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Marché des devises : les interventions de la BoM entraînent une amélioration temporaire 

La Banque de Maurice a injecté 20 millions de dollars sur le marché le 26 août.
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Au lundi 26 août 2024, la Banque de Maurice avait injecté 80 millions de dollars au total sur le marché intérieur des changes durant le mois. Cette stratégie semble fonctionner mais elle soulève des questions quant à sa soutenabilité. 

Le lundi 26 août 2024, la Banque de Maurice (BoM) a vendu 20 millions de dollars au taux de Rs 46,11 par dollar sur le marché intérieur des changes, marquant sa huitième intervention consécutive un lundi. En juillet et août, les injections cumulées ont atteint 230 millions de dollars. Plusieurs importateurs avaient soulevé le défi de s’approvisionner en devises en vue de payer leurs factures d’importations. 

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Suren Surat, CEO de SKC Surat, constate une amélioration du marché des changes grâce à la BoM.

Suren Surat, Chief Executive Officer de SKC Surat, constate une amélioration sur le marché intérieur des changes grâce aux récentes interventions de la BoM. « Au lieu d’acheter 200 000 dollars en cinq tranches, nous parvenons à l’obtenir en deux achats », souligne-t-il. 

Ce répit temporaire, décrit comme un soulagement, permet aux importateurs de régler leurs paiements en souffrance, sachant que cela devenait stressant pour certains importateurs face à leurs fournisseurs en raison des retards de paiement. Cependant, une question persiste : l’approche de la BoM est-elle viable à long terme pour l’économie ?

Bénéfices des exportateurs 

Le gouverneur de la Banque centrale a assuré, après le Comité de politique monétaire de juillet, que l’institution a « suffisamment de ressources pour approvisionner le marché si nécessaire ». Pourtant, Suren Surat s’inquiète que l’attitude de certains exportateurs, qui préfèrent conserver leurs devises en anticipation des fluctuations futures du taux de change, ne perturbe le bon fonctionnement du marché. 

Il rappelle que les contribuables ont soutenu ces secteurs durant la crise. « Ces secteurs pourraient songer à convertir 50 % de leurs devises et laisser que cela rentre dans l’économie en roupie s’ils ne souhaitent pas vendre le tout », avance-t-il. 

Le secteur de l’exportation pourrait être l’heureux gagnant de la situation qui prévaut sur le marché des devises. Les chiffres publiés par Statistics Mauritius le 26 août indiquent que les exportations totales pour le deuxième trimestre 2024 ont atteint Rs 29,58 milliards, en hausse de 17,6 % par rapport par rapport au trimestre correspondant de 2023. 

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Selon Pascal Gil, directeur d’Upstage, le fait que les devises restent chez les entreprises complique l’approvisionnement des importateurs.

Pascal Gil, directeur d’Upstage, explique que le fait que les devises restent chez les entreprises complique l’approvisionnement des importateurs. « Certains ont du mal à s’en procurer et les prix ont tendance à grimper. Il a fallu attendre quelques mois que la Banque de Maurice se mette à tenter de réguler le taux de change dollar-roupie », fait-il ressortir.  

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Pour ce qui est des perspectives sur le marché des changes, Pascal Gil reste optimiste. Selon lui, la situation ne pourrait être pire que ce qu’elle était il y a trois mois. Tant que la Banque centrale continuera d’injecter des dollars régulièrement, ce sera un signal qu’il y a des devises. Le directeur d’Upstage note que le marché des devises est court au milieu du mois, mais se stabilise lorsque les entreprises vendent des devises en fin de mois pour payer les salaires.


Questions à…

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Cédric Beguier, Head of Investment Strategy ‑ Capital Markets chez Axys : «l’avenir semble incertain sur le marché des devises » 

Comment évolue le marché des devises à Maurice ?

L’avenir du marché des devises semble incertain, suscitant beaucoup de conversations au sein de la classe dirigeante. Il commence à y avoir une aversion à la détention de roupies par peur de l’érosion de la valeur de la monnaie. Pour les particuliers qui ont la chance de voyager et les parents qui envoient leurs enfants étudier à l’étranger, il semble parfois difficile d’être suffisamment approvisionné en devises par les banques commerciales. 

De plus, nous subissons toujours une inflation élevée d’environ 15 % cumulée sur les deux dernières années. C’est donc un peu la double peine car après un taux plus haut en février, l’indice des prix à la consommation (IPC) remonte en juillet. Début juillet, la roupie mauricienne perdait environ 11 % de sa valeur par rapport au dollar américain, 9 % face à l’euro et plus de 12 % face à la livre sterling sur la même période. Mais depuis le 15 juillet, la roupie connaît un léger regain d’environ 4 %. 

Quel a été l’impact des récentes interventions de la BoM ? 

La Banque de Maurice a intensifié ces interventions entre le début juillet et le 26 août. La BoM est intervenue à sept reprises sur le marché des changes pour un montant total de 230 millions de dollars. Même si le timing semble bon, il est difficile d’en mesurer l’impact concret, car la devise principale, qui reste le dollar, connaît une correction d’environ 5 % depuis les pics de juin. 

Plusieurs importateurs peinaient à obtenir l’intégralité de leur montant de devises d’un seul trait auprès des banques. Qu’est-ce qui peut expliquer cette situation et comment la résoudre ? 

Comme je le mentionnais précédemment, la difficulté d’obtenir des devises en totalité, même pour des importateurs considérés comme essentiels, révèle une rétention importante de devises de la part des principaux pourvoyeurs. Cette problématique ne se résoudra pas rapidement car la confiance des opérateurs mettra du temps à se rétablir. 

Des mesures fiscales incitatives ou coercitives peuvent être mises en place pour augmenter les flux de devises, mais elles risquent de rencontrer une forte résistance du patronat et pourraient entraîner un exode des acteurs les plus vulnérables du secteur privé. Un soutien de la part des décideurs politiques d’aujourd’hui ou de demain est nécessaire pour aider les secteurs exportateurs, pour développer des chaînes de valeur ainsi que pour élaborer des filières agricoles et bovines pour alléger notre balance commerciale. 

Quels sont les facteurs susceptibles d’influencer le taux de change dollar-roupie dans le court terme ? 

En septembre, le monde aura les yeux rivés sur la réunion du Federal Open Market Committee (FOMC) pour observer une éventuelle première baisse de taux tant attendu par les investisseurs. Avec les chiffres encourageants sur la réduction de l’inflation et le discours récent du président de la Réserve fédérale américaine, il y a plus de 97 % de chances que les taux baissent. 

Cette action aurait un impact direct sur le cours des devises, et cela partout dans le monde. Ce n’est pas pour rien que le dollar perd de sa superbe récemment. Qui dit baisse des taux, dit aussi rendement en dollars moins intéressant. Il y a donc en ce moment une rotation à la fois sectorielle qui s’opère mais également des arbitrages de devises plus favorables aux exigences de rendements contre les risques des investisseurs. Tout cela aura une incidence sur le taux de change dollar-roupie.

 

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