Il est parti, mais il fera toujours résonner l’hymne patriotique dans le cœur des Mauriciens. Philippe Gentil s’est éteint à l’âge de 93 ans, le mardi 26 janvier. Le compositeur de « Motherland » était un homme amical, aimable et plein d’humour.
Chaque sourire soulevait sa moustache crayon. Philippe Gentil était loquace dans sa frêle silhouette. Il ne fera plus rire ses connaissances. Le compositeur de l’hymne national de Maurice est décédé au petit matin du mardi 26 janvier à l’hospice à Trianon.
« Il va me manquer », dit son fils unique Jacques Mario Gentil dans un torrent de larmes. « Il m’a transmis sa passion pour la musique. Je suis la personne que je suis aujourd’hui grâce à papi », ajoute le dessinateur d’architecture.
Il vit à Melbourne en Australie et ne pourra assister aux funérailles de son père. Il raconte avoir reçu un message d’un ami proche de Philippe Gentil. « J’étais toujours au lit, car le 26 janvier c’est la fête nationale an Australie et c’est férié. Dans le message, son ami me demande s’il peut m’appeler. Je lui ai donné un coup de fil et j’ai appris la triste nouvelle », raconte Jacques Gentil, 59 ans. Il indique que son père allait fêter ses 93 ans, le 9 février.
Philippe Gentil a été placé dans un hospice à Trianon depuis environ cinq mois. « À son âge, papi ne pouvait pas parcourir de longues distances à pied. Les chutes se multipliaient. On nous a recommandé un aide-soignant à domicile ou un hospice. Nous avons opté pour la deuxième, mais ce n’était pas une décision facile », confie-t-il.
Un jour, il apprend que son père est tombé et s’est blessé à la hanche. Il a dû subir une intervention. Une deuxième était prévue, mais n’a pu se faire. Philippe Gentil est retourné à l’hospice.
Funérailles
« Papi n’était pas orgueilleux. Il parlait facilement à son entourage et faisait rire les autres. Mes parents se sont séparés quand j’avais 9 ans », relate Jacques Gentil. Quelque temps après, Philippe Gentil s’est réuni avec son épouse et ses enfants. Il y a quatre ans, il a cessé d’enseigner la musique.
Le convoi mortuaire sortira de la chapelle ardente du couvent de Filles de Marie, à Bonne-Terre, à 13 heures ce mercredi 27 janvier. Il se dirigera au cimetière Gébert à Les Salines, à Port-Louis.
Hommage
Le ministère des Arts et du Patrimoine culturel présente ses plus vives sympathies à l’épouse de Philippe Gentil et à sa famille. « Le départ de Philippe Gentil est une perte pour la nation. Son nom et sa contribution sont à jamais gravés dans l’histoire du pays. Sa composition est remplie d’émotion et transmet cet esprit de patriotisme qui unit les Mauriciens autour du “Motherland”. Durant sa carrière, il a été une grande inspiration et un guide pour beaucoup de musiciens et d’artistes. Il a sa place dans notre mémoire, notre cœur et l’histoire », indique Avinash Teeluck, ministre des Arts et du Patrimoine culturel.
La musique de père en fils
Philippe Gentil a grandi à Port-Louis. Son père était musicien et photographe. « Papi faisait aussi de la photographie. Il développait ses pellicules à la maison. Il n’était pas porté vers le dessin, mais il comprenait les techniques de base. Papi préférait pratiquer la musique », raconte Jacques Gentil. Il ajoute que Philippe Gentil a travaillé pendant une trentaine d’années comme clerc de notaire. Puis, il a intégré la force policière et l’orchestre de la police.
« Chaque matin, il remplissait ses pronostics de football aux toilettes. Il y lisait aussi ses journaux et fumait une cigarette. Un jour en 1967, il est sorti des toilettes et a fredonné un air comme pam pam pampapam… Il m’a annoncé qu’il y avait une compétition d’hymne national. Il disait que la mélodie lui est venue dans la soirée pendant qu’il dormait », dit Jacques Gentil. Sans en parler à Philippe Ohsan, chef d’orchestre de la police, Philippe Gentil a demandé aux musiciens de jouer les partitions. Mais Philippe Ohsan était là et a écouté la prestation. Ce dernier a alors posé les paroles de « Motherland » écrit par Jean-Georges Prosper. Les paroles et la musique concordaient. Le projet a remporté la compétition et l’hymne national a vu le jour.
Le 12 mars 1968, « Motherland » a retenti au Champ de Mars. « À l’école, on ne chantait plus “God Save the Queen”. J’avais 7 ans et j’étais animé par un sentiment de fierté, car je savais que papi a contribué au “Motherland” », dit-il.
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