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Me Lovena Sowkhee, de Pedostop : «On aurait dû introduire la castration chimique pour les prédateurs sexuels»

Me Lovena Sowkhee revient sur les délits sexuels qui font, une fois de plus, les grands titres. Elle évoque des lacunes dans nos lois et les moyens de contrôler les auteurs de ces actes.

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Lallchand Boodhoo, un habitant de Saint-Pierre de 50 ans, a été arrêté le 29 septembre. Il répond d’une accusation d’attouchements sexuels sur une quadragénaire. Or, il n’en est pas à ses premiers démêlés avec la justice. Il a été condamné à huit ans de prison pour le viol d’une sexagénaire et aussi pour le kidnapping et des abus sexuels sur deux fillettes. Y a-t-il des lacunes dans le système ?
La loi dit que si une personne a été condamnée pour abus sexuels sur mineur, elle est fichée comme un agresseur sexuel. Cette personne doit se rapporter au poste de police. Lallchand Boodhoo était-il sur ce registre ? Aussi, ce registre a-t-il été mis à jour et la police a-t-elle pu répertorier les personnes condamnées pour des crimes sexuels ? 

Il est important d’avoir des réponses à toutes ces questions. Si ce registre n’est pas complet, on doit savoir pourquoi. 

Je me demande s’il y a un programme établi pour la réinsertion des prédateurs sexuels. On ne peut pas faire passer un prédateur sexuel devant un psychologue et qualifier cette consultation de réhabilitation»

Ne faut-il pas des peines plus sévères pour ce genre de délits ? 
Bien que la loi punisse sévèrement les abus sexuels, certains agresseurs arrivent à s’en sortir avec des peines légères. L’année dernière, j’ai été choquée de lire dans les journaux qu’une personne coupable d’abus sexuels sur un enfant a été condamnée au travail d’intérêt général. Il faut une application plus sévère de la loi. 

En tant qu’avocate référente de Pedostop, je vois beaucoup d’enfants victimes qui décident d’aller de l’avant en dénonçant leurs agresseurs. Mais si les peines ne reflètent pas la gravité du crime, cela risque de décourager les victimes. Les lois existent et sont sévères. Nous demandons donc une application plus sévère de la loi et des peines exemplaires.  

Qu’est-ce qui ne marche pas ? 
On ne peut pas prendre des années pour déposer une affaire d’abus sexuels devant la justice. Je vous donne un exemple. Je représente une fille de 7 ans, qui a été victime d’attouchements de la part d’un membre de sa famille. Presque une année s’est écoulée et l’affaire n’a toujours pas été déposée devant le tribunal. 

C’est déjà un traumatisme pour ces victimes de se manifester et d’en parler. Maintenant s’il faut qu’elles attendent des années pour obtenir justice... 
Il faut aussi revoir la formation des enquêteurs dans ce genre d’affaires. Il faut une psychologue en permanence attachée à la brigade de la protection de la famille. Il faut également un interprète pour les sourds et les muets qui sont victimes d’abus sexuels. 

La police doit donner priorité à ces affaires d’abus sexuels sur mineurs. 

Bien que la loi punisse sévèrement les abus sexuels, certains agresseurs arrivent à s’en sortir avec des peines légères»

Nous avons deux nouvelles lois pour lutter contre les délits sexuels sur les enfants. Notamment le Children’s Act et le Child Sex Offender Register Act de 2020. Sont-elles suffisamment dissuasives ? 
On a raté un peu le coche. C’est malheureux. On aurait dû introduire la castration chimique pour les prédateurs sexuels. Un registre n’empêchera pas un prédateur sexuel de passer à l’acte, mais une castration chimique oui. Beaucoup de pays l’ont fait. 

Ailleurs, les pédophiles n’ont pas le droit de s’approcher de certains endroits, comme les écoles et les jardins d’enfants. On aurait aussi pu obliger ces personnes à porter des bracelets électroniques. On doit pouvoir se servir de la technologie. En ce sens, je trouve que le Children’s Act et le Child Sex Offender Register Act sont à côté de la plaque. 

Toutefois, il faut reconnaître que le Child Sex Offender Register Act de 2020 est une grande première. Maintenant, un prédateur sexuel ne pourra pas s’évanouir dans la nature.  

Pensez-vous qu’une loi pour la castration chimique obtiendra le soutien populaire  ?
La société ne tolère pas les prédateurs sexuels et les pédophiles. Je n’ai aucun doute qu’une telle loi sera très bien accueillie par nos compatriotes. 

Il y a maintenant un registre à la disposition de la police pour surveiller les mouvements des pédophiles en liberté. Comment se passe cette surveillance  ?

Après une condamnation pour certains délits spécifiques, comme le viol d’un enfant ou une relation sexuelle avec mineur, le condamné est fiché. Une fois sorti de prison, il a un délai de sept jours pour se rapporter au poste de police de la localité où il habite. 

Il revient alors au commissaire de police de décider à quelle fréquence il devra se rapporter à la police. Et aussi la période concernée. Ce qui dépend du genre de délit sexuel commis par l’agresseur. C’est peut-être à vie, si la personne a été condamnée pour le viol d’un enfant. 

L’éventuel déplacement de cette personne à l’étranger doit également être signalé à la police. Elle doit communiquer son adresse de même que l’endroit où elle travaille.

La police doit donner priorité à ces affaires d’abus sexuels sur mineurs»

N’est-ce pas un handicap pour un condamné qui s’est repenti ?
La personne ou le commissaire de police peut demander de suspendre cette obligation. Ce serait dans le cas où la personne en question ne représenterait plus un risque pour la société, surtout pour les enfants.  

Y a-t-il un suivi psychologique de ces prédateurs sexuels  ?
Je me demande s’il y a un programme établi pour la réinsertion des prédateurs sexuels. Je me pose la question de savoir s’il y a un programme professionnel à ce jour. On ne peut pas faire passer un prédateur sexuel devant un psychologue et qualifier cette consultation de réhabilitation. 

Que faudrait-il changer, selon vous, pour lutter contre les abus sexuels ? 
Les statistiques montrent que dans la majorité des cas, ce sont des proches des victimes qui commettent ce genre de délit. Il faut expliquer aux enfants ce qui est correct et ce qui ne l’est pas. Il faut aussi éduquer les parents pour qu’ils puissent aborder ce genre de thème de discussion. 
L’école a aussi un rôle à jouer. L’éducation sexuelle doit faire partie du cursus scolaire dès la maternelle. Il faut aussi que les parents et les enseignants aident les enfants victimes d’abus à briser le silence. 

 

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