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Megh Pillay :« Toute décision sur le prix public est prise par le gouvernement et non par le PPC »

Le prix du pétrole à l’international suit une courbe baissière. Le Petroleum Pricing Committee devrait se réunir en ce mois de septembre. Or, Megh Pillay est d’avis que celui-ci n’a pas d’emprise sur la décision de réduire ou pas les prix à la pompe.  

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Comment a évolué le prix du baril à l’international depuis mai dernier ? 
Durant l’année écoulée, le pétrole est resté volatile comme toujours mais avec une tendance baissière. Le prix du baril est passé de USD 95 en septembre 2023 à USD 76 fin décembre de la même année avant d’atteindre USD 78 en juin 2024 et USD 73 ces jours-ci.

La dernière rencontre du Petroleum Pricing Committee (PPC) remonte au 24 mai et la prochaine est prévue pour le 24 septembre. Fallait-il convoquer une réunion avant cela ?
Selon la loi, le PPC doit se réunir aussi souvent que nécessaire et au moins une fois tous les quatre mois. Le PPC s’est réuni à deux reprises en moins d’une semaine le 30 septembre et 6 octobre. À la première réunion, il avait fixé le prix à Rs 72,10 et Rs 60 pour l’essence et le diesel respectivement. Une semaine après, il baissa l’essence à Rs 69 et monta le diésel à Rs 63,95. 

Quelles sont les perspectives pour les prix à l’international ?
Selon les données fiables, le cours du pétrole resterait principalement sous l’influence de deux facteurs : d’une part, la demande de la Chine, le plus gros consommateur mondial et de l’autre, l’offre de l’OPEP+ , le plus gros fournisseur mondial. La demande chinoise s’est affaiblie avec un ralentissement de la croissance, la crise de l’immobilier et la hausse du chômage parmi d’autres raisons. L’annonce par l’OPEP+ de l’annulation de sa propre réduction volontaire de 2,2 millions de baril par jour fit chuter le Brent à USD 75 en juin. Avec cette annulation qui sera effective progressivement à partir du dernier trimestre de 2024, l’OPEP+ mettra plus de pétrole sur le marché. Comme il est prévu que les réserves n’auront baissé que d’un million de baril par jour jusqu’à la fin de l’année, l’équilibre entre la production et la demande globale, les deux déterminants du prix mondial, restera stable. Donc, on prévoit de la volatilité au jour le jour mais une stabilité dans le temps. Et comme Maurice n’importe pas chaque jour, mais à intervalles de plusieurs semaines, les fluctuations quotidiennes du cours mondial sont largement mitigées avant de nous atteindre.

Le contexte électoral à Maurice peut-il pencher en faveur des automobilistes avec le PPC optant pour une baisse des prix à la pompe ce mois-ci?
Le Petroleum Pricing Mechanism (PPM) cessa de déterminer le prix détail depuis plusieurs années suivant la diversion des surplus commerciaux ailleurs qu’aux Price Stabilisation Accounts, qui furent conçus comme le cœur de la formule de fixation des prix. Ces deux caisses stabilisatrices du prix sont restées déficitaires de Rs 4 milliards à Rs 5 milliards depuis. Le gouvernement injecta Rs 250 millions en octobre dernier pour faire baisser le prix de l’essence en octobre. D’où le fait qu’une deuxième réunion du PPC est convoquée en une semaine. Il est clair que toute décision sur le prix public est prise par le gouvernement et non par le PPC.

Le déficit du Price Stabilisation Account (PSA) n’a pas diminué entre janvier et mai, demeurant à Rs 4,2 milliards. Est-ce un facteur défavorable? 
Ce n’est pas le déficit du PSA qui empêcherait une baisse au cas où cela est jugé opportun. Comme mentionné plus haut, il ne faut pas oublier que le gouvernement avait injecté Rs 250 millions afin de rétablir la situation du PSA de l’essence. 

Comment est-ce que le prix des carburants a influencé le taux d’inflation à Maurice depuis le dernier PPC ?
Quand le prix du carburant n’est plus indexé sur le cours mondial, on crée des distorsions à l’économie qui sont difficiles à gérer. Quand on ne baisse pas le prix lorsque le cours mondial descend, mais qu’on augmente le prix lorsque le cours mondial monte, on crée une inflation artificielle. Tout le monde sait que les prix des marchandises et des services grimpent automatiquement avec le prix du carburant mais ne baissent jamais par la suite.

Les producteurs de pains ont à plusieurs reprises réclamé une hausse des prix en raison de l’impact du coût du diesel. Le prix de ce carburant entraîne-t-il un effet contrebalancé par rapport aux subsides accordés par le gouvernement sur la farine ?
Cela crée des distorsions dans l’économie qui s’ajoutent à l’inflation, rendant la situation difficile à gérer. À Maurice, les prix à la pompe ne sont pas diminués lorsque les coûts internationaux baissent, mais ils sont augmentés lorsque ces coûts grimpent. Les producteurs de pains ont raison de réclamer une hausse des prix du pain, car le secteur du transport est également affecté par le coût des carburants. Les transports industriels et commerciaux, ainsi que la Zone franche et les producteurs d’usine, utilisent du diesel. C’est pourquoi, dans la sagesse du passé, nous avons souligné à plusieurs reprises l’importance de ne pas augmenter le prix du diesel, car cela a un effet ricochet sur toutes les marchandises et services dans le pays. Cette influence se fait sentir sur l’ensemble de l’économie.

Sans une réduction des prix du carburant à la pompe lors du prochain PPC, cela peut-il déjouer les prévisions de croissance de 6,5 % pour l’économie locale cette année ?
Il m’est difficile de me prononcer dessus. Ce que je peux dire, c’est que la situation perdure depuis pas mal de temps. Les fluctuations du cours du pétrole sont mitigées lorsque le produit atteint nos côtes. Maurice n’importe pas le pétrole sur une fréquence journalière et ne souffre pas de la fluctuation. La tendance est baissière et le prix est déterminé par la production mondiale. Ce sont les grosses économies comme la Chine ou l’Inde qui utilisent beaucoup de pétrole. S’il y a un ralentissement dans ces économies, l’OPEP+ coupe sa production. À Maurice, nous avons créé une dette artificielle sur le PSA. 

Diriez-vous que l’importation des carburants en roupies est une décision payante ?
Ce serait une première sur le marché pétrolier ! Même la France ne pourra pas payer le pétrole en euros ou le Royaume Uni en livres sterling. Le pétrole s’échange strictement en dollars. L’embargo sur la Russie a entraîné des négociations de celle-ci avec certains pays importateurs du pétrole russe. La Chine règle ses factures en utilisant le yuan, ce qui est favorable à la Russie qui importe des produits chinois. Il y a eu des intermédiaires qui font des transactions du pétrole sur le marché noir et qui ont négocié pour l’utilisation d’autres devises. La STC a annoncé que les factures pétrolières sont payées en roupies. Cependant, en analysant la situation, on constate que le coût de nos importations du pétrole en roupies est équivalent, voire supérieur à celui en dollars. À l’époque où je travaillais à la STC, l’importation du pétrole coûtait Rs 45 milliards par an. Ce montant est désormais passé à Rs 66 milliards. Que vont faire les fournisseurs de pétrole avec toutes ces roupies ? En fin de compte, nous achetons le pétrole en dollars, car il ne s’échange pas en roupies.

 

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