Les aspects juridiques de l’affaire Sherry Singh ont été abordés dans l’émission « Au cœur de l’info » ce jeudi. L’avocat Hervé Duval Jr était l’invité de la journaliste Florence Alexandre.
Publicité
L’émission « Au cœur de l’info » de ce jeudi était consacrée à la dimension juridique de l’affaire découlant des allégations formulées par l’ex-CEO de Mauritius Telecom à l’encontre du Premier ministre. La journaliste Florence Alexandre accueillait Me Hervé Duval Jr, Senior Counsel, pour donner son avis d’avocat sur les différents aspects du dossier.
Sherry Singh soutient que Pravind Jugnauth l’a obligé à laisser une équipe étrangère intervenir sur les infrastructures du réseau Internet de Maurice. Il dénonce une manœuvre qui, selon lui, aurait porté atteinte à la sécurité de l’État. Le chef du gouvernement, qui parle d’un simple « survey » sur le câble SAFE, a porté plainte contre lui lundi pour diffamation criminelle, diffusion de fausse nouvelle et « breach of ICTA Act ». Une enquête a été ouverte par le Central Criminal Investigation Departement, qui a débuté hier l’interrogatoire de Sherry Singh.
Me Hervé Duval Jr indique que la loi sur la cybersécurité permet d’effectuer des audits sur le réseau Internet mais que cela se fait selon une procédure spécifique et non sur demande du Premier ministre par un simple coup de téléphone, surtout si c’est une équipe étrangère qui va procéder au « survey ».
L’avocat estime que « les accusations portées contre le chef du gouvernement sont très graves ». Et que si cela concerne effectivement la sécurité nationale, Sherry Singh avait « un devoir de révélation ». L’ex-CEO n’en est pas moins « un citoyen qui doit rendre des comptes aux autorités après avoir décidé d’accuser publiquement le Premier ministre », dit-il.
Sherry Singh a notamment déclaré qu’il avait accédé à la demande de Pravind Jugnauth sous la contrainte. L’homme de loi explique que « la loi définit la contrainte comme une force à laquelle on ne peut résister ». Selon lui, un ordre donné par le Premier ministre au CEO de Mauritius Telecom peut être considéré comme « une force à laquelle on ne peut résister ».
Maintenant, poursuit-il, la police doit mener son enquête en toute indépendance. « Tout n’est pas parfait à Maurice mais c’est un état de droit. Il ne faut surtout pas donner l’impression que la police est en train d’intimider Sherry Singh. S’il affirme qu’il détient toutes les preuves, cela devrait être la priorité des priorités de la police. »
Dans cette affaire, « Pravind Jugnauth a aussi des comptes à rendre. Selon notre Constitution, le Premier ministre n’est pas un monarque », souligne Me Hervé Duval Jr. Il dit observer « un dysfonctionnement de la démocratie mauricienne ». Car après les allégations de Sherry Singh, il aurait dû y avoir une « séance spéciale du Parlement pour que le Premier ministre vienne donner les explications nécessaires. Le citoyen mauricien a le droit de savoir. Le PM est redevable au Parlement ».
Il pense également que Pravind Jugnauth aurait dû faire une conférence de presse et s’adresser à la nation en raison l’envergure de l’affaire. « On ne peut pas se taire dans une situation pareille », dit-il.
Et que risquerait Sherry Singh s’il était poursuivi pour les motifs qui justifient son interrogatoire ? « La diffamation criminelle et la diffusion de fausses nouvelles sont des délits qui peuvent être passibles de peines de prison, selon la gravité », répond l’avocat. Il précise cependant que quand une personne est privée d’exécuter un devoir constitutionnel (comme dénoncer une atteinte à la sécurité de l’État), elle a la possibilité de déposer une plainte constitutionnelle à la Cour suprême.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !