Société

Mœurs: Inquiétante ampleur de l’alcoolisme féminin

L’alcoolisme a de multiples effets néfastes : disputes conjugales, éclatement de la famille, divorces. Et la liste s’allonge : fausse couche, accouchement prématuré ou encore Syndrome d’alcoolisation  fœtale. Environ 240 femmes sont admises à l’hôpital chaque année pour des problèmes liés à la consommation de boissons alcoolisées. En outre, le syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF) chez la femme qui consomme des boissons alcoolisées durant sa grossesse, entraîne des conséquences néfastes pour l’enfant qu’elle porte. Ainsi, 150 bébés seraient concernés à Maurice  chaque année...

« Maman, arrête de boire ! »

[col-md-4]Anjali, 19 ans, a vu sa mère sombrer dans l’enfer de l’alcool lorsque son père a abandonné le domicile conjugal. C’était il y a 3 ans. Difficile pour cette jeune fille, l’aînée d’une fratrie de 3 enfants, de faire face à cette situation. C’est désormais elle qui doit s’occuper des plus petits… et de sa mère. Après beaucoup d’hésitations, la jeune fille accepte de témoigner « pour que toutes les mamans qui se saoulent, sachent à quel point elles nous font du mal, à nous les enfants… » [/col-md-4] [col-md-4] Sa mère attendait son 4e enfant lorsque son mari a déserté le toit familial. Anjali se rappelle de ce jour où tout a basculé : « Mes parents se disputaient souvent et mon père a menacé à plusieurs reprises de quitter la maison. Puis, un jour ma grand-mère lui a dit que mon père est parti pour l’Angleterre. Elle s’est assise par terre, effondrée. Elle criait de toutes ses forces. Mon père était alors déjà dans l’avion. Je n’avais jamais vu ma mère dans un tel état. J’ai toujours pensé qu’elle était une femme forte. [/col-md-4] [col-md-4]Ce soir-là, elle a vidé un verre, puis un autre… c’était le verre de trop ! » se remémore-t-elle. Anjali raconte encore le soir où sa mère avait vidé les placards à la recherche de toutes les boissons alcoolisées. « Certaines bouteilles n’avaient pas été ouvertes depuis des mois, depuis qu’elle les avaient eues en cadeau pour Noël. Elle a bu jusqu’à sa mort ! L’alcool a détruit ma famille et tué ma mère. L’enfant qu’elle portait n’est jamais venu au monde  », dit-elle. [/col-md-4] [row custom_class=""][/row]

« L’alcool a détruit ma famille et tué ma mère… »

Après la mort de sa mère, on a placé ses frères et sœurs dans des centres d’accueil. « Elle nous a fait beaucoup souffrir. Il y avait toujours une bouteille de boisson alcoolisée qui traînait à la maison, même quand on n’avait rien à manger. Elle ne travaillait pas et passait son temps à demander de l’argent autour d’elle sous prétexte qu’elle devait nous nourrir. Cependant, on devait, à notre tour, quémander de la nourriture aux voisins. Je ne lui pardonnerai pas. Elle nous a abandonnés quand elle sombrait dans l’alcool. Elle a refusé de s’en sortir malgré toutes les mains tendues vers elle… Je lui en veux toujours car elle me manque tellement », lance Anjali les yeux remplis de larmes. Cette histoire ressemble aussi à celle de plus de 200 femmes dans le pays. Effectivement, selon les derniers chiffres, entre 222 à 240 femmes sont admises chaque année à l’hôpital Brown-Séquard pour des problèmes liés à l’alcoolisme. Priscilla Martial, de l’association étoile de l’Espérance, apporte son témoignage : « Nous savons très bien que ces chiffres sont loin de la réalité. Ils concernent surtout les femmes qui sont admises à l’hôpital Brown-Séquard parce qu’elles étaient dans un état d’alcoolisme avancé. Il y a aussi d’autres femmes dont les cas n’attirent pas toujours l’attention des médecins. Puis il y a celles qui sont dépendantes de boissons alcoolisées mais qui ne viendront jamais à l’hôpital », confie-t-elle. L’Association étoile de l’Espérance tire la sonnette d’alarme. « Il faut en parler. Les gens ont vite réagi après la diffusion ou la publication de nos messages. Il y a eu 77 panneaux d’affichage à travers l’île, puis des spots publicitaires et des brochures distribuées aux professionnels et au grand public. Nous avions organisé une conférence de presse le 8 septembre avec tous ceux qui travaillent dans ce milieu », explique-t-elle.

Consommation et grossesse

[col-md-8]Le syndrome d’alcoolisation fœtale (voir plus loin) est considéré comme étant « la conséquence la plus grave de l’exposition prénatale à l’alcool », selon les organisations militant contre la consommation de boissons alcoolisées durant la grossesse.  L’alcool peut non seulement causer une fausse couche ou un accouchement prématuré mais aussi un retard dans le développement du fœtus. Ses effets sont particulièrement néfastes sur son système nerveux. Parmi les autres conséquences chez l’enfant : une malformation physique mais aussi des problèmes d’attention, [/col-md-8] [col-md-4]de mémorisation, d’apprentissage et de comportement.Les associations insistent sur le fait que « chaque goutte de boisson alcoolisée peut endommager le fœtus et que boire un seul verre peut avoir des conséquences désastreuses… »[/col-md-4] [row custom_class=""][/row]
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Syndrome d’alcoolisation fœtale : Dr Thierry Maillard : « 150 bébés seraient affectés à Maurice »

Alors que le ministre de la Santé, Anil Gayan, a répondu que seuls deux cas ont été répertoriés à travers le pays entre 2005 et 2009, le Dr Thierry Maillard, alcoologue, estime que « 150 bébés seraient concernés par le Syndrome d’alcoolisation fœtale à Maurice ». Nous l’avons rencontré à la Maison Eureka le 8 septembre dans le cadre d’une formation d’étoile de l’Espérance. Une initiative qui fait partie de la campagne sur les méfaits de l’alcool durant la grossesse. « Le dépistage précoce est primordial. Il faut en parler autour de soi, aux familles et aux jeunes. Le silence ne va pas aider. Il est aussi important de mener une étude. Si elle n’a pas encore été faite, il faut réagir et faire les dépistages le plus vite possible. Plus on agit vite, plus on a des chances d’aider l’enfant. Il faut aussi mettre en place de nouvelles structures pour venir en aide à ces femmes enceintes qui consomment  des boissons alcoolisées », avance-t-il.  Il ajoute que la femme enceinte qui boit met en danger la vie de son enfant. « Pendant que la mère est gaie, l’enfant est ivre. Le fœtus ne peut éliminer l’alcool. Tout ce que la mère boit va directement au placenta. On peut même dire que le fœtus est deux fois plus affecté », souligne-t-il.     [row custom_class=""][/row]

Des idées erronées

• Seuls les enfants nés de mères dépendantes sont  concernés par les séquelles d’une exposition prénatale à l’alcool. • Il ne faut pas prendre des boissons alcoolisées au premier trimestre… après pas de problème. • Une ivresse occasionnelle ne présente pas de risque. • Le vin, la bière et le champagne sont moins dangereux que les alcools  dits «forts». • La bière favorise l’allaitement. • Les patientes, issues de milieux favorisés, ne sont pas concernées. Pendant la grossesse, le tabac est plus dangereux que l’alcool. • S’il y a un problème, cela se voit à l’échographie ou à l’examen clinique à la naissance de l’enfant.

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Assimilation de l’alcool

Selon l’association Aide Alcool, de plus en plus de femmes consomment des boissons alcoolisées en plus grande quantité et de manière plus régulière. Elle rappelle les points suivants : • Les femmes réagissent plus vite et plus intensément aux effets de l’alcool que les hommes. Elles sont 20 à 30 % plus saoules pour une même quantité de boisson alcoolisée. • Un verre standard de boisson, qui contient 10 grammes, conduit à un taux d’alcoolémie de 0,2 % chez les hommes et 0,3 % chez les femmes. • Ces dernières pèsent, en effet, en moyenne moins lourd, ont moins de tissu musculaire et moins de liquide présent dans leur organisme. Et l’écart se note également au niveau du métabolisme lui-même. • Le cœur pompe le sang à travers tout le corps et distribue l’alcool dans tout le liquide de l’organisme. Or, celui-ci est de 34 litres en moyenne chez les femmes contre 42 litres pour les hommes. Par conséquent, à quantités égales, l’alcool sera contenu dans un volume de liquide plus réduit chez les femmes. • Et celles-ci ont aussi un plus petit foie, ce qui ralentit la décomposition de l’alcool. • On peut donc affirmer que les femmes sont plus vulnérables que les hommes face aux effets néfastes de l’alcool. En cas de consommation excessive, les dommages causés au foie sont plus graves et apparaissent aussi plus rapidement. Les femmes souffrent également plus vite de lésions cérébrales. • Enfin, il ne faut pas oublier les répercussions typiquement « féminines » en cas de consommation excessive d’alcool: risques accrus de cancer du sein, dérèglement du cycle menstruel, risques plus élevés de fausse couche et syndrome d’alcoolisation fœtale.

10 façons de leur venir en aide

1. Les symptômes d’une consommation de boissons alcoolisées à risque ne sont pas toujours visibles… à l’examen clinique (notamment par les traits physiques ou le comportement de la patiente), biologique, échographique. 2. Ne pas en parler, c’est prendre le risque de « passer à côté ». 3. Cela concerne toutes les femmes… indépendamment de leur origine socio-économique ou culturelle. 4. C’est tabou, les femmes n’en parlent pas. Il est rare qu’elles abordent spontanément le  sujet en consultation. 5. Donner l’information, c’est offrir la chance…  à la femme de réfléchir à ce qui est bon pour elle et pour son enfant. 6. Il n’est jamais trop tard…  l’arrêt de consommation d’alcool à n’importe quel moment de la grossesse entraîne l’arrêt de ses méfaits sur le fœtus. 7. C’est rapide et efficace… Cela ne demande pas plus de temps que l’information sur le tabac, le sommeil, l’alimentation… et a un impact réel sur la diminution, voire l’arrêt de la consommation d’alcool. 8. C’est de notre responsabilité professionnelle… de proposer une démarche d’information et un accompagnement personnalisé aux femmes présentant des symtômes excessifs d’alcoolisation. 9. Plus on en parle systématiquement, plus on est à l’aise en cas de situation problématique. 10. C’est une première étape pour aider les femmes les plus à risques et leur proposer un accompagnement et pour elles et pour leur enfant.

Pour tout conseil, veuillez contacter étoile d’espérance sur le 427 0542
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