967, le Ralliement mauricien, devenu le Parti mauricien et finalement le PMSD, connut une progression fulgurante pour atteindre 44 % des voix en 1967.
Il faudrait également retenir la vigoureuse campagne menée par Beekrumsingh Ramlallah et Kher Jagatsingh contre le projet d’introduction du système de représentation proportionnelle (PR) à Maurice, vivement réclamé par le PMSD. Le système PR aurait divisé et sous-divisé la population au point où le PMSD, en invitant plusieurs segments de la population à combattre une composante particulière, aurait facilement remporté les élections.
Les Britanniques, qui généralement ne favorisent pas la méthode PR, l’introduisirent quand même dans leur colonie de Guyane en Amérique latine. Ce système leur avait permis d’empêcher la prise de pouvoir par Cheddi Jagan, décrit comme un communiste, qui auparavant avait rallié une majorité de l’électorat de son pays.
Les journalistes Ramlallah et Jagatsingh s’engagèrent aussi dans la politique. Ils se firent élire en 1959 comme candidats travaillistes. Ils furent chaudement accueillis, ces deux vétérans du Mauritius Times, lorsqu’ils vinrent soutenir les jeunes journalistes mauriciens opposés à une réforme liberticide que le gouvernement Jugnauth voulait introduire en 1984.
Le Mauritius Times, contrairement aux journaux partisans et même à d’autres titres, réalisa l’exploit de se maintenir en vie de façon ininterrompue, et cela depuis 1954. Depuis quelques années, le support papier du quotidien a été remplacé par une version électronique sous la responsabilité de Madhukar Ramlallah, fils de l’ancien fondateur.
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