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Michael Sik Yuen, ministre du Commerce : «Il faut faire preuve de responsabilité»

Une baisse du prix de l’essence pourrait bientôt devenir réalité, selon Michael Sik Yuen. Le ministre du Commerce reste optimiste, malgré un contexte international instable. Il mise sur les nouvelles cargaisons et la réduction du déficit pour permettre un allègement à la pompe dans les prochaines semaines.

Les prix des carburants restent inchangés. Pour quelles raisons ?
Il faut avant tout comprendre que les prix à Maurice ne sont pas fixés arbitrairement. Ils obéissent à un mécanisme bien établi depuis 2011, qui repose sur des règles précises. Une réduction ne peut être envisagée que si la variation du prix du carburant dépasse les 4 % à la baisse. Or, à ce jour, cette condition n’est pas remplie. La dernière variation enregistrée est une diminution de seulement 3,72 %. 

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Je peux vous donner quelques chiffres pour illustrer cela. En avril 2025, le prix de l’essence sur le marché international s’élevait à 657,48 dollars par tonne métrique. En mai, ce prix est monté à 671,79 dollars, soit une hausse de 14,31 dollars. Puis, en juin, en raison de la guerre au Moyen-Orient, le prix a grimpé à 716,94 dollars, soit une augmentation supplémentaire de 45,15 dollars. Ce n’est qu’en juillet que nous avons observé un léger recul à 707,32 dollars, soit une baisse de 9,62 dollars. Au final, nous avons donc une hausse nette de près de 50 dollars sur trois mois. Cela montre bien que le marché reste instable.

Il est important aussi de rappeler que nous n’achetons pas du pétrole brut, mais des produits raffinés : de l’essence et du diesel prêts à la consommation. C’est comme comparer une armoire finie à des planches de bois : les prix ne sont pas les mêmes. Malheureusement, dans les médias, on voit souvent les prix du brut, exprimés en barils, qui ne reflètent pas notre réalité d’importation.

Par ailleurs, le Price Stabilisation Account, qui permet de lisser les hausses ou de compenser certaines baisses, est toujours déficitaire. Le mois dernier, il accusait un déficit de Rs 2,3 milliards. Aujourd’hui, il est à Rs 2,4 milliards. Pour mémoire, ce déficit était de Rs 5,2 milliards sous le précédent gouvernement. Nous travaillons donc à le réduire, ce qui est une condition essentielle pour envisager une diminution durable des prix.

Qu’en est-il du diesel ? Peut-on s’attendre à une amélioration de ce côté ?
La situation est plus complexe pour le diesel. Contrairement à l’essence, le prix du diesel n’a cessé d’augmenter ces trois derniers mois. En mai 2025, le prix du diesel était de 76 dollars par baril. Il est passé à 83 dollars en juin, puis à 87,76 dollars en juillet. Même après la fin du conflit au Moyen-Orient, les prix n’ont pas fléchi. Ce contexte ne nous permet pas de considérer une baisse dans l’immédiat.

Alors, à quand une éventuelle baisse des prix des carburants ?
Je reste optimiste, surtout pour l’essence. Bien sûr, tout dépend de l’évolution de la situation géopolitique mondiale, qui a une influence directe sur les cours du pétrole. Il faut aussi surveiller la stabilité de la roupie par rapport au dollar. Une dépréciation du dollar serait bénéfique pour nous.

Par ailleurs, un nouvel appel d’offres a été lancé par la State Trading Corporation (STC) depuis avril, et un nouveau contrat est en vigueur depuis le 1er août. Toutefois, à ce jour, aucune cargaison du nouveau fournisseur n’est encore arrivée à Maurice. Les livraisons sont attendues dans les prochaines semaines. Cela signifie que les prix en vigueur reflètent encore les conditions du précédent contrat. Si les nouveaux arrivages bénéficient de meilleures conditions, et que tous les indicateurs restent favorables, il est possible que nous procédions à une baisse du prix de l’essence, peut-être dans quelques semaines ou mois.

Il est important de souligner que le Petroleum Pricing Committee (PPC) est tenu de se réunir tous les quatre mois au plus tard. Mais si une réduction est justifiée avant ce délai, rien ne nous empêche d’agir plus tôt. Pour le diesel, même une chute des prix de 10 à 15 % au niveau international ne justifierait pas une révision à la baisse à Maurice, en raison du déficit accumulé.

Le gouvernement envisage-t-il d’utiliser le Price Stabilisation Fund pour faire baisser les prix des carburants ?
C’est une question de choix. Ce fonds, actuellement doté de Rs 2 milliards, peut être mobilisé soit pour atténuer le coût des carburants, soit pour alléger celui des produits alimentaires de base. Mais le déficit du Price Stabilisation Account sur les carburants atteint Rs 2,4 milliards. Utiliser l’intégralité du fonds pour combler ce déficit serait insuffisant, et il nous manquerait encore Rs 400 millions.

À titre personnel, je privilégierais une utilisation du fonds pour soulager les consommateurs sur les produits de première nécessité, qui touchent davantage les ménages les plus vulnérables. Nous avons déjà eu plusieurs réunions avec le ministère des Finances, la Mauritius Revenue Authority (MRA), le State Law Office et la STC pour structurer une proposition en ce sens. Ce jeudi, je rencontrerai les parties prenantes, notamment les associations de consommateurs et la Chambre de Commerce, pour recueillir leurs avis avant de soumettre une proposition au Conseil des ministres.

Certains citoyens expriment leur déception, car la réduction des prix des carburants était une promesse phare du gouvernement. Or, après une première baisse en décembre, plus rien n’a bougé. Que leur répondez-vous ?
Je comprends parfaitement cette frustration. Moi aussi, je préférerais pouvoir annoncer une baisse. Mais il faut faire preuve de responsabilité. Comme je l’ai expliqué, le mécanisme en place date de 2011 et a été validé par tous les gouvernements successifs. Il vise à protéger le pays des fluctuations extrêmes des prix internationaux tout en garantissant un approvisionnement stable. Changer ce mécanisme n’est pas une décision anodine. D’autant plus que, pour l’instant, nous devons encore rembourser un déficit de Rs 2,4 milliards. Ce déficit a nécessité que la STC contracte un emprunt pour assurer la continuité de l’approvisionnement.

On ne peut pas vendre à perte indéfiniment. Si nous vidons les caisses aujourd’hui, nous risquons de ne plus avoir les moyens d’acheter le carburant nécessaire demain. Et cela serait bien plus grave pour l’économie et la population. C’est pourquoi notre priorité reste de redresser la situation financière liée aux carburants, tout en gardant un œil sur les facteurs internationaux. Lorsque toutes les conditions seront réunies, notamment un recul suffisant des prix, la stabilité monétaire et la réduction du déficit, nous agirons sans tarder.

 

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