Me Neil Pillay, avocat spécialisé dans le droit des technologies de l’information, critique l’inaction des autorités compétentes face à la diffusion de contenus nuisibles sur les réseaux sociaux. Il appelle à un renforcement des lois et à la responsabilisation des partis politiques pour prévenir les dérives et manipulations électorales. Selon lui, les vidéos publiées sur les réseaux sociaux sont soumises à la régulation de l’Information and Communication Technology Authority (ICTA), qui a pour mission de superviser les communications électroniques à Maurice. Dépendant de la gravité de l’offense, l’avocat précise que cela peut aller d’une simple amende à de la prison.
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Cependant, il déplore un manque d’action proactive de la part de cette institution. « L'ICTA aurait dû, au minimum, consigner des dépositions lorsqu'elle constate la diffusion de vidéos portant préjudice », affirme-t-il. Selon lui, la police, tout comme l’ICTA, n’a pas besoin d’attendre une plainte pour intervenir : elle peut initier des enquêtes d’office lorsqu’une vidéo en ligne enfreint les lois.
L’efficacité des lois en question
Selon Neil Pillay, l’efficacité des lois existantes repose sur leur application rapide et rigoureuse. « Une loi n’a de valeur que si elle est appliquée. Si les autorités agissent rapidement, elles peuvent freiner la diffusion de contenus nuisibles », déclare-t-il. Toutefois, il critique la lenteur avec laquelle les autorités réagissent à ce type de violations, estimant que cette inaction contribue à l’ampleur du problème. Un autre obstacle majeur réside dans la difficulté de retracer l’identité des personnes qui postent ces vidéos. « Il est vrai que remonter jusqu’à l’auteur d’une vidéo diffamatoire est compliqué », concède notre interlocuteur. Ce dernier explique que, dans la plupart des cas, les demandes d’informations adressées à des plateformes comme Facebook par les autorités mauriciennes restent sans réponse. « Nous ne recevons pas la même attention que les grandes puissances, et cela limite considérablement l’action des autorités locales », précise-t-il.
Un besoin de contrôle accru en période électorale
Face à ces défis, Neil Pillay estime que des mesures de contrôle spécifiques devraient être mises en place, notamment pendant les périodes électorales où la désinformation et les manipulations sont plus fréquentes. « La Commission électorale aurait pu instaurer des règles claires pour encadrer la diffusion de vidéos pendant cette période », soutient-il. Toutefois, il s’interroge sur la capacité du bureau du commissaire électoral à faire appliquer ces mesures. « Même si l’on parvient à identifier l’auteur d’une vidéo, le parti politique qu’elle favorise peut facilement nier toute responsabilité et affirmer qu’il n’a jamais donné d’instruction en ce sens », observe-t-il.
Une responsabilité partagée
Pour Neil Pillay, la solution à ce problème réside d’abord dans la responsabilisation des partis politiques eux-mêmes. « Les partis doivent sensibiliser leurs partisans à adopter une conduite respectueuse. C’est une question de discipline et de respect de soi », affirme-t-il. Ainsi, il appelle à un code d’honneur parmi les partisans, insistant sur la nécessité de ne pas s’engager dans des pratiques qui pourraient entacher leur propre dignité ou celle de leur mouvement politique.
Cependant, l’avocat reconnaît que cette auto-discipline n’est pas toujours encouragée, surtout lorsque les vidéos diffamatoires peuvent indirectement servir les intérêts des partis politiques. « Combien de fois avons-nous entendu un leader politique demander à ses partisans d’arrêter de diffuser des vidéos diffamatoires ? » s’interroge-t-il. Selon lui, tant que le contenu reste sérieux, il ne pose pas de problème, mais dès qu’il s’agit de montages contenant des informations fausses ou diffamatoires, les leaders politiques devraient intervenir et encourager leurs partisans à cesser ces pratiques. « Il est peut-être temps que les leaders prennent leurs responsabilités », conclut-il.
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