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«Missie Moustass» diffuse des extraits d’appels téléphoniques sur Facebook - Dev Jokhoo : «La police aurait dû retracer l’auteur en quelques minutes»

  • L’ancien directeur du National Security Service met en doute l’hypothèse d’une utilisation de l’intelligence artificielle

Avant même le début d’une enquête policière, les Casernes centrales auraient dû être en mesure de retracer l’auteur en quelques minutes. C’est ce qu’affirme Dev Jokhoo, ancien directeur du National Security Service (NSS), sollicité par Le Dimanche/L’Hebdo. Il réagit à la diffusion massive de bandes sonores de conversations téléphoniques entre des personnalités politiques, des avocats, des journalistes et une ambassadrice. Depuis vendredi soir, 18 octobre, des extraits pleuvent sur une page Facebook et TikTok intitulée Missie Moustass. Si la page Facebook a été désactivée samedi après-midi, le compte sur TikTok était toujours disponible à samedi soir.

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Parmi les politiciens ciblés, on retrouve Xavier-Luc Duval, ou plus précisément son fils Adrien, Navin Ramgoolam, Paul Bérenger, Shakeel Mohamed, Rajesh Bhagwan, ainsi que des hommes de loi et des figures importantes du gouvernement sortant, comme Ken Arian et Zouberr Joomaye, ainsi que le commissaire de police et des avocats. Plusieurs d’entre eux ont déjà confirmé la véracité de ces conversations téléphoniques. 

L’ancien homme fort des Casernes centrales en matière de sécurité nationale explique que même s’il n’est plus en fonction depuis dix ans, il est relativement informé du système de travail actuel. Dev Jokhoo fait mention du dispositif de caméras Safe City, qui aurait des capacités bien au-delà de l’enregistrement vidéo. L’ancien directeur du NSS indique avoir des informations sur une connexion entre l’IT Unit de la police et une équipe de Mauritius Telecom (MT) basée aux Casernes centrales. Selon lui, l’antenne relais des Casernes centrales est connectée à l’antenne principale de la montagne des Signaux à Port-Louis. Toutes les informations sont théoriquement transmises par cette antenne, et les équipes disposent largement de moyens pour identifier l’auteur des fuites des bandes diffusées dans la nuit du vendredi 18 octobre, ajoute-t-il.

Dev Jokhoo met en doute l’hypothèse d’une utilisation de l’intelligence artificielle dans cette affaire de phone tapping. Il souligne l’importance de remonter jusqu’aux auteurs de ces fuites des bandes audios. « Se lev enn profesionel ek dimounn ki bien plase », estime-t-il. Il commente également le timing de ces événements, soulignant la coïncidence avec la campagne électorale et rappelant que les fuites sont courantes dans le secteur public. « Fonksioner fini avoy kopi dokiman kan ena bann PNQ », confie-t-il.

Concernant les équipements de phone tapping, Dev Jokhoo rappelle que ces opérations sont soumises à un cadre légal strict. « Avant ‘tapping’, bizin dimann enn lord divan lakour ek spesifie dire de lekout pou enn nimero ek kan fini, bizin inform sa ziz-la ek donn li enn rapor lor bann konklision. » Il précise que c’est légal tant qu’il y a des raisons valables.

Les équipes de phone tapping sont reliées aux opérateurs de téléphonie mobile via une licence. À Maurice, on compte trois opérateurs. Avant l’émission de leurs licences, ces opérateurs s’engagent, via les clauses 30-33 de l’Information and Communication Technologies (ICT) Act, à disposer de la technologie nécessaire pour effectuer des écoutes téléphoniques, dans l’éventualité que la police ou une autre autorité en aurait besoin. « C’est un peu dans ce sens que la police obtient des Itemised Bills pour les besoins d’enquête », fait ressortir 
Dev Jokhoo.

Ciblage de la Haute commission britannique : « C’est effrayant ! »

« C’est effrayant ! » commente Dev Jokhoo au sujet de la fuite d’une conversation présumée entre la haut commissaire britannique et Ken Arian. Selon les procédures, indique-t-il, l’ambassade aurait déjà envoyé un Country Report à Londres à ce sujet.

Un ancien cadre du NSS : «Il y avait des appréhensions avec le projet Safe City»

« Il ne faut pas outrepasser les limites en portant atteinte à la vie privée d’un citoyen, sans motif légitime », commente un ancien cadre du NSS. Il précise que l’unité est sollicitée pour des exercices de mise sur écoute téléphonique ciblant des criminels, trafiquants de drogue ou présumés extrémistes/terroristes. Il déplore l’utilisation de ces outils pour traquer des opposants politiques : « Fer sa dan enn pei demokratik, li pa normal. »

Cet ancien membre du NSS confie à Le Dimanche/L’Hebdo qu’il y avait des appréhensions lors de l’acquisition et la mise en place du projet Safe City. « Nous savions que les caméras étaient si puissantes qu’elles pouvaient lire une carte dans la poche d’une personne à 500 mètres. Les conversations dans les rues peuvent également être captées et enregistrées par ces appareils », indique-t-il. Tout en reconnaissant l’efficacité de ces systèmes dans la lutte contre la criminalité, il souligne l’atteinte significative à la vie privée qu’ils représentent. Bien qu’il ne fasse plus partie de l’unité, il se demande si, aujourd’hui, le NSS dispose d’un système encore plus sophistiqué capable de réaliser davantage de tâches dans ce sens.

 

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